I - colosse-café

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il était tic tac et je suis monté dans un train.
je ne savais pas où il allait.
j'ai regardé à l'intérieur, il n'y avait pas grand monde. j'ai vu un petit papi bossu avec un vieux chapeau et une canne, tassé sur un siège. je lui ai dit bonjour mais il ne m'a répondu. j'ai un peu déambulé dans le wagon et j'ai vu un grand colosse à la peau bronzée et au crâne rasé. il avait un petit sourire, je l'ai trouvé sympathique et je me suis assis à côté de lui en lui disant bonjour. il m'a répondu : "bonjour", et puis nous n'avons pas reparlé.

le train a démarré et au bout d'un moment, j'ai soudainement eu une forte envie d'aller aux toilettes. je n'ai rien dit et j'ai tourné la tête vers la vitre du wagon en me disant que tout allait bien se passer. le train s'est arrêté plusieurs fois pour faire monter des passagers mais je n'ai vu personne descendre.
le colosse ne disait rien, il avait toujours son sourire bienveillant.
j'ai pensé qu'il ne me jugerait pas si je me levais pour aller aux toilettes mais j'ai préféré attendre. il ne bougeait pas et ne parlait pas, on entendait seulement sa respiration calme et profonde qui me faisait penser aux cheminées ou à papi endormi.

il a tourné sa tête vers moi au bout d'un moment et m'a dit : "je vais chercher du café, vous en voulez un ?" en se levant. je me suis fait la réflexion qu'il était très poli mais que je n'allais pas pouvoir tenir avec un café en plus dans la vessie. j'ai répondu : "non". comme j'ai eu peur qu'il m'en veuille, j'ai rajouté : "merci". il m'a dit « d'accord » et est parti. j'ai remarqué qu'il boitait un peu.
j'ai couru jusqu'aux WC. j'ai essayé de me vider mais j'ai eu si mal que je me suis tordu de douleur dans le petit cabinet du train. je suis resté durant vingt-huit minutes et j'ai souffert en essayant d'uriner pendant vingt-huit minutes.
j'ai entendu plusieurs voix devant la porte, ça m'a stressé et je me suis imaginé dévisager ces personnes en sortant. j'ai remonté ma braguette et je suis sorti mais il n'y avait qu'un petit garçon chauve alors je n'ai pas osé le contrarier et je suis parti me rasseoir.

le colosse était revenu, il avait un gobelet en carton dans la main gauche, dessus on pouvait lire : "le plastique est surcoté !" avec un petit bonhomme rouge que j'ai trouvé rigolo sur le côté.
il m'a regardé m'asseoir et m'a dit : "je vous en ai quand même pris un". il m'a tendu son gobelet, j'ai dit « merci » et j'ai bu le café même si je n'aime pas ça.

je n'ai pas parlé pendant longtemps et je crois que je me suis endormi.

juste, pour un trainOù les histoires vivent. Découvrez maintenant