15 décembre - Le chalet habité 3/4

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Au matin, sans surprise, j'ai une tête de déterré. J'aborde le sujet des bruits de cette nuit de façon détournée, mais personne ne réagit. Noah et Quentin n'ont rien entendu, ils ont dormi comme des bébés, d'après leurs dires. Nicolas aussi, je suppose, puisqu'il n'ajoute rien.

Quelle misère, mais en même temps, suis-je sûr d'avoir entendu quelque chose ? J'étais claqué, et même à moitié endormi lorsque le premier bruit a retenti. Et si j'étais somnambule ?

Pareil pour le filet de lumière sous la porte de la salle de bain. Noah m'assure qu'il ne s'est pas relevé et je jurerais l'avoir éteinte en sortant, mais bon, je peux me tromper. Quelle autre explication y-a-t-il, de toutes façons ? Un cambrioleur pris d'une envie pressante ? Un fantôme voyeur ? C'est ridicule, et je ne crois pas à ces choses-là.

La journée se passe sans heurt, ma mère appelle pour prendre des nouvelles, promettant de se mettre en route dès le lendemain matin avec mon père, Quentin et Nicolas se chargent de faire quelques courses et Noah et moi sortons profiter des joies des sports d'hiver pour la première fois de la saison.

Au soir, on se réunit autour d'une fondue censée réchauffer les cœurs, mais comme le jour précédent, la discussion ne démarre jamais vraiment et, encore une fois, je me retrouve au lit à 23 h, les yeux grands ouverts bien que j'ai fait de mon mieux pour épuiser mon corps toute la journée durant.

À minuit, je reproduis le même schéma que la nuit précédente et me glisse jusqu'au salon où je rallume le feu mourant. En rentrant de notre escapade enneigée, j'ai mis la clef de la chambre du bas côté couloir et ai verrouillé la porte. En passant devant, je m'assure qu'elle l'est toujours bel et bien.

Je ne suis pas un froussard, mais j'aimerais éviter de me faire des frayeurs pour rien.

Un mug de vin chaud dans les mains, de la musique pas trop forte, histoire de ne pas réveiller la maisonnée, sortant de mon téléphone, je reste à regarder le feu danser pendant plus de vingt minutes. Alors que je repose mon troisième verre, sentant enfin le sommeil me gagner, un bruit de chute me sort de mes rêveries.

Il provient du couloir, de la chambre, me souffle mon cerveau reptilien en panique. C'est absurde, j'ai vérifié deux fois et il n'y a personne dans cette foutue pièce. Je le sais. Alors pourquoi est-ce que je me suis redressé si vite ? Pourquoi suis-je si stressé ?

Prenant sur moi, je me lève et marche jusqu'à la chambre. Elle est toujours fermée à clef et il n'y a donc rien à l'intérieur, je le sais, il n'y a r... Il y a eu un nouveau bruit, un TOC suivit d'un glissement, comme le son que produirait une caisse en carton traînée sur le sol. Je deviens fou, ce n'est juste pas possible.

J'approche une main tremblante de la clef, la tourne dans la serrure et ouvre la porte à la volée. Cette fois, je trouve l'interrupteur tout de suite et mes yeux ont eu le temps de s'habituer à la lumière que j'ai pris soin d'allumer dans le couloir, si bien que je ne suis pas ébloui.

La pièce est comme je l'ai laissée, rangée, vide, calme. Rien qui puisse inquiéter ou sembler suspect. Mon instinct, pourtant, me dit de dégager fissa, que quelque chose cloche, même si je ne vois pas quoi. En règle générale, je l'écoute, cet instinct. Quand tu dévales les pistes en ski, les routes en rollers ou le ciel en wingsuit, et que quelque chose en toi t'avertit d'un danger, te pousse à t'arrêter ou à changer de direction, tu obéis. Parce que ta vie est en jeu et que cet « instinct », c'est juste ton cerveau qui comprend certaines choses et qui active le signal d'alarme avant de t'expliquer de quoi il s'agit parce qu'il y a urgence. Mais là, il ne peut pas y avoir de danger, je suis juste en train de psychoter, alors je le fais taire et m'avance dans la pièce sur-éclairée avant de contourner le lit.

Par terre, entre ce dernier et la grosse armoire en bois, il y a une caisse en carton. Elle n'était pas là, hier. Elle n'était pas là non plus ce soir, quand j'ai fermé la porte à clef. Quelqu'un se paie ma tronche, il n'y a pas d'autre explication. Sans même vérifier ce qu'elle contient, je reviens sur mes pas, mi-furieux, mi-inquiet, quand, d'un coup, la porte pivote sur ses gonds et claque juste devant moi.

— Très drôle, je grince en tentant de l'ouvrir. C'est bon, vous pouvez me laisser sortir, on s'est bien amusé, haha, très bonne blague.

Ça ne transparaît pas dans ma voix, du moins je l'espère, mais le fait que je ne parvienne pas à ouvrir la porte alors que je tire de toutes mes forces sur la clinche, commence à me filer des sueurs froides. Je n'ai même pas entendu la clef tourner.

— Quentin ? je demande. Ça ne m'amuse plus, ouvre la porte. Nicolas ? C'est vraiment comme ça que tu espères briser la glace ?

Je sais que Noah ne ferait pas une chose comme ça, ce n'est pas son genre, mais les deux autres débiles ? Je le savais qu'on aurait dû se trouver un hôtel en attendant mes parents.

— Vous avez dix ans ou quoi ? Laissez-moi sortir !

C'est pas que je panique, pas du tout, mais l'ambiance dans la chambre est devenue plus pesante et je ne m'y sens pas en sécurité. Je veux sortir d'ici. Merde, s'ils ouvrent la porte, je les tabasse.

Je vais crier plus fort, quitte à réveiller Noah, mais un bruit me fait me retourner, le cœur battant. Le même chuintement que tout à l'heure. Le bruit d'un carton que l'on fait glisser sur le sol. Je m'écarte de la porte et jette un œil de l'autre côté du lit. Le carton, la boite stupide qui ne devrait pas se trouver là, elle s'est déplacée.

J'aurais juré qu'elle se trouvait à la tête du lit quand je l'ai aperçue pour la première fois, or, là, elle est au niveau des pieds. Elle s'est rapprochée du moi.
Non, j'ai dû mal voir la première fois, c'est impossible. À moins qu'il n'y ait quelqu'un de caché sous le lit.

Mon rythme cardiaque s'emballe, je n'ai pas vérifié sous le lit en entrant, cette fois-ci. Mais je n'avais aucune raison de le faire, la pièce était fermée à clef de l'extérieur. Bon, allez, courage, s'il y a bien quelqu'un de caché en dessous, ça ne peut être que mon frère ou son mari, plus vite je le ferai sortir de sa cachette, plus vite je pourrai quitter cet endroit.

Fébrile, je m'agenouille à bonne distance du lit, et je me penche pour découvrir que l'espace entre le matelas et le sol est aussi vide que la veille. Sans que je puisse le contrôler, un soupir de soulagement s'échappe de mes poumons et je relève la tête avant d'étouffer un cri.

Sur le lit. La boite est sur le lit.

**

Hey les gens !

Bientôt la fin, ainsi que la révélation du thème de cette nouvelle.
J'espère que vous aimez toujours.

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