Le souffle assourdissant du vent balayant les côtes anglaises ne découragea pas Alice à entrainer sa soeur et ses invités à faire une balade matinale sur les falaises. Tandis qu'elle admirait les vagues s'écrasant avec brutalité sur les rochers au bras de Sir Richard, en compagnie de Terence et d'Elodie, Lily suivait Marie-Anne, s'assurant que la fillette ne glisse pas sur le chemin ardu menant à la plage. Charlotte marchait quelques pas derrière les deux cousines, retenant avec difficultés son chapeau face aux bourrasques maritimes.
Ayant délaissé l'idée de s'habiller d'un quelconque couvre-chef et de garder sa coiffure intact, Lily dégagea quelques mèches de son visage pour jeter un coup d'oeil vers sa soeur et son prétendant, l'estomac noué. Elle n'avait parlé à personne de ce qui s'était passé la veille, dans la bibliothèque, et avait été lire son conte à Marie-Anne comme si de rien n'était, mais malgré tout, elle n'arrivait pas à oublier les paroles de Sir Richard, ses manières brusques et l'étincelle d'intérêt malsain qui brillait dans ses yeux...
Mais une nouvelle fois, elle se convainquit que c'était sans doute l'alcool qui avait altéré son comportement, et avait brouillé son jugement ainsi que son bon sens. Le comportement de l'homme d'affaires semblait corroborer cette version, puisqu'il s'était montré tout à fait courtois au matin, et particulièrement flatteur envers Alice, ce qui ne déplaisait pas à cette dernière.
Le son des rochers s'effritant la ramena à l'instant présent et elle se tourna à nouveau vers sa cousine, préoccupée par sa sécurité.
- Marie-Anne, fais attention !
- Oui, oui, mais dépêche-toi, je veux voir les vagues ! Cria la petite, nullement effrayée par la pente abrupte.
Lily soupira, à la fois désabusée et envieuse de l'insouciance de la jeune Grantshire, mais sursauta en sentant une main saisir son bras, levant les yeux vers le visage rougi par l'effort mais radieux de la nièce Wolfbann, cette dernière s'exclamant d'une voix essoufflée:
- Cette fillette est une vraie petite cabri, elle bondit avec tellement d'aisance entre les rochers !
- Le Duc Grantshire possède une propriété à Black Mountain, et Marie-Anne adore partir en randonnée avec son père dans les sommets rocheux de la région. Lui apprit la cadette Northampton en souriant.
- Ce qui explique son impatience à voir la mer... je la comprends, pour quelqu'un qui n'en a guère l'habitude, assister à ce spectacle est vraiment fascinant.
- Oh, bien que je connaisse cet endroit depuis toujours, je me lasse pas du paysage ! S'exclama avec enthousiasme Lily. À chaque fois que je viens, la mer est d'une humeur différente, on ne sait jamais à quoi s'attendre. Il y a bien des hommes qui ont tenté de décrypter ses secrets, de prédire ses courants et ses changements, mais elle parvint toujours à les surprendre, à se montrer indomptable, d'ailleurs bon nombre de peuples lui louent un véritable culte, ce qui n'est guère étonnant puisqu'elle semble posséder une véritable personnalité et faire des caprices, on peut alors comprendre ...
Elle s'interrompit en voyant la lueur brillant dans le regard de la jeune femme, un mélange d'étonnement et de fascination, et se rendit compte qu'elle s'était une nouvelle fois emportée sur un sujet qui lui tenait à coeur, ses joues prenant une teinte écarlate alors qu'elle bégaya, mal à l'aise:
- D-désolée, je dois vous ennuyer avec mes divagations, je... je ne sais pas m'arrêter quand je commence à parler, je suis vraiment navrée...
- Au contraire, je pourrais vous écouter pendant des heures ! Rétorqua avec un sourire franc Charlotte. C'est tellement rafraichissant d'entendre une personne parler de ce qu'elle aime, de ce qui la passionne ! Et puis...
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Notre Devoir
Historical Fiction« La muse endormie », 1918, peintre inconnu. Un tableau exposé au Metropolitain Museum of Art, à New York, entouré de mystères. Des mystères que Mary Galloway compte bien résoudre, alors qu'elle doit affronter ses propres peurs et doutes. Dans sa q...