Londres, 3 juillet 1917.
Alas my love you do me wrong
To cast me off discourteously;
And I have loved you oh so long
Delighting in your company.Le chant s'échappa de ses lèvres pêches, alors que la lumière des bougies vacilla.
Greensleeves was my delight,
Greensleeves my heart of gold
Greensleeves was my heart of joySa mélodie fut soudain interrompue.
- Lily, nous n'attendons plus que toi trésor ! Dépêche-toi, qu'on en finisse au plus vite !
Trois coups résonnèrent contre la porte et la jeune fille ne pût s'empêcher de sourire en entendant sa soeur pester contre la soirée qui les attendaient.
- J'en ai encore pour quelques instants, mais tu peux entrer Alice ! Lança-t-elle, alors que leur femme de chambre, Minnie, finissait de la coiffer.
Son ainée ne se fit pas prier et ouvrit la porte, agitant un éventail orné de plumes blanches en s'exclamant avec mécontentement:
- Dieu que la chaleur est insupportable, à Londres !
Elle laissa échapper une exclamation ravie en voyant le reflet de sa soeur dans le miroir et la rejoignit prestement, s'extasiant avec enthousiasme:
- Tu es ravissante !
Lily esquissa un sourire en observant à son tour son reflet: elle peinait à se reconnaitre ! Ses longs et fins cheveux bruns, d'ordinaire lâchés et malmenés par le vent des côtes, étaient coiffés avec soin et attachés dans un chignon complexe, retenu par un lys que venait de glisser la femme de chambre. Elle se tourna vers cette dernière en la complimentant:
- Vous avez fait des miracles Minnie !
- Oh, ce n'était rien Mademoiselle, mais je suis de l'avis de Mademoiselle Alice, vous êtes radieuse. Répondit la jolie blonde en s'inclinant.
- Je sens que tu vas mettre tout Londres en émoi, ce soir. Prédit Alice en esquissant un sourire taquin.
La femme de chambre termina de préparer la jeune fille, qui tourna sur elle-même en regardant le résultat dans le miroir: elle était vêtue d'une longue et vaporeuse robe blanche, décorée de dentelles et de perles nacrées, et de bijoux ornés de saphirs faisant ressortir l'éclat de ses yeux azurs, trait qu'elle partageait avec son ainée.
Elles étaient cependant bien différentes: si Alice était une jeune femme dans la vingtaine qui n'avait pas froid aux yeux, confiante et passionnée, Lily était à peine sortie de l'adolescence, incarnation de la timidité et de l'innocence, vivant surtout à travers ses précieux tableaux, elle qui chérissait plus que tout la peinture.
Alice vint la prendre dans ses bras avec émotions.
- Ah, ma chère petite soeur qui fait enfin son entrée dans l'aristocratie anglaise !
- Penses-tu que cela va bien se passer ? Demanda Lily, gagnée soudainement par l'appréhension.
- Bien sûr ! Répondit sans hésiter Alice. Ton bal des débutantes s'est déroulé à merveille, je ne doute aucunement de ton succès durant cette saison.
- Pourvu que tu aies raison...
- Evidemment que j'ai raison. Répliqua avec un air supérieur sa soeur. J'ai fait assez de saisons londoniennes et ai passé suffisamment de soirées avec ces imbéciles et rebutants célibataires pour savoir que tu vas être très courtisée.
Lily poussa un soupir, cette perspective ne l'enchantant guère: elle qui appréciait tant la tranquillité du château des Northampton et ses balades au bord de mer, la voilà à devoir affronter les soirées mouvementées de la capitale !
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Notre Devoir
Historical Fiction« La muse endormie », 1918, peintre inconnu. Un tableau exposé au Metropolitain Museum of Art, à New York, entouré de mystères. Des mystères que Mary Galloway compte bien résoudre, alors qu'elle doit affronter ses propres peurs et doutes. Dans sa q...