Chapitre 5 : Métro Opéra

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Le Palais Garnier, c'est la première scène lyrique de France et cela malgré l'Opéra Bastille. Il reste dans les mémoires comme le plus somptueux et le plus prestigieux temple de la musique, du chant et de la danse. Conçu par Charles Garnier, grand Prix de Rome, sélectionné parmi 171 candidats, l'opéra fut inauguré par Mac Mahon en 1875. Trois des avenues qui partent de l'Opéra aboutissent à des monuments prestigieux. La place Vendôme, avec sa colonne coulée grâce à 1200 canons pris à Austerlitz, le Palais Royal et la Comédie Française, autre lieu de la culture, l'église de la Madeleine et son architecture de temple romain. Mais tout ce patrimoine est dévoré chaque jour par les touristes qui s'agglutinent devant les monuments. Ils n'oublient pas pour autant les luxueux magasins qui pointillent les différentes avenues. On peut être esthètes ou mélomanes sans négliger des plaisirs plus subtils, surtout s'ils se concrétisent sous la forme de certains bijoux que l'on trouve place Vendôme...

Mais tout cela laisse indifférente une foule de citoyens pressés, qui s'engouffre dans la gueule avide d'une hydre souterraine, serpent bleu et blanc qui dévore chaque jour ses milliers de passagers. Telle une œuvre lyrique jouée au-dessus, un drame sur une mélodie en sous-sol, et un grand air de métro vient de s'achever, avec beaucoup plus de vérité sur le quai direction Balard. Une femme, plus très jeune, vient de s'effondrer, victime de la morsure de celui que l'on appelle déjà « le monstre du métro ». Aux cris poussés par ses voisins immédiats, un brigadier et un agent se précipitent déjà. Le quadrillage de certaines stations, en place, vient de démontrer son efficacité. Par talkie-walkie, le brigadier appelle ses collègues.

- Allô, Romeo, ici Alpha, vous me recevez ?

- Parlez Alpha, on vous reçoit cinq sur cinq.

- Ok, client étendu sur le quai direction Balard, bouclez les issues. Personne ne sort ni ne peut entrer.

- Bien compris, on ferme...

Dans une totale coordination, la station se trouve neutralisée, au grand dam des voyageurs bloqués. Gasparini et son équipe, prévenus par radio, ne tardèrent pas à parvenir sur les lieux. La foule à la sortie du travail était particulièrement dense et une indescriptible panique régnait sur place. Les usagers pressés de rentrer chez eux, se prêtaient de mauvaise grâce au contrôle d'identité.

Gasparini ne se faisait pas trop d'illusion sur les résultats de ces contrôles, malgré la vitesse d'intervention de ses troupes, il y avait beaucoup trop de possibilités offertes au criminel pour qu'il puisse leur échapper. Mais après tout, le hasard est bien souvent heureux... Le bouclage dura trente minutes, il fallut lever le blocus, l'émeute couvait. Les rames se succédaient rapidement à cette heure d'affluence et les policiers avaient à grand peine isolé la victime avec une corde tendue à la hâte entre quelques agents.

Valentin, penché sur le corps, n'avait pu que confirmer le diagnostic du brigadier. La femme était morte, le temporal droit perforé, l'autopsie le confirmerait sûrement, par une balle de 22 long rifle.

Gasparini, quant à lui, avait ramassé le sac à mains d'où il extrayait lentement les papiers d'identité de la défunte, Mireille Ramas, employée de banque, rue de la Victoire. Connaissant bien le quartier, Gasparini jura entre ses dents, elle aurait bien pu prendre le métro à Chaussée d'Antin, c'était plus près, mais il s'aperçut bien vite que la victime habitait rue Vasco de Gamma, et venir à l'Opéra, lui évitait un changement. De plus, cela lui permettait de contempler les vitrines.

Les gars du laboratoire de la police arrivèrent très vite pour les constatations d'usage. Le médecin légiste fit les premières recherches et ordonna que l'on évacue le corps vers l'Institut Médico-Légal.

Une de plus au frigo et demain samedi, un « scandale dans la Presse », Gasparini songea qu'il était mûr pour une convocation au ministère de l'Intérieur. Le milieu politique, quelle que soit sa coloration, n'aime pas beaucoup ces meurtres répétés, au grand dam de la police.

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