Chapitre 3 : À genoux !

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Le garde retira sa main de ma nuque. Je relevais les yeux sans que ce dernier me voit. Pacôme me reluquait sans réussir à cacher son envie viscérale de me posséder. J'avais appris par la Guilde qu'il aimait les esclaves récalcitrants. Je soutins son regard sans fléchir. Ses yeux s'étrécirent tandis que son poing se serra. Je frémis en songeant à ce qui devait lui traverser l'esprit.

— J'ai l'habitude avec ce type de domestique. Très, très, très caractériel. Ils restent revêches, même après deux marquages... et leur prix de revente sera aussi bas que leur soumission. Perds pas ton temps avec elle. Je te l'achète pour 21 pièces d'or.

Je retins un nouveau sourire. Phédor me fit signe de me relever. Ce fut le garde qui m'empoigna les cheveux pour me forcer à obéir. Je gémis en me relevant. La douleur me faisait monter les larmes aux yeux.

— En effet, très caractériel, confirma Phédor en écartant le garde d'un geste. (Il se plaça derrière mon dos et posa ses mains sur mes épaules.) Mais n'avais-tu pas enchéri à 31 pièces ?

Pacôme haussa un sourcil. Il m'observa puis se gratta le menton.

— Tu es sûr ? C'était pas 21 ?

Phédor rassembla ma chevelure pour la faire passer par-dessus mon épaule gauche. Je voulus m'écarter, mais il me retint sans peine en serrant sa main autour de mon épaule.

Il ne faut pas qu'il voit mon tatouage !

Mes mains commençèrent à trembler. J'avais couverte ma marque de poudre avant de venir ici, mais la chaleur m'avait tant fait transpirer qu'elle avait commencé à faire couler ce maquillage éphémère.

— Non, ce n'était pas 21, le reprit Phédor.

— J'aurai pourtant juré.

Phédor rit derrière moi. Ses pouces se mirent à caresser la peau nue de mon cou. Je frissonnais de dégoût à son contact. Quant à Pacôme, lui cachait mal sa colère.

Soudain, quelque chose de tiède vint m'enserrer la nuque. Il y eut un clic.

Je portai vivement mes mains à mon cou.

Il m'avait passé son satané collier doré. Je tâtais l'acier, sans réussir à le retirer.

— Cela ne m'intéresse pas, conclut Phédor en remettant en place ma chevelure qu'il lissa entre ses doigts.

Un petit objet brilla dans ses mains, juste à côté de ma joue : une clé. La clé de ce collier qu'il rangea dans un pli de sa toge.

Phédor me fit pivoter face à lui et commença à enrouler un fin foulard de soie vert autour du métal. Il fit une série de nœuds qui semblait suivre un schéma que lui seul connaissait.

Pacôme s'était tue.

Dis quelque chose ! Bon sang, mais dit quelque chose, toi !

Phédor saisit un pan de mon foulard et tira dessus pour m'ordonner de le suivre. Pacôme restait muet, inutile. Je cédais sans lutter, presque sonnée par les événements.

— 31 ! Je te l'achète pour 31 pièces ! cria Pacôme en nous suivant.

Enfin !

— Non, merci.

— Quarante ! Je te l'achète pour quarante !

— Les as-tu sur toi ?

— Je les aurai demain !

— Demain, je ne serai plus ici.

Phédor m'entraîna vers le petit port attenant. Pacôme nous suivait en me lançant des coups d'œil furieux.

— Je t'apporte ça à ton domaine !

— Bonne journée, Pacôme.

Phédor s'engagea sur une passerelle en bois. Je suivais toujours, contrainte par ce lien stupide.

La barque tangua lorsque nous montâmes.

— Allons-y, exigea Phédor au batelier.

D'un coup de rame, l'homme écarta le petit bateau qui glissa sur les flots. Pacôme était resté sur le ponton. Il observait notre embarcation prendre le courant et s'éloigner au loin tout comme j'assistais à la fin de ma mission.

Une fois hors de vue, Phédor lâcha mon foulard et m'ordonna :

— À genoux !

Je m'inclinais de mauvaise grâce, sans réussir à contenir le regard noir que je lui adressais. Il était inutile de lutter contre lui. Cela ne m'apporterait rien de bon à ce stade.

Et il me laissa là, au milieu du pont, la peau offerte au soleil. Si mon cou était protégé par ce foulard de soie, ce n'était pas le cas de mes épaules et de mes bras qui rougirent vite. Lui s'était assis sur les bancs protégés par des toiles tendus, aux côtés des autres Seigneurs ou maîtres. Leurs esclaves naviguaient jusqu'à eux pour leur proposer des jus de fruits frais et autres conneries à déguster.

Personne ne s'intéressa à moi, en train de cramer sur ce bateau. L'air chaud du désert me donnait l'impression de suffoquer. J'avais la gorge gonflée, rendue sèche à cause du sable qui volait autour de nous.

Très vite, la position devint inconfortable.

Puis douloureuse.

Je voulus m'asseoir à défaut d'être à genoux, mais le regard que m'adressa Phédor me défia d'aller au bout de mon idée.

Ce n'est que plus tard qu'il finit par m'autoriser à le rejoindre sous les toiles tendues. Pas de banc pour moi, seulement les échardes du plancher du bateau, mais je m'en fichais maintenant. Il avait réussi à sapper ma volonté si rapidement...

Je tâtai mes épaules brûlées puis mon visage. Je retins un gémissement en encaissant la vague de douleur en réponse.

Je savais que cette mission serait difficile. Je savais ce qui m'attendait. Je savais que tuer Pacôme serait risqué et fuir de ce pays plus encore, mais j'avais aussi la certitude que cette mission n'était que temporaire...

Seulement... partie comme c'était, je n'étais pas du tout sûre de quitter ce pays de torture un jour.

***

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Captive du désert [publié]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant