Sentimental deadline

Chapitre 14 : Rien qu'un moment

Le son de la voix des deux hommes a cessé depuis quelques dizaines de minutes. Midnight, que j'ai entendu intervenir, les a séparé et fait sortir.

Dans cette pièce d'une blancheur trop éclatante pour être réelle, je rouvre les yeux et me redresse. Autour de moi, plus un bruit, plus un mouvement. Tout le monde a disparu.

Un soupir soulagé et malaisé sort de ma bouche. Et toutes les larmes que je réfrénait depuis mon réveil refont surface d'un coup.

Serrant la couverture sur mes genoux, la bouche entrouverte pour mieux respirer, je regarde les perles salées filer et s'écraser sur le matelas.

Ma respiration se coupe de temps à autres, mes pupilles tremblent, mes poings se serrent une nouvelle fois. Je n'arrive même plus à me souvenir de la manière dont j'avais réussi à garder toute cette douleur en moi. Maintenant que je peux l'évacuer, elle me semble tellement plus immense. Tellement puissante.

Les minutes passent silencieusement au rythme de mes pleurs. Tout est flou. Ma vision, mes sentiments, ma raison. Et c'est dans ce moment de faiblesse qu'une ombre se présente à la porte.

Je ne peux rien distinguer d'autre que sa silhouette, à travers la vitre flouée de cette foutue chambre.

Après quelques coups, et sans même attendre de réponse, ce qui n'était qu'une ombre jusque là passe la porte, et je me retrouve face à elle.

Un femme plutôt petite, mais tout de même plus grande que moi, une adulte, entre et s'approche du lit sur lequel je suis toujours entrain de pleurer toutes les larmes de mon corps.

Des cheveux lisses qui descendent jusqu'à la taille, un grand chapeau de paille, et une longue robe blanche. Comme seul ornement, un morceau de tissu orangé à son poignet.

Proche de moi, elle arbore une expression d'une douceur extrême. Sa main vient se poser sur mon épaule. Je me détends à ce contact, et le sourire chaleureux sur son visage en fait automatiquement apparaître un sur le mien.

- Rentrons à la maison

Je ne peux m'empêcher de la prendre dans mes bras suite à ces mots, étreinte à laquelle elle répond tendrement.
Rentrer chez nous, oui, c'est tout ce que je veux. Qu'elle m'emmène loin de tout ça.

Ça m'étonne de la voir ici, elle qui ne m'a jamais accordé le moindre intérêt, bien trop occupée par ses devoirs. Est-elle revenue pour cette expérience stupide ? Non, quand même pas.

Blottie dans ses bras, mes questionnements ne sont pas long. Elle est là, et c'est tout ce qui compte. Elle est venue me chercher.

On reste comme ça quelques minutes, sa tendresse a le dont de m'endormir en un temps record.

Mais alors que j'allais sombrer à nouveau, je sens de petits spasmes la secouer. Puis sa voix résonne dans la pièce pratiquement vide. Son rire.

Il est malsain, monstrueux, démoniaque. Je lève la tête, son regard le plus fou s'est posé sur moi. Mon sang ne fait qu'un tour. Ses mains pâles remontent de ma taille à mes épaules, puis se posent sur mon cou.

Je sens une pression sur ma gorge, et réalise qu'elle tente de m'étrangler.

- .. ma tendre enfant... quel dommage qu'un démon comme toi n'ai pas le droit de vivre~

Je recule et essaie de me défaire de sa prise en empoignant ses bras, mais je n'arrive à rien. Sa peau a prit la froideur de la glace, et la lourdeur du métal. Impossible de m'en extraire.

Son sourire n'a plus rien de rassurant. À présent, c'est celui amusé et morbide d'un bourreau sur le point de donner sa sentence.

Elle me terrifie. Même les gens que j'aime veulent ma mort à présent ?

À défaut de l'empêcher de commettre l'irréparable, et malgré ma tête qui commence déjà à tourner, je plaque mes mains contre mes oreilles. Je ne veux pas que ce rire soit le dernier son à résonner dans mon esprit.

Mes iris prennent peu à peu la teinte des siennes. Noires, mornes, vides. Loin de leur vert émeraude habituellement éclatant.

Je ne bouge plus d'un millimètre.

Je me sens partir.

La pièce est vide. D'une blancheur bien trop éclatante.

Comme sa robe. Tout est blanc. Blanc et vide.

Tout est.... blanc...

Un sursaut.. un cri.. Mes yeux s'ouvrent enfin.