Reality - Tome 1 - De l'autre côté du miroir (Terminé)

04 - He's back... - Part. 1

Nous étions mi-janvier. Trois semaines s'étaient écoulées depuis la réception de la lettre et la signature définitive de la mauvaise foi de Drew. 20 jours calendaires mais 20 ans selon moi tant le temps me paraissait insupportablement long dans ma routine retrouvée. Enfin... pas tout à fait. Ma vie aurait pu en effet reprendre son cours normal, mais c'était sans compter ma lutte acharnée pour que Drew honore son pari. Imaginez la mauvaise foi incarnée s'excuser en public et surtout renoncer à sa raison de vivre ! Autant dire que je n'étais pas arrivée au bout de mes peines ! Nell et moi nous amusions beaucoup de la situation. La voir, tour à tour, enrager, supplier, bouder, nous faisait tellement rire !

 Après moult négociations sur les clauses du pari, nous avions finalement convenu qu'elle serait privée de son hobby préféré pendant un mois. Devant son désespoir flagrant, nous n'avions pas eu le cœur de prolonger la sentence à plus, même si, secrètement, j'aurais aimé que ce soit définitif. Mais Nell avait calmé mes ardeurs en me demandant comment moi je réagirais si on voulait m'interdire la musique... vu comme ça, évidemment...

Pour être certaines que Drew ne craque pas, nous avions fait mettre un contrôle parental sur son ordinateur, sa tablette et son smartphone. Elle ne pouvait donc plus aller ni sur les sites « people » ni sur les réseaux sociaux. Nous avions fait également désactiver toutes ses alertes mails, ce qui avait été un vrai crève-cœur pour elle. Vu notre niveau en informatique, pour y arriver, nous avions dû faire appel à Noah qui nous trouva, parmi ses potes de fac, une bonne âme de geek pour nous aider. Drew, nous fit encore une fois du Drew en gémissant, mendiant, marchandant, menaçant, tandis que notre crac paramétrait tous ses outils de connexion sans même sourciller.

En fait, pour me montrer tout à fait honnête, je devais reconnaître que si je mettais autant de ferveur dans ce petit supplice, c'était parce je m'apercevais, à mon corps défendant, que j'avais espéré bien plus de cette histoire de lettre. En gros, nous savourions ces instants jubilatoires pour nous faire un peu oublier cet arrière-goût amer ressenti à cause de la réponse reçue.

Si au début j'avais eu du mal à en convenir et même à l'assumer, j'avais, avec le temps, bien dû m'y résoudre. J'étais déçue malgré moi. Et en y réfléchissant bien, la raison en était très simple et même logique. Pour la plupart des filles de mon âge qui vivaient dans des grandes villes et qui avaient à portée de main tout un tas de distraction aussi diverses que variées, écrire une lettre à une star relevait certainement du ridicule voir de l'immaturité, car elles auraient fait une telle chose au début de l'adolescence. Aujourd'hui, elles avaient sans doute mieux à faire. Mais moi, dans mon quotidien morne et sans intérêt, ça me sortait un peu de ma routine. On n'avait pas tous la possibilité de pouvoir sortir dans des lieux tendances et de rencontrer tout un tas de gens intéressants. Alors oui, c'était sans doute ridicule, mais ça avait éclairé ma vie pendant quelques temps et le fol espoir que Tyler Edwards puisse prendre de son précieux temps pour me répondre avait rendu un peu plus palpitant le temps qui filait bien trop doucement à mon goût dans mon bled paumé.

J'en étais donc là et depuis, je traînais ma pauvre carcasse sans but, en tentant de survivre à ma vie et en essayant de me convaincre que, de toute façon, toute autre réponse n'aurait pas plus changé mon quotidien.

Qu'est-ce que j'imaginais ? Que Tyler allait débarquer un beau matin chez moi pour discuter des points que j'avais soulevés dans ma lettre ?Bien sûr que non ! Alors pourquoi déprimer ainsi ?

Pour conclure et en rajouter dans mon marasme, les vacances étaient finies, les parents revenus de leur voyage, moi de chez les Jones et Milly était plus chiante et peste que jamais. Bien que sa présence m'indifférait complètement, elle faisait tout pour se rappeler à mon bon souvenir. L'autre jour, par exemple, elle avait « accidentellement » - selon les points de vue des parties - ruiné le pull blanc en cachemire que Nell et son frère m'avaient offert pour Noël en le lavant avec son nouveau jean noir. Du coup, mon pull n'avait plus la couleur immaculée de la neige fraîchement tombée mais plutôt celle de la neige maintes fois piétinée et rendue gadoue.