A la découverte du Koros

Premières Tensions

Le cortège continuait à avancer vers le gigantesque édifice qu'ils discernaient déjà, de là où ils étaient. Les différents ingénieurs travaillant encore sur la bête, saluaient Edwig avec un grand sourire. Edwig le leur rendait en les appelant chacun par leurs prénoms. Avenaar restait, lui, en queue de groupe. Il ne voulait pas qu'on le remarque. C'était la première fois depuis 30 ans qu'il voyait autant de monde faire autant de bruit. Fei, toujours suivie par Aristote, les bras croisés et les sourcils froncés, semblait encore vexée par son altercation avec Avenaar. Allait-elle devoir travailler sous la houlette de cet incapable ? Pourquoi ne l'avait-elle pas choisi pour piloter ce vaisseau ? Imbue d'elle-même et égocentrique, elle aurait voulu être la seule à manœuvrer ce vaisseau qui allait provoquer le sursaut de l'Humanité. Mais non, il fallait que cet énergumène d'Avenaar prenne sa place. Edwig recula et se porta à la hauteur d'Avenaar. Il lui dit alors discrètement :

« Vous embarquerez ce soir pour le futur, mon ami ! Vous voyez tous ces gens, leur espoir est entre vos mains. Cela fait plus de 15 ans que chacun travaille de pied ferme pour vous et votre équipage. Surtout, ne les décevez pas ! »

Avenaar baissa la tête. La pression était palpable. Il n'arrivait même pas à s'occuper de lui-même et on lui demandait de sauver le monde. La peur l'envahit, il était terrifié à l'idée de ne pas être à la hauteur. Enfin, ils arrivaient à l'entrée du vaisseau immense. Teinté de rouge et d'or, il était magnifique. On pouvait discerner deux étages avec de longues rangées de fenêtres. D'après ce qu'on pouvait voir d'en-bas, il avait la forme d'un trident avec un cockpit au centre et sur les ailes droites et gauches des canons sur lesquels était gravé le nom du navire : USS Challasion. Il était parfaitement adapté à la grandeur de cette mission. On y entrait par une passerelle tachetée de spots lumineux. Le groupe s'arrêta devant cette dernière pendant un long moment. Edwig prit à part l'ensemble des gardes. Avenaar, Aristote et Fei, se retrouvaient donc seuls face à ce géant de fer. Sûrement parce qu'il était programmé pour cela, Aristote prit la parole pour briser le silence :

« Vous êtes prêts à embarquer mes amis ? On va bien s'amuser ! »

Fei qui semblait courroucée prit la parole avec une violence inouïe :

« Ecoute Aristote, premièrement je ne suis pas ton amie, deuxièmement arrête de me lécher les bottes et troisièmement je n'y vais pas pour m'amuser. Est-ce que c'est clair ? »

Aristote baissa la tête et sembla profondément affecté par la réponse virulente qui l'avait fortement démoralisé. Il soupira :

« Très clair Amiral. »

Avenaar qui s'amusait au départ de cette altercation, se prit ensuite d'une réelle compassion pour Aristote qui paraissait complètement éteint par la discussion qu'il avait lui-même engagée. Avenaar s'approcha du robot et lui dit, calmement:

« Ne te tourmente pas pour elle. Moi, je suis prêt, l'ami »

Comme une pile qu'on aurait rechargée, Aristote releva la tête, le sourire jusqu'aux oreilles. Il acquiesça et couru sur la passerelle avant de disparaître dans le vaisseau à la suite de Fei qui semblait énervée de l'enthousiasme d'Aristote. Avenaar, lui, attendit encore, et redoutait le moment où il allait devoir monter dans ce véhicule, il appréhendait le fait de devoir quitter la Terre. Edwig congédia les gardiens, et s'avança vers Avenaar avec un pas déterminé. Il cria :

« Montez, mon ami. Allez voir vos appartements, rencontrez l'équipage, on se retrouve ce soir dans la pièce B20 de l'aile gauche pour un debrief avant votre départ ! »

Avenaar tourna la tête une dernière fois. Il vit tous ces gens, toute cette vie et sentit en lui un sentiment qu'il ne ressentait presque jamais : il était fier de mourir pour la planète. Il ferma les yeux, et il pensa aux océans, aux végétaux, à sa femme, son fils, et sa si belle fille. Il lâcha une larme et entama l'ascension de la passerelle.