De nouveaux rendez-vous

384 52 16
                                    

Putain de devoir de philo… J’ai à peine commencé à lire le texte sur lequel il faut travailler que j’en ai assez et délaisse mes feuilles et mes stylos au profit de ce fichier informatique textuel.


Il y a quelques jours, j’ai eu mes rendez-vous à l’hôpital des enfants. Les fameux rendez-vous que j’ai tous les six mois dans la « section transgenre », comme je l’appelle.
Sauf que cette fois, au lieu d’avoir simplement un rendez-vous avec la pédopsy et un autre avec l’endocrinologue, j’avais aussi un examen complémentaire et, surtout, un questionnaire. Un questionnaire que le clinicien que j’ai rencontré faisait passer à des jeunes ados transgenres pour faire des statistiques sur notre psychologie et notre psychie. Ce, dans le cadre d’une étude pour sa thèse.
Quelques jours avant, il avait communiqué des documents à mes parents et moi pour que l’on décide si je souhaitais participer à cette étude ou pas. J’ai accepté car, si je peux aider, il n’y a aucun problème.

Il m’a d’abord fait passer un premier questionnaire afin de cibler quels thèmes approfondir, puis des compléments déterminés par mes réponses au premier questionnaire. J’ai eu droit à celui sur les troubles alimentaires, les troubles dépressifs, les traumatismes, les phobies, les troubles anxieux, et les TOC et les tics.
En réfléchissant sur moi grâce aux questions posées par le clinicien, et en écoutant son avis, nous avons pu tous deux déterminer que je n’ai pas de trouble alimentaire, ni de trouble dépressif.
A l’inverse, j’ai peut être un traumatisme qui est bloqué dans l’inconscient mais ça on ne peut pas le savoir (perso je ne pense pas mais bon, on ne sait jamais tant que le traumatisme ne s’est pas révélé), et j’ai peut être une phobie ou deux mais je pense que c’est pas à un stade si élevé que ça ou en tout cas ça ne l’est plus. Ça va mieux, disons.
Aussi, le clinicien a affirmé que je souffre d’un Trouble Anxieux Généralisé (TAG) - ça ne m’étonne pas du tout - et de quelques tics (mais pas de TOC).
J’avais conscience d’en avoir mais je ne pensais pas qu’ils rentraient dans la définition du tic.

Je vais tout de même commencer par définir ce qu’est un tic, car j’ai l’impression qu’on se trompe souvent sur la définition exacte.
Alors déjà, c’est pas parce qu’on a quelques tics qu’on a le syndrome Gilles de la Tourette, hein. Il y a pleins de personnes qui ont des tics pas forcément violents et pas aussi gravement que dans ce syndrome.


Il existe deux grandes catégories de tics.

1) Le tic moteur, qui est un geste ou mouvement du corps (pas forcément du visage) abrupt, rapide, stéréotypé, non rythmique et répétitif. Par exemple : cligner des yeux, bouger le nez, hausser les épaules, déplier la jambe, et ce, de façon soudaine et répétitive comme dit juste avant.

2) Le tic vocal, qui est un mot (pas forcément un gros mot, faut arrêter avec ça) ou un son produit de façon soudaine. Par exemple : se racler la gorge, émettre un son aigu.

Mais, attention, un tic n’est pas forcément involontaire, contrairement à ce que l’on dit souvent !
De là, je traite les tics involontaires et volontaires en trois catégories.
C’est seulement MA catégorisation selon mes connaissances et mon expérience des tics, et non le résultat d’une démarche scientifique.

1) Les tics faits involontairement et inconsciemment sans prise de conscience → je fais le tic mais je n’en prends pas conscience car je suis concentré sur autre chose que sur mon corps.

2) Les tics faits involontairement et inconsciemment avec prise de conscience après coup → je fais le tic sans le réfléchir, puis je prends conscience que j’ai fait le tic après coup grâce à une écoute suffisante de mon corps sur le moment.

3) Les tics faits volontairement et consciemment (cela suppose que je sais que j’ai des tics ou en tout cas que je fais souvent un mouvement de façon répétitive) → je vais d’abord sentir une gêne (sensation de démangeaison, sensation de brûlure, cela dépend de chacun) au niveau de l’endroit où se produit le tic, puis, soit je vais retenir le tic et la gêne va grandir et devenir insupportable, soit je vais faire le tic et ressentir un soulagement qui va durer quelques secondes, puis la gêne va revenir. C’est donc une boucle sans fin.

Les tics s’arrêtent lorsqu’on dort ET lorsqu’on est très investi dans une activité qui nécessite une forte attention et concentration.
Les tics vont s’amplifier quand on va se recentrer sur soi, sur son corps et sur ses sensations, et encore plus si on pense à ses tics, ou si on en parle (en effet, en écrivant ses lignes, mes tics sont plus présents que lorsque je faisais mon devoir juste avant, puisque je suis en train de parler de tics).
C’est pour cette raison, qu’il est insensé de demander à une personne qui a des tics d’arrêter de les faire : la personne va se recentrer sur elle-même, et plus précisément sur ses tics, ce qui va amplifier le besoin de les faire. De plus, si elle essaie de les retenir, la gêne va grandir, ce qui va être encore pire pour elle, mais aussi pour la personne qui lui demande d’arrêter, puisque sa demande aura l’effet inverse de ce qu’elle souhaite.
Aussi, quand une personne qui a des tics s’ennuie, il y a des chances pour que ses tics s’amplifient car l’ennui recentre l’individu sur soi-même. Par exemple, en regardant la télévision ou en assistant à un cours.

Voilà pour la définition des tics.
Pour ceux qui seraient intéressé par en savoir plus sur les tics, voici une vidéo qui en parle bien : https://www.youtube.com/watch?v=34K5pUo04Gs


Pour parler de ma gueule, j’ai personnellement des tics qui passent plutôt bien en société puisqu’ils sont tout de même assez discrets. J’ai déjà eu des remarques mais tout de même assez rarement.
Les moments où je me surprends le plus à les faire sont en parlant des tics, et pendant les cours qui ne m’intéressent pas.
Et, maintenant que j’ai conscience de ce que sont ces mouvements, et de ce à quoi ils sont dus, je vais pouvoir mieux comprendre mon corps et, si quelqu’un me pose problème à ce propos, je vais pouvoir lui expliquer, en espérant qu’il comprenne.

Selon le clinicien qui m’a fait passer les questionnaires, la présence de mes tics (qui sont apparus, d’après mes souvenirs, depuis 3 ans environ pour l’un, 2 an environ pour l’autre et quelques mois seulement pour le dernier) serait dû à mon Trouble Anxieux Généralisé. Makes sense, comme on dit.



Pour ce qui est des rendez-vous avec l’endocrino, j’ai obtenu une nouvelle augmentation de dose : on passe à 0,5mL, toujours toutes les 3 semaines.
Pour celui avec la pédopsy, j’ai pu avancer sur la recherche de chirurgien pour la mastectomie (j’ai la fleeeeemme d’ailleurs). Grâce à elle, j’ai maintenant le nom d’un chirurgien proche de chez moi et dans le public : je vais prendre rendez-vous avec elle pour me renseigner sur les différentes méthodes, et celles applicables sur mon torse.
Aussi, avec la pédopsy, j’ai parlé de mes angoisses vis à vis du fait que mes amis  apprendraient que je suis trans. J’ai peur qu’ils réagissent mal. Pas forcément par transphobie, car mes amis ont l’air de n’avoir aucun problème avec cela. Mais j’ai peur qu’ils pensent que je les ai trahis. Que je leur ai caché quelque chose de fondamental à mon propos mais qu’ils estiment que j’aurais dû le leur dire. J’ai peur qu’ils n’aient plus confiance en moi. Et j’ai peur qu’ils ne voient plus que ça en moi. Je n’ai pas envie que le fait d’être transgenre soit leur première représentation de moi et de qui je suis. Je ne veux pas que mon histoire vis à vis de mon identité de genre change nos relations. Je ne veux pas de compassion, ni être pris de haut. Et pour cela, je garde ce morceau de mon identité pour moi.
Chaque personne transgenre fait le choix d’exhiber son histoire ou pas. J’ai fait le choix de ne pas le faire, et peut être que ça changera un jour.


Je laisse les phrases suivantes pour les personnes trans qui, comme moi, ont peur de tout cela. Elles résument ce que m’a répondu la pédopsy après avoir écouté mes craintes...
Notre histoire vis à vis du genre permet de réduire notre liste d’amis afin de ne garder que les vrais qui nous aiment pour qui on est vraiment.
Vous avez le droit de le cacher, c’est légitime, mais, n’ayez pas peur qu’ils l’apprennent. C’est toujours bien de remettre les compteurs à zéro en triant notre liste d’amis. S’ils sont vraiment vos amis, ils comprendront pourquoi vous avez voulu le leur cacher. En effet, cela vous appartient.
C’est comme avoir le diabète. Un diabétique n’aura pas forcément envie de dévoiler à ses amis sa maladie : ce n’est pas nécessaire pour continuer leurs amitiés.
De même, il n’est pas nécessaire que vous révéliez votre transidentité à vos amis pour construire et conserver une relation amicale avec eux, et s’ils ne le comprennent pas, perhaps ils ne méritent pas d’avoir cette relation avec vous.
En revanche, si vous vous sentez mal de ne pas le dire à certains amis, faites-le.

Je suis transgenreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant