Le lendemain, je fus tiré du sommeil par un Al qui me secouait de plus en plus fort. Il se tenait au-dessus de moi, la bouche pincée.
— Enfin tu te réveilles ! Il faut qu'on parle !
Il arracha le fin drap qui me recouvrait et posa ma toge sur mon lit. La dure réalité de mon quotidien me revint avec force dès que je posais la main sur mon collier de métal.
Je m'assis sur le bord du matelas en me frottant les yeux. J'avais si peu dormi en comparaison de la longue journée agitée que j'avais affronté la veille.
— Mais qu'est-ce qui t'a prise hier ?! Comment tu as pu t'adresser au Maître comme ça ?!
— De quoi ?
— Hier ! Qu'est-ce que je t'ai dit, bon sang ! Tu ne dois pas lui parler sans son autorisation. Tu ne dois pas le regarder dans les yeux s'il ne s'adresse pas à toi. Tu dois l'appeler "maître" dès que tu t'adresses à lui. Tu dois...
Je pressais mon crâne de la paume de ma main droite. Son sermon n'était pas le meilleur des réveils. La plupart des lits étaient toujours occupés, mais les chuchotements d'Al faisaient lever des têtes endormies.
— Tu m'écoutes ?!
Je me tournai vers Al en lui montrant du doigt les domestiques tirés du lit qui n'appréciaient pas du tout le bruit au sein du dortoir.
— Habille-toi...
Son ton avait soudainement changé. Il me dévisageait gravement, presque avec pitié.
— Qu'est-ce qu'il y a ?
— Je suppose que Tègle va te faire appeler sous peu et tu ne voudras pas la faire attendre.
— Tègle ? Celle qui marque les domestiques ?
— Celle qui s'occupe de la domesticité ! Phédor a dû lui rapporter ton comportement de la veille et c'est elle qui te sanctionnera.
— Attends... Je risque quoi ?!
— Hé ! Ici on essaie de dormir !
L'un des domestiques nous jeta son oreiller en plumes. Al me fit un signe. Je tentais de m'habiller en enroulant les longs pans de ma toge, mais après plusieurs essais, tous plus désastreux que le précédent, je quittais le dortoir sans rien pour me couvrir le corps. Al se tenait près de la porte, à côté d'un garde qui se détourna de nous dès qu'il me vit avec seulement mes sandales tressées aux pieds.
— Je risque quoi ?
Al arracha presque ma toge des mains et commença à la faire passer autour de l'anneau de mon collier. J'ignorais ses gestes suivant pour me concentrer sur son visage inquiet.
— T'es sûre de vouloir savoir ?
Je hochai la tête et il commença à énoncer les sanctions qui pouvaient tomber sur la domesticité de ce château : cela allait d'une simple remontrance verbale à l'enfermement dans des cellules solaires en passant par des sévices corporels.
— C'est quoi des « cellules solaires » ?
— Une cage en métal exposée au soleil. Le domestique est enfermé dedans. C'est si étroit que tu touches tous les barreaux et les barreaux sont rendus brûlants par le soleil. Par contre la nuit, bah tu gèles dedans et...
Mon air choqué l'arrêta net dans sa phrase. Il secoua la tête et me dit de me mettre au travail. Il était hors de question que je me laisse traiter comme ça. Si Phédor avait pour idée de m'enfermer là-dedans, il retrouverait plusieurs cadavres au détour de ses couloirs. Jamais je me laisserais emmenée de mon plein gré là-bas.
— Attends ! ordonnai-je à Al avant de retourner aux dortoirs.
Je me rendis jusqu'à mon lit et glissais dans un pan de ma toge, un couteau de cuisine que j'avais subtilisée lors de mon service de la veille. Il était assez petit pour ne pas se voir sous mon vêtement, mais avec une lame suffisante pour pouvoir m'en servir comme arme létale.
Je revins auprès de Al qui nous fit traverser plusieurs couloirs tout en me demandant de réciter les règles du palais. Il se rendit vite compte que j'en avais retenues guère plus de deux ou trois. Ce n'était toujours pas mon meilleur score.
***
Ce chapitre bénéficie d'une réécriture datant du 30 octobre ^^
(Pour ceux qui tomberait sur l'histoire entre deux mise à jour : le prénom de l'héroïne a changé. Elle s'appelle maintenant Aurore, car Aurore et Phédor, ça sonne mieux :P)
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Captive du désert [publié]
RomanceAurore est un assassin envoyé au Pays du sable pour y tuer un grand seigneur. Or l'unique moyen d'approcher sa victime, c'est d'être vendue comme esclave pour espérer intégrer sa domesticité personnelle. Mais tout bascule lorsqu'un autre seigneur ac...