Cette nuit-là, je ne dormis presque pas et quand mon réveil sonna, j'étais déjà prêt à partir au travail. Durant mes somnolences entrecoupées d'angoisse, le bleu s'était étendu sur les articulations entre mes doigts et ma main. Je souffrais et les antidouleurs ne firent pas autant d'effet qu'espéré. Je partis donc à l'épicerie avec un bandage et la boîte de médicaments dans la poche.
Comme tous les matins, j'ouvris la grille de la vitrine, allumai le magasin et fis mon fond de caisse avant de passer un coup de balais difficile que je fus incapable de terminer, tant tenir le manche me faisait souffrir.
Ensuite, en attendant les premiers clients et ma collègue, je fis quelques recherches sur mon portable, assis derrière mon comptoir. Bientôt, mon historique internet fut rempli de « voir fantôme de gars pas mort », « hallucination sexuelle », « maladie mentale sexuelles » et autres joyeusetés de genre. Malheureusement, je ne trouvai pas de réponse satisfaisante à mon problème. Peut-être qu'au final, j'étais seulement un gros obsédé en manque... Cette situation allait me rendre dingue.
Célia fut la première à arriver. Elle me salua rapidement avant de passer au vestiaire pour revêtir son uniforme de travail. Elle n'était ici qu'à mi-temps et ses horaires changeaient régulièrement. Quand elle revint, je lui demandai de finir le coup de balais que j'avais abandonné au milieu d'une allée. Elle s'y attela sans attendre et finit le tout assez rapidement avant de revenir vers moi.
— Tu m'aides à ranger un peu le stock ? me demanda-t-elle avec des yeux de chien battu.
— Désolé, je passe mon tour, dis-je en levant ma main blessée.
Elle s'approcha et contempla mon bandage.
— Comment tu t'es fait ça ?
Je haussai les épaules.
— J'ai un peu trop bu hier soir...
— Tu t'es battu ? se renseigna-t-elle en plaquant ses mains sur sa bouche, choquée.
— Quoi ? Non ! Enfin... Non ! Je suis simplement tombé ! bredouillai-je.
— Ah ! Tu m'as fait peur ! souffla-t-elle, visiblement soulagée. Franchement, je te vois mal te battre, t'es trop gentil pour ça !
Elle rit en partant vers le stock et je l'imitai d'un rire complètement factice. Lorsque les premiers clients entrèrent, je m'activai à les servir du mieux possible. Avec ma main, j'avais du mal, mais je fis de mon mieux pour rester agréable malgré la douleur. Heureusement, vers huit heures, mon gars sexy passa s'acheter un café. Je le vis entrer et le suivis du regard le plus longtemps possible entre chaque client. Il tourna un long moment entre les rayons et je l'épiai par à-coups, évitant que nos regards se croisent.
Quand il vint vers moi, je fis comme si je ne l'observais pas depuis son arrivée. Il fit la queue, puis, quand ce fut son tour, il déposa son article sur ma caisse avant de fixer ma main un long moment sans rien dire. Gêné, je la fis passer sous le plan de travail. Je ne voulais surtout pas qu'il me pose des questions sur ma blessure. Bien qu'en y réfléchissant, je le voyais mal me questionner. J'étais un inconnu après tout. Il devait sûrement s'en foutre complètement...
— Bonjour, lançai-je d'un ton enjoué. C'est tout ce qu'il vous faut ?
Il ne répondit pas, le regard braqué sur mon avant-bras. Je patientai un peu, me sentant de plus en plus mal à l'aise. Heureusement, le magasin était vide, mais le voir rester là, sans parler ni bouger me fit me sentir piteux. Ce pauvre gars. Plus je le regardais, plus je le trouvais sexy et plus je me sentais mal.
Après d'interminables secondes teintées d'un silence gênant, je me décidais à parler.
— Monsieur ? tentai-je de l'interpeler avec un sourire.
Il releva brusquement la tête vers moi. Il avait un air troublé, ce qui me mit mal à l'aise et fit disparaître mon prétendu air joyeux.
— Qu'est-ce que tu t'es fait à la main ? me demanda-t-il d'un ton sérieux.
Immédiatement, je sentis le rouge me monter aux joues et mon cerveau implosa. Vite, je devais inventer un mensonge plutôt que de sortir une vérité dérangeante et qui m'aurait fait passer pour un fou. Parce que la réponse : « Alors en fait, j'ai voulu te mettre une grosse droite parce que j'ai halluciné sur le fait que tu étais dans ma chambre cette nuit. Ah, et puis, ça fait un mois que je rêve que tu me baises et j'aimerais bien tester en réel ! Alors ? Comblé ? » n'était pas une option. Je pinçai les lèvres, tentant de faire s'arrêter mon cerveau bien trop enthousiaste au vu de la situation catastrophique qui se déroulait devant moi.
— Oh, pas grand-chose, minimisai-je en souriant. Je me suis juste mal réceptionné en tombant dans le stock. Ça m'arrive souvent.
Il me fixa droit dans les yeux un long moment. Si long que je dus détourner le regard.
— Ça vous fera un total de deux euros et quarante-cinq centimes. Je vous mets un sac ? demandai-je pour changer le sujet.
— Non.
Sa mine fermée et contrariée me fit un pincement au cœur. Qu'est-ce qui lui arrivait ? Lui qui était d'habitude si gentil ! Rapidement, il prit son article, me déposa trois euros sur la table en me disant de garder la monnaie, puis il fuit. Réellement, il se mit à courir pour sortir et je le vis accélérer une fois à l'extérieur. De mon côté j'étais désemparé. J'avais fait une bourde là, non ? Pourquoi est-ce qu'il avait fui comme ça ? Avec ce ton froid et cet empressement ?
Toute la journée, je me repassai en boucle son passage au magasin. Je finis par me dire que ma blessure l'avait énervé. Je ne voyais que cette explication, qui n'avait pourtant aucun sens. Madame Chang vint me donner un coup de main pour fermer la boutique. Compte tenu de ma blessure elle refusait de me laisser tout faire seul, alors nous nous partageâmes les tâches. Environ une demi-heure plus tard, j'étais dehors, prêt à rentrer chez moi.
Sur le trajet je repensai encore une fois à mon beau gosse et à notre échange d'aujourd'hui. Chose qui ne m'avait pas sauté aux yeux alors ; il m'avait tutoyé ! Quand il m'avait questionné sur ma blessure, il avait dit « tu », pas « vous ». C'était peut-être stupide, mais ça me donnait de l'espoir.
En passant la porte de mon entrée, je me sentis soudain très seul. Mine de rien, ces problèmes d'hallucinations me faisaient peur. Si j'en venais à me blesser à cause de ce genre de choses, c'était que ça devenait dangereux, non ? Durant mon repas du soir, je me demandai si je devais aller voir un médecin, ou peut-être un psychologue ? Je ne savais pas ce qui pourrait m'être le plus bénéfique.
Afin de me changer les idées, j'allai prendre une longue douche brûlante. L'eau piqua ma peau et je me délectai de cette sensation. En sortant, j'enfilai un short et un t-shirt léger, laissant une petite serviette sur mes cheveux pour les sécher. Soudain, mon portable vibra, j'ouvris le message de Matt.
« Alors, ces dysfonctionnements ? »
Je râlai à moitié avant de lui répondre.
« Strange. Il se passe plein de choses que je comprends pas. »
Je ne fus pas plus précis. Si j'avais vraiment des problèmes mentaux, je ne pouvais pas me permettre qu'il me pense fou. Nous discutâmes un long moment par sms et je finis par me coucher assez tôt. Comme depuis un mois, j'étais épuisé et je ne mis pas longtemps à m'endormir profondément.
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My violent love story with a sexy ghost [MxM] [terminé]
RomanceAndy le sait, ce qu'il aime, c'est le sexe brutal. Pourtant, lorsque son cerveau décide de le trahir en imaginant chaque nuit qu'il couche avec un des clients de l'épicerie où il travaille, il se dit qu'il doit forcément avoir un problème. Et si, fi...