Le parent

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Toutes les parties en italique viennent directement du livre de Christelle Dabos

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Thorn fixa avec un choc absolu l'homme qui passait à travers l'épaisse porte en or. Un point de fusion de mille-soixante-quatre degrés Celsius pour ce métal qui se liquéfiait autour du corps d'un Alchimiste de Plombor - reconnaissable à son pouvoir sur la matière et son tartan caractéristique - et se reconstituait après son passage, laissant derrière lui une cicatrice qui balafrait la surface lisse et dorée. Il se transforma alors en une silhouette orientale de physique comme de vêtements, et se glissa entre les barreaux de la grille de sécurité en étirant son corps élastique. Un Colosse de Titan. Que signifiait cette intrusion? Qui était cet être? Se pourrait-il que...

Thorn se leva brusquement et s'accrocha à la table de ses deux mains pour lutter contre la douleur qui enserrait sa jambe, il crispa les mâchoires et les sourcils, son regard métallique fiché sur cet individu qu'il rencontrait enfin.

- Nous nous retrouvons encore, petite Animiste, déclara l'intrus qui s'assit nonchalamment sur une chaise.

Son apparence mouvante évolua encore jusqu'à devenir l'un des gendarmes qui avait participé à la perquisition de la manufacture Hildegarde.

- J'ai suivi les verdiers édénements... les derniers événements avec une certaine curiosité, dit-il après avoir croisé les jambes. Vous deux, en particulier. Vous m'intriguez depuis un certain temps.

- Vous êtes Dieu, murmura Thorn autant pour lui-même que pour Ophélie qui était toujours postée à ses côtés.

Quand le faux gendarme sourit en regardant Ophélie, Thorn sentit son incrédulité se muer en une rage incontrôlable.

- Ainsi, tu as lu le Livre de mon fils. Tu as essayé du moins. Mes œuvres ne sont pas à la portée de la première liseuse venue.

Mais Ophélie n'était pas la première liseuse venue, loin de là, elle était parvenue à tirer du Livre de Farouk une mine d'informations sans précédent. Sa fierté se mêla à sa colère et permit à Thorn de résister à la souffrance alors qu'il était toujours debout, les doigts contractés autour de la table.

- Toi, en revanche, ajouta-t-il en tournant son regard strabique vers Thorn. Tu n'es pas le premier liseur venu. Utiliser ta mémoire comme un amplificateur, c'était une idée audacieuse.

À ces mots, Dieu eut un hoquet bruyant et porta la main à sa bouche. Il en sortit, le plus naturellement du monde, un petit morceau de métal rouillé.

Thorn reconnut instantanément la pointe du couteau que Farouk avait plongé dans son Livre de chair. La seule partie du Livre qui était lisible. La douleur ralentissait le rythme d'ordinaire si rapide de son flot de pensées, néanmoins il réalisa ce que la possession de cet objet impliquait : Dieu avait rendu visite à Farouk, il avait touché à son Livre, et selon toute probabilité, il en avait profité pour manipuler l'esprit de famille.

- Je détiens plus de connaissances que toutes les bibliothèques réunies, déclara Dieu en observant l'éclat de métal rouillé qu'il tenait entre ses doigts. Mais ce petit détail, je dois admettre qu'il a échappé à mon attention.

Il le ravala avec un bruit mouillé de déglutition.

- Le groom d'ascenseur, murmura Ophélie. C'était vous, n'est-ce pas? Vous êtes allé voir M. Farouk après moi.

À deux occasions au moins, cet individu avait côtoyé Ophélie. Et c'était à cause de Thorn, uniquement de lui, et de ses manipulations. Il avait jeté cette petite femme en plein dans les bras de son ennemi, elle était en danger à cause de lui, il ne pourrait jamais se pardonner si quelque chose devait encore lui arriver. Elle avait déjà tant souffert par sa faute.

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