Chapitre 7

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La fin de semaine est à ses portes et j'appréhende un peu celle-ci. Je veux pouvoir passer du temps avec Adam, sans qu'on soit obligé de se cacher. J'aimerais faire une petite escapade avec lui, mais je ne sais pas quelle raison donner à ma mère pour lui confisquer sa voiture. Pendant le dîner du vendredi, la chance tourne pour moi lorsque ma mère m'annonce qu'elle et mon père vont aller visiter sa sœur à Wilmington. La voiture de ma mère sera finalement disponible toute la journée. Je l'informe que je vais faire du magasinage et voir un film au cinéma avec ma meilleure amie, Lindsay. Un mensonge de plus.

Lors de notre rencontre habituelle de fin de soirée, j'annonce la bonne nouvelle à Adam. Après avoir réfléchi aux endroits qui ne sont pas trop loin et qui nous permettraient de revenir à l'heure pour son couvre-feu, nous décidons finalement de passer la journée à Durham, la ville voisine de Raleigh. De cette façon, nous ne risquons pas de croiser quelqu'un qui nous connaît. En tout cas, je l'espère.

Dès le lever du soleil, je me réveille et me prépare avec attention, mais je n'en fais pas trop. Mon jeans bleu ajusté et mon chemisier en dentelle feront très bien l'affaire pour notre petite escapade. J'applique un peu plus de maquillage qu'à l'habitude, mais sans trop exagérer. Je suis fébrile et excité en même temps. Ce sera la première fois que nous allons passer une journée complète ensemble. J'ai hâte de pouvoir vivre mon amour sans passer mon temps à regarder autour de moi pour voir si quelqu'un nous voit.

Je vais retrouver Adam à notre endroit habituel. Je le vois à l'instant où j'entre dans le stationnement du parc du vieux moulin. Il a les mains dans les poches et joue dans les cailloux avec ses pieds. Il est habillé d'un jeans noir et d'un t-shirt blanc tout simple. Ses tatouages sur ses bras sont mis en évidence. Il a attaché ses cheveux mi-longs à l'arrière avec un élastique. J'aime bien quand ses cheveux sont desserrés sur ses épaules, mais il a l'air plus sérieux quand ils sont coiffés. Il est tellement beau. Je ne peux pas croire que cet homme est celui qui fait battre mon cœur.

Son sourire s'éveille dès qu'il m'aperçoit. Il avance vers la voiture ses deux mains dans les poches. Cette façon de se déplacer le fait paraître encore plus jeune, plus insouciant, libre de tout problème. J'adore cet aspect de lui. Il devrait toujours être comme cela, mais malheureusement son passé revient toujours lui pourrir la vie. Je lui fais signe de monter. Il grimpe dans ma voiture, m'embrasse et nous prenons la direction de la ville de Durham.

– Que veux-tu faire aujourd'hui, me demande-t-il?

– On pourrait visiter quelques musées ou le centre des lémuriens.

– Je ne suis pas très fan des musées, me dit-il avec une grimace.

– D'accord, ce sera le centre des lémuriens. On pourra dîner en ville et aller au cinéma après. Qu'en dis-tu?

– Ce sera parfait.

Le trajet est d'environ trente minutes. Je trouve un stationnement dans le centre de la ville près de l'université Duke. Nous décidons d'aller nous promener sur le campus, main dans la main comme un jeune couple d'amoureux. Je me sens enfin libre de partager mon bonheur. J'ai également l'impression que c'est la même chose pour Adam. Il est joyeux et son rire est contagieux. Pour la première fois, je le sens plus heureux. Le nuage de tristesse qui vole constamment au-dessus de lui semble avoir disparu.

La marche nous a ouvert l'appétit. Nous décidons d'aller manger une bonne pizza au restaurant The Loop. Un fou rire nous prend lorsque le fromage s'étire avant que je puisse couper ma pointe. Cette fois-ci, je me précipite sur l'addition lorsqu'elle arrive. Je sais qu'il n'a pas encore d'emploi et qu'il n'a pas les moyens de payer. Je sais également que cela le met mal à l'aise, mais je le rassure en spécifiant que c'est un plaisir pour moi et qu'il pourra me gâter lorsqu'il recevra sa première paie. Ce compromis semble le satisfaire.

Le centre des lémuriens est une nouvelle expérience pour nous deux. Les petits singes sont adorables. Adam prend la pose à côté d'une de ses mignonnes créatures et j'en profite pour le prendre en photo avec mon cellulaire. Il me vole celui-ci des mains et me bombarde de photos. Il semble s'amuser comme un petit fou. Il est adorable et je savoure chaque moment de son insouciance. La visite du centre terminé nous retournons à la voiture pour nous rendre au cinéma.

Je laisse Adam choisir le film. Évidemment, il choisit le dernier film de la franchise « Rapide et dangereux ». Je paie nos billets et j'achète un gros sac de maïs éclaté et des rafraichissements au comptoir de friandise. Adam me guide vers les bancs du fond complètement situé dans le coin le plus sombre de la salle. Je ne comprends pas trop la raison de ce choix de siège, mais lorsqu'il commence à m'embrasser l'évidence me frappe de plein fouet. Nous avions besoin de cette intimité que nous n'avions pu avoir durant la journée. Je prends conscience que ses lèvres m'ont manquée et j'en demande plus.

Le film a beaucoup d'action ce qui ravit Adam. Malheureusement pour moi, je ne suis pas adepte de ce genre de film. Mais voir Adam éprouver du plaisir me comble de joie. Le film terminé, je me dirige vers les salles de bain. J'ai besoin de me refaire une petite beauté et surtout d'évacuer les litres de coca que j'ai bu. Adam décide de m'attendre près de la sortie.

Lorsque je me dirige vers la sortie pour le rejoindre, je le vois en pleine discussion très animée avec un homme d'une stature imposante. L'homme couvert de tatouages et d'une longue barbe noire pointe Adam avec son doigt et parle très fort. Je ne comprends pas ce qui est dit puisque je suis trop loin pour entendre. Adam me remarque et coupe court sa conversation laissant son interlocuteur en plan. Celui-ci, lui cri des insanités et affiche une mine en colère. Il me prend brusquement la main et m'incite à avancer très vite pour sortir du cinéma. Il n'a jamais agi ainsi en ma présence. Je suis confuse et choquée de son geste.

– Qui était cette personne?

– Ce n'était personne d'important, me dit-il en lâchant ma main.

– Tu avais l'air de le connaître. Votre conversation était très animée.

– Laisse tomber Leila. Je ne veux plus en parler.

Un silence s'installe. Il entre dans la voiture, met sa ceinture et regarde par la vitre. Il ne dit pas un mot tout le long du trajet. Il allume la radio pour combler le silence. Son attitude me met en colère. J'évite de le regarder. Je croyais qu'on avait passé une journée de rêve et tout a été gâché en quelques instants. Je n'ai rien fait pour mériter cela. Je suis tellement déçu que mes yeux se remplissent de larmes. Je retiens mes sanglots du mieux que je peux, je ne veux surtout pas pleurer devant lui.

Il fait noir lorsque j'arrive dans la ville de Raleigh. Je dépose Adam devant sa maison de transition. Il détache sa ceinture et ouvre la portière sans m'adresser la parole. Je n'ai même pas droit à un baiser de bonne nuit. Juste avant de refermer sa porte, il se penche et regarde devant lui sans croiser mon regard.

– Je suis désolé.

Il referme la portière sans que j'aie le temps de répliquer et se dirige d'un pas pressé à la porte de la maison de transition. Je suis estomaqué. C'est tout ce que j'obtiens comme explication. Je suis tellement en colère que je pleure de rage. Les larmes coulent sur mon visage sans que je les retienne. Pourquoi agit-il ainsi? Tout se passait bien jusqu'à cette rencontre à la sortie du cinéma. Mais qui était cet homme?

J'arrive chez moi démoli. Je prends quelques minutes pour retrouver mon calme avant d'entrer dans la maison. Je ne veux pas que mes parents me voient chamboulé ainsi. Ils sont en train d'écouter la télévision lorsque je mets les pieds dans le couloir d'entrée.

– Bonsoir, ma chérie! Ta journée s'est bien passée? me demande ma mère.

– Oui, très bien. Je suis fatigué. Je vais directement dans mon lit. Bonne nuit.

Je ne reste pas plus longtemps en leur présence. Mon cœur est encore sur le point de se déchirer. Je me déshabille et attrape le premier pyjama qui me tombe sous la main. Je n'ai pas la force de me démaquiller ni de prendre ma douche. J'envoie un texto à ma meilleure amie pour lui parler, mais il est trop tard pour qu'elle me réponde. J'aurais eu besoin de son réconfort. La fatigue me rattrape tout d'un coup. Je me glisse sous ma couette et laisse aller mes larmes. Je finis par m'endormir sur mon oreiller tout trempé.

Des âmes sœurs improbables (Publié chez Essor-Livres Éditions)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant