Une, deux rencontres

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Nous repartons donc, la journée vient à peine de commencer et nous avons encore un long chemin à faire. La route que nous suivons est étroite et sinue dans la montagne. En le suivant, nous finirons, je crois, par arriver dans un petit royaume humain éloigné de tout. Enfin, nous finissons par venir à bout du sentier, et nous nous retrouvons devant les modestes portes de bois clair qui permettent d’entrer dans la cité protégée. Je décripte le panneau : “Nao”. Nous les franchissons facilement, et nous nous dirigeons vers le château. Je suis un peu nerveuse. 

En réalité, c’est la première fois que je rencontre un dirigeant humain, et je suis un peu effrayée car on m’a toujours dit du mal de cette race. On dit qu’elle est cupide, matérialiste, territoriale et belliqueuse, et, malgré le fait qu'elle ai un président, Edwil, et une sorte de république, Karacty, la plupart de ses représentants sont divisés dans de petits royaumes comme celui-ci, souvent concurrents. Mais bon, si je tends l’oreille, je peux aussi entendre qu'ils sont sentimentaux, créatifs, solidaires et doux. Qui croire ? Pourtant, malgré tous leurs défauts, ils se font tout petits face à la puissance des autres peuples. Qui serait assez fou pour s’opposer aux gigantesques dragons ou à la terrible armée fée - et non, je ne suis pas prétentieuse, comment croyez vous qu’on ait conquis tout le territoire que nous possédons ? 

Bref, j’ai beau être anxieuse, je me dois de rencontrer cet humain, ne serait-ce que pour ma culture personnelle. Lorsque que nous nous arrêtons devant le trône du roi, après avoir été annoncés, je suis prête. Je le regarde attentivement.

Il a de courts cheveux blonds, en bataille, des yeux noisette qui ressortent sur sa peau pâle et son front est enserré par un léger cercle d’or, seul signe apparent de son statut. Il paraît étonnamment jeune, avec un pourpoint blanc et un élégant pantalon pourpre qui tombe sur des bottes de cuir souple. 

“-Bienvenue ! Je suis le roi de ce modeste royaume, Mapor. Mais j’imagine que vous l’aviez deviné.” lança-t-il d’une voix morne.

Tiens. Pourquoi donc a-t-il cet air triste ? Luno doit se dire la même chose, car je l’entends prendre la parole.

“-Dites-moi, votre Majesté, si ce n’est pas indiscret, pourquoi cette expression de dépit ? Nous pouvons peut-être vous aider.

-Eh bien… C’est un peu délicat… Disons que, depuis quelques semaines, un nuage s'amuse à faire pluie-pluie au-dessus de mon royaume, et cela empêche les récoltes de prospérer.

-Oh, je comprends mieux, et si nous allions parler avec ce nuage récalcitrant ?” propose alors Étoiélo.

Peu de temps après, nous nous retrouvons dans la cour du château.

Je propose au roi de nous accompagner dans le ciel, grâce aux ailes que j’ai offertes à Luno, mais il refuse : il a le vertige. Je ne comprends pas comment on peut avoir le vertige. Je trouve la sensation de voler tellement… enivrante !

D’un battement d’aile vigoureux, nous nous envolons, Étoiélo, Luno et moi, en direction du nuage. Je sens l’air frais de la montagne souffler sur mon visage, glisser sous mes ailes et me porter toujours plus haut. Lorsque je suis à la hauteur du nuage, je lui tourne autour pour trouver son visage. 

“-Bonjour, citoyen des cieux. 

-Quelle phrase d’entrée dis-donc ! Dis-moi, que veux-tu ? Je me doute bien que vous n’êtes pas venus pour discuter sagement.”

Quelle perspicacité ! Bien sûr que nous ne sommes pas venus pour rien, cela me paraît évident ! Mais bon, le peuple des nuages n’est pas connu pour son intelligence, aussi, je me tais.

“-En fait, nous nous demandions pourquoi tu restais ici, sans bouger. 

“-Pour plusieurs raisons. Je suis plutôt bien installé : l’air pur et non pollué des hauteurs, beaucoup de place ou moi tout seul, c’est une sorte de paradis !

-Et si tu m'accompagnais dans ma mission, à la place ?” lancé-je sans réfléchir, ce qui me vaut un coup de  coude dans les côtes de la part d’Étoiélo. 

Mince ! Durant un instant, j’ai complètement oublié que mon objectif est secret. Mais maintenant que j’ai commencé, il est trop tard pour reculer. 

“-Quelle mission ? 

-Je… je suis censée tuer Erialimis. Rassure-moi, tu n’es pas un espion à sa solde ?

-Quoi ? Non bien sûr que non ! Ta mission me paraît intéressante. Cette cruelle fouine commence à m’énerver, et je n’ai pas particulièrement envie de devenir un Orageux à cause de lui ! Au fait, je m’appelle Cotton."

En effet, les nuages ont une certaine tendance à foncer et devenir “orageux” lorsqu’ils s’énervent, et ont de grandes difficultés à sortir de cet état. Ils deviennent violents et agressifs.

Aïna, fée et bien plus Où les histoires vivent. Découvrez maintenant