Joséphine Carrington

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23 aout 1892

C'est un hurlement qui réveilla Abelforth ce matin-là. Cela faisait maintenant un an qu'il habitait Godric's Hollow avec sa famille. Son frère, Albus, avait récemment fêté ses onze ans, et depuis n'attendait qu'une chose, l'arrivée de sa lettre de Poudlard. Pestant contre son frère qui avait encore dut confondre une chouette avec un pigeon, comme tous les matins depuis une semaine, le jeune garçon se retourna dans son lit et mit son oreiller sur ses oreilles. À peine une minute plus tard, la porte de sa chambre s'ouvrit d'un grand coup.

- Je l'ai reçue ! Ab ! Ma lettre ! Regarde ! s'écria son frère en se jetant sur le lit.

- La ferme, je m'en fiche de ta lettre, laisse-moi dormir ! grogna Abelforth.

- Tu es simplement jaloux ! se vexa Albus. Je suis sûr que tu meurs d'envie de recevoir la tienne ! Enfin, si il y en a une de prévue pour toi !

- Bien sûr que j'en aurais une, arrête de penser que je suis un Cracmol, j'ai déjà fait de la magie accidentelle je te signale ! rétorqua le jeune garçon, définitivement réveillé.

- Dans ce cas tu es juste bougon ! lança Albus avant de sortir de la pièce à grands pas.

Sachant qu'il ne pourrait pas se rendormir, Abelforth se leva en soupirant, et s'habilla lentement. Même si il ne l'avouerait jamais, il enviait énormément son frère. Il avait tellement hâte d'aller à Poudlard ! Et dire qu'il devait encore attendre deux ans... La perspective d'aller étudier dans ce collège faisait rêver n'importe quel jeune sorcier, et il n'était pas exclu. Une fois vêtu, il se rendit comme chaque matin dans la chambre de sa sœur pour descendre avec elle dans la cuisine.

- Bonjour Ab ! dit la fillette assise par terre, de sa petite voix, tandis qu'elle tentait d'enfiler ses chaussettes avec difficulté. Tu as bien dormi ?

- Pas assez, ce crétin... commença le garçon avant de voir la grimace de sa sœur. Pardon, Albus est venu me réveiller pour me montrer sa lettre.

Ariana rit doucement.

- C'est pour ça qu'il a crié ! Oh quelle chance ! J'aimerai tellement aller à Poudlard moi aussi !

- Oui moi aussi j'ai hâte ! Je suis sûr qu'on sera tous les deux à Gryffondor ! C'est la meilleure maison !

- Serdaigle aussi est une maison super ! Maman y était ! défendit la petite fille, en réussissant enfin à mettre sa chaussette.

- Oui c'est vrai qu'elle n'est pas trop mal... acquiesça son frère. On descend ?

Dans la salle à manger, Albus récitait déjà en boucle la liste de fournitures, qu'il avait apprise par cœur.

- Une baguette magique, un chaudron en étain modèle standard taille 2, une boite de fioles en ve...

- Albus ! Ça suffit, on ira sur le chemin de Traverse demain acheter tout ça, le coupa sa mère d'un ton ferme. Tu devrais écrire une lettre pour ton père, pour lui annoncer la bonne nouvelle. Je pourrais passer la déposer cet après-midi...

- Oh oui bonne idée Mère ! J'y vais ! dit le garçon en se précipitant dans les escaliers, abandonnant dans son assiette un toast à moitié mangé.

Après avoir déjeuné, Abelforth fut chargé d'aller acheter du pain chez le seul boulanger sorcier du village. Il n'avait pas encore posé sa main sur la poignée de la porte de la boutique que celle-ci s'ouvrit brutalement, laissant passer une fillette les bras chargés de pain. Inévitablement, elle percuta Abelforth et les deux enfants atterrirent violemment sur le sol dallé.

- Oh je suis désolée ! s'exclama la petite fille en se relevant. Je ne voyais pas devant moi !

- Aïe... marmonna Abelforth en se frottant le crâne. Fais un peu attention ! grogna-t-il en levant la tête pour la regarder. Elle avait les yeux et les cheveux d'un noir profond, qui contrastait étrangement avec sa peau pâle,  avait les joue roses et était très mince. Elle était vêtue très simplement, et un petit collier ornait son cou maigre.

- Tu ne t'es pas fait mal ? s'inquiéta-t-elle en lui tendant une main.

- Ça va. répondit-il d'un ton abrupt, de mauvaise humeur, en se relevant sans son aide.

Il l'aida à ramasser le pain éparpillé sur le sol, de mauvaise grâce, et entra dans la boulangerie. Il acheta ce que sa mère lui avait demandé et ressorti. Il fut surpris de constater que la fillette était toujours là, serrant contre elle ses quatre miches de pain, un grand sourire affiché sur le visage.

- Je t'ai attendu ! s'exclama-t-elle.

- Pourquoi ?

- Parce que je veux devenir ton amie !

- Et si moi je ne veux pas ?

- Comment est-ce que tu t'appelles ? demanda-t-elle en ignorant sa question.

- Abelforth Dumbledore. dit-il sans rien ajouter.

- Tu ne me demande pas mon nom ?

- Non.

- Je vais quand même te le donner ! Je m'appelle Joséphine Carrington, enchantée Abel' !

- Que... ne m'appelle pas comme ça ! Et pourquoi est-ce que tu me suis ? s'agaça Abelforth en accélérant.

- Je te l'ai déjà dit, Abel' ! Je veux être amie avec toi ! Tu as quel âge ? insista-t-elle en forçant également l'allure.

-  Pour la dernière fois ne m'appelle pas Abel' ! J'ai huit ans ! Maintenant laisse-moi ! hurla presque le jeune garçon, s'énervant pour de bon.

- Moi aussi j'ai huit ans ! s'exclama joyeusement Joséphine en continuant de le suivre malgré les menaces qu'il lui lançait.

Après une course poursuite à travers le village, Abelforth réussit enfin à se débarrasser de la fillette, et entra avec soulagement dans le vestibule de sa maison. Il déposa soigneusement le pain dans la cuisine et monta à l'étage. Sa mère et Ariana jouaient ensemble dans la chambre de Kendra, et Albus était toujours penché sur son morceau de parchemin, sur lequel il décrivait sans doute à son père l'arrivée détaillée du hibou venu apporter sa lettre.

Le reste de la journée se déroula sans encombre, mais Abelforth ne réussissait pas à chasser de son esprit la fillette si agaçante qui l'avait percuté à la boulangerie. Joséphine Carrington.


Oublié d'une LumièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant