Partie 6 - Nous nous sommes trouvés

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Au signal de la musique, ils commencèrent à tourner en cercle, Anne essayait de se concentrer sur son amie Diana, dieu merci elle était là pour la soutenir, que ferait-elle sans elle ?

« Tournez à gauche. Tournez à droite, c'est pas encore fini.», le maître de danse commença.

Gilbert essayait de regarder discrètement à sa gauche, il avait l'impression que la jeune rousse évitait son regard encore. Il commença à éprouver des remords, peut-être avait-il choisi la pire danse. Se retrouver entre deux jeunes femmes n'était pas réellement une situation rêvée pour lui.

« Tournez avec l'une des partenaires. »

Pendant que Gilbert et Winifred se faisaient face, Anne fixait Diana, elle cherchait encore et toujours du soutien envers son amie.

« On danse à trois. »

Les danseurs s'apprêtaient à se tourner autour, Anne se préparait mentalement à devoir croiser le regard du jeune brun.

« Un, deux, épaule gauche, épaule gauche. »

Quand le jeune homme effleura son épaule, elle essayait tant bien que mal de ne pas le regarder dans les yeux, mais elle sentait son regard la transpercer.

« Et les lignes se reforment. »

Gilbert était toujours confus, pourquoi la rouquine évitait-elle son regard ? Pourquoi détournait-elle toujours les yeux ?

« Tout le monde au milieu. »

À nouveau, main dans la main en faisant des pas vers le centre, Anne avait encore cette impression que Gilbert lui caressait le poignet avec son pouce, elle était définitivement perdue, et voilà maintenant qu'elle avait des sortes d'hallucinations.

« On recule. »

Mais au moment où ils s'éloignaient du centre à nouveau, par inadvertance elle croisa les beaux yeux noisettes de l'adolescent. Pourquoi regardait-il toujours vers elle ? Ses hallucinations devenaient de plus en plus réelles.

« Passez sous les bras levés et formez un autre ensemble. »

Tout en continuant de suivre les instructions, c'est-à-dire marcher vers l'avant pour former une ligne en face, Anne n'arrivait plus à décrocher ses yeux de Gilbert. Elle ne voulait plus lutter, à quoi bon se disait-elle ? Autant qu'elle profite de l'un de ses derniers moments privilégiés avec le jeune homme. Qui sait quand elle pourrait à nouveau sentir la main de ce dernier ? Qui sait quand elle pourrait à nouveau échanger des regards avec lui ?

« Au centre, puis on tourne à gauche. »

L'adolescente avait l'impression de perdre la tête, pas de devenir folle non, mais de perdre la tête comme lorsqu'on est sur un carrousel et qu'il nous fait perdre la tête.

« Un, deux, trois, quatre, cinq et six et voilà. »

Voilà ce qu'était Gilbert, un carrousel. Et elle ne voudrait certainement jamais descendre de ce manège. Il lui faisait tourner la tête et il le fit littéralement lorsqu'il la reprit par la main et la tira vers lui.

« Marchez avec votre partenaire. Et faites-la tourner »

En la faisant tourner, Gilbert avait oublié que Winifred était encore à côté et qu'elle était elle aussi sa partenaire de danse, il ne pouvait qu'entendre le rire d'Anne, au dessus du brouhaha ou bien de la musique elle-même, c'était le son mélodieux de la jeune rousse qui avait toute son attention. Il avait l'impression d'être seul avec elle à cet instant précis. Ils se souriaient l'un à l'autre, et se regardaient avec une telle fascination, que personne ne semblait exister autour.

« On se fait face. »

Ils se firent face et comme dans un moment d'illumination, leurs esprits se croisèrent, ils savaient en se regardant, ils savaient qu'ils devaient faire quelque chose et peu importe si ça ruinerait tout.

Ils se prirent par la main à nouveau, mais pas pour la danse, pour sortir de la ligne qu'ils avaient formée avec Winifred.

Sous les yeux ébahis de Diana, Winifred, Jerry et Charlie, les deux amis sortaient simplement de la grange en courant la main dans la main. Et ainsi ils appelèrent deux nouveaux danseurs à la rescousse pour les remplacer. Diana n'arrivait pas à y croire, ils sont juste partis comme ça ? Elle ne pouvait cacher un sourire.

Dehors, les deux adolescents continuaient de courir sans même avoir réfléchi où ils voulaient aller et pourquoi ils avaient fait ça. Mais ils couraient, cherchant à s'éloigner de l'agitation, de la fête, ils avaient réellement besoin de se sentir seuls.

Anne repensa soudainement à tous les souvenirs qu'elle avait accumulés avec Gilbert, et c'est comme s'ils refaisaient surface, comme s'ils étaient à nouveau réels, comme si elle n'avait pas rêvé.

« Gilbert ?! On va courir comme ça jusqu'où ?! », demanda la jeune rousse en riant.

« Je pense que tu le sais ! », s'exclama Gilbert d'un air enjoué.

Par chance, cette nuit-là était très claire, la pleine lune brillait au-dessus de leur tête et leur permettait d'y voir clair. Ils continuaient leur course jusqu'à un bosquet qui n'était pas très loin de la grange.

Ils s'arrêtèrent net ici, on entendait que leur souffle, et à fur à mesure que leur respiration se calmait, peu à peu ils se rendaient compte de toute la portée de leur geste. Qu'allaient-ils faire maintenant ?

La lune éclairait assez pour qu'ils aperçoivent les contours de leur visage mais surtout leurs yeux brillants. Ils marchaient sur des parterres de muguets, des pas se faisaient entendre, écrasant quelques fleurs sur leur passage, ils se rapprochaient l'un de l'autre.

Ils distinguaient à peine le regard de l'autre mais ils pouvaient ressentir que chacun transperçait l'autre avec ses yeux. Alors tout doucement, ils se retrouvèrent si proches que leurs orteils se touchèrent, ils se stoppèrent, leur souffle si palpable, ils pouvaient tout ressentir l'un de l'autre.

Lentement, ils fermèrent leurs paupières, à mesure que leur visage se rapprochait. Durant de longues secondes leur nez se frôla, ils ressentaient l'autre, ils voulaient juste savourer cet instant. Ce moment avant de franchir la ligne, ce moment où il n'était déjà plus possible de revenir en arrière. C'était ensuite au tour de leur lèvres de se frôler, longuement. Encore ils prirent leur temps, car l'instant semblait suspendu. Leur souffle était pourtant toujours aussi rapide, mais ce n'était plus à cause de la course, c'était le désir l'un pour l'autre si longtemps ignoré qui avait cet effet sur eux. Ils savaient que s'ils commençaient à s'embrasser maintenant qu'ils allaient avoir du mal à s'arrêter.

Mais cela n'avait pas vraiment d'importance, puisque personne ici ne les arrêterait. La mâchoire de Gilbert se contracta au moment où il prit le visage d'Anne en coupe, en un battement cil il avait déposé ses lèvres sur les siennes. La lenteur faisait place maintenant à la fougue, le jeune homme avait un tel désir ardent qui le brûlait qu'il dévora presque les lèvres de la jeune rousse.

Pour Anne, ce baiser était comme une pluie de muguets, toutes ses peines étaient effacées en un instant, qui aurait pu croire que les baisers de Gilbert Blythe avaient un tel effet ?

Des longues minutes étaient passées après leur premier baiser échangé, et soudain ils entendirent des gens les appeler au loin, mais ils ne tenaient vraiment pas à être dérangés maintenant. Peu importe les conséquences, c'était leur moment.

Alors l'adolescente attira le jeune garçon vers elle, et l'invita à s'allonger dans le parterre de muguets avec elle. Personne ne pourrait les voir ainsi, c'était l'endroit parfait pour continuer à s'embrasser, entouré de clochettes blanches porteuses de chance.

FIN.


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Note: Désolée pour cette longue attente pour finalement un chapitre si court! J'espère que vous êtes assez satisfait de cette fin, en réalité cela faisait des mois que ce chapitre était écrit, mais je n'arrivais pas à me résoudre de le poster. Voilà qui est fait! Malgré le temps qu'il m'a fallu, je suis plutôt contente de cette fic, merci de m'avoir lu!

Effeuiller la MargueriteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant