Chapitre 5 : Un livre ouvert

152 15 1
                                    

D'un pas mal assuré, sa vision troublée par le sang qui coulait de son arcade sourcilière, la rouquine arriva avec peine dans l'impasse. La voiture garée devant sa maison attestait de la présence de son père. Impossible pour elle de risquer de le croiser dans cet état. Les dents serrées, elle se laissa tomber contre un des murets, proche de la maison de Law. De la lumière émanait encore du salon. Persuadée qu'il s'agissait juste d'un oubli, Hiyori tenta tout de même sa chance. Elle lança quelques graviers à distance, sur la porte, consciente du peu de bruit que l'action émettait. De l'autre côté du mur, le chirurgien terminait le dernier chapitre d'un livre, traitant de plusieurs maladies cardiaques incurables, lorsque les sons atteignirent ses oreilles. Retirant ses lunettes, il se dirigea vers la fenêtre, jetant un coup d'œil dehors. Son regard balaya l'entrée, puis atterrit sur une masse noire, affalée par terre.

" Qu'est-ce qu'elle fout encore... " Soupira-t-il en déverrouillant sa porte.

Sous le regard rassurée d'Hiyori, Law s'avança vers elle. Imaginant d'abord qu'elle puisse être saoule, l'interne accouru finalement, voyant le sang dégouliner sur son visage. Avant même de lui demander des explications, il retourna chez lui chercher sa trousse de secours. De ses mains habiles, il posa quelques sutures adhésives sur l'arcade de la jeune fille, non sans l'avoir nettoyée auparavant. La plaie, peu profonde, ne coulait plus. Hiyori ne faisait pas la fière, laissant son voisin nettoyer son visage et s'occuper de ses mains, dont les phalanges, déjà mises à mal par son entraînement, saignaient également. Son travail fini, Law fixa la rouquine d'un air sévère, attendant des réponses.

" Une nana se faisait agresser, il était deux, j'ai pris une raclée par un, fin de l'histoire, raconta-t-elle, presque vexée.

- Et sinon, sortir son portable, appeler les flics, fin de l'histoire ? Répliqua le brun, sa voix trahissant son agacement.

- Ils seraient pas arrivés à temps, trancha-t-elle. J'allais pas observer sans rien faire.

- Et s'ils avaient eu une arme ?

- Ils en avaient pas.

- Tu fais exprès de pas comprendre ?

- C'est toi qui comprend pas, tonna-t-elle en se relevant. Arme ou pas arme, je vais pas laisser quelqu'un se faire agresser devant moi ! Et si y'avait eu son nom dans le journal demain ?

Ça aurait été toujours mieux que le tiens !

- Bah non ! Dans une colère noire, tenant à peine sur ses deux jambes, Hiyori pointa du doigt Law. T'es un putain de chirurgien et tu veux laisser crever les gens ?! "

La discussion tourna court. Titubant dangereusement, Hiyori sentit ses genoux fléchir sous elle tandis que sa vue se troublait. Avant qu'elle ne s'écroule sur le sol, deux bras la retinrent. La tête collée contre un corps chaud, la rouquine reconnut l'odeur de café mêlé à celle de l'antiseptique qui émanait de Law. Epuisée, elle s'évanouit, étrangement apaisée par la chaleur qui l'entourait.


Un œil après l'autre, l'étudiante émergea d'un sommeil de plomb. Elle tenta de bouger, se retourner. Ses muscles, comme rouillés, la tiraient de toutes parts. Son crâne, pris dans un étau, tambourinait si fort qu'elle resta un instant allongée sur le dos, incapable du moindre mouvement. Elle comprit rapidement que les draps dans lesquels elle se trouvait n'étaient pas les siens, mais surtout, à qui ils appartenaient. Toujours vêtue de son sweat de la veille, tâchée de sang, elle se redressa difficilement, s'adossant contre la tête de lit. Son regard balaya la pièce. Elle savait pertinemment où elle se trouvait, pourtant, rien ne ressemblait à ses souvenirs. Les meubles avaient été déplacés ; un mur avait été abattu ; la peinture, refaite ; les lampes, changées. Partagée entre le soulagement de ne rien reconnaître et l'angoisse de se retrouver dans cette maison, Hiyori n'entendit pas son hôte entrer dans la pièce.

Le gars d'en face [Law X OC]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant