Chapitre 5 : Autour d'un repas

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        La matinée se termina tranquillement. Pas d'incident à déclarer, rien. Shela, la mère des jumelles, avait envoyé une employée de sa maison principale faire des courses. Les emplettes furent déposées dans la cuisine, Maggie n'eut même pas le temps d'apercevoir la personne qui les avait faites. Rapide, discrète et efficace.

       Marina et Sébrine avaient été chargées par leur mère de faire la cuisine. Elles avaient fait une grosse casserole de riz et mis des saucisses au micro-ondes. Un plat d'ado en somme.

« —Besoin d'un coup de main ? demanda Maggie aux deux sœurs.

—Non merci, on devrait s'en sortir à deux, lui répondit gentiment Marina.

—Elle a l'air pas mal préoccupée votre mère, s'enquit la jeune détective pour faire parler les filles.

—Un meurtre a eu lieu dans sa maison de campagne en présence de ses deux filles, vous voulez qu'elle le prenne comment ? lança Sébrine qui tentait de dissimuler son agacement.

—Oui, c'était bête de ma part de poser cette question. »

        Maggie quitta la cuisine. Des filles polies et bien élevées. La jeune détective erra un moment dans la maison, sans vraiment avoir de but précis. Elle croisa quelques personnes au détour d'un couloir mais elle ne s'arrêta pas. Elle s'imprégnait des lieux.

          Au bout de quelque temps, quand l'odeur du riz et des saucisses devînt bien présente, tous furent appelés à passer à table. Personne n'avait vraiment de place attribuée. Ewen, Béthanie, Djamila et Maggie s'installèrent à un bout de la table tandis que les adolescents en occupaient le reste. Une place restait vide. Les détectives s'aperçurent aussitôt que c'était Célia qui manquait à l'appel.

« —Quelqu'un sait où elle est ? demanda Béthanie.

—Elle doit être dans notre chambre, lui répondit Carla sans aucune assurance. Elle y est enfermée depuis tout à l'heure, je ne peux même pas entrer.

—Je vais voir. »

        Béthanie quitta la table pour se rendre auprès de Célia. Djamila, qui gardait le regard fixé sur son frère qui avait pris soin de se placer le plus loin possible d'elle, fût dérangée par Raphaël qui s'était approché sans faire de bruit. Il lui chuchota quelque chose à l'oreille.

« —Quoi ?! hurla cette dernière, ce qui eut pour effet de faire sursauter la petite assemblée à commencer par le journaliste qui était encore penché au-dessus d'elle. Mais j'ai même pas encore mangé !

—C'est Patron qui le demande, tu t'achèteras un sandwich sur la route et le fera passer en note de frais à Morgane. »

        Djamila se leva donc de mauvaise grâce et, après avoir jeté un dernier regard à son frère, elle quitta la salle à manger. La porte d'entrée claqua fortement, ce qui signifiait qu'elle était partie, suivie de Raphaël. Ewen et Maggie étaient les deux seuls détectives restant à table.

         Marina commença le service, aidée de sa sœur qui lui tendait les assiettes. Béthanie revînt, seule, et s'installa à table pour manger.

« —Alors ? la questionna Ewen.

—Elle n'a pas faim, elle viendra grignoter un truc quand ça ira mieux. Où est partie Djamila ?

—Raphaël est venu la chercher.

—Pour quoi faire ?

—Je ne sais pas, il le lui a dit à l'oreille. »

        Le repas commença directement par le plat de résistance. Personne ne s'était encore mis à parler.

« —Vous comptez faire quoi l'an prochain ? demanda Béthanie pour tenter de lancer un sujet de conversation.

—Je vais tenter la PACES, répondit la première Sébrine dans un soupir de découragement.

—Fac de maths, lança Valentin.

—Fac de lettres pour Eva et moi, annonça Carla fièrement.

—Je pars pour un DUT techniques de commercialisation, dit Julien. Avec Jawad et... »

        Sa voix se brisa. Et Driss, pensa Maggie. Julien tenta de ravaler ses larmes mais une rebelle glissa quand même le long de sa joue.

« —Et toi Marina ? demanda Béthanie à l'adolescente qui n'avait toujours pas répondu.

—Je pars à Montréal pour passer une maîtrise en anthropologie.

—Pas mal ! Et Célia ? Vous savez ce qu'elle veut faire ?

—Elle va faire une licence de sociologie, leur apprit Carla. Elle a été recalée pour la prépa à Sciences po. »

         Cette dernière remarque jeta un blanc dans la salle. Visiblement, c'était un sujet sensible. C'est Sébrine qui rompit le silence pesant qui régnait dans la salle depuis un moment en proposant à tout le monde d'aller se chercher un dessert dans le réfrigérateur. Seuls Djawad et Valentin allèrent se servir.

          Pendant que les deux garçons mangeaient leurs yaourts, Béthanie se leva de table pour répondre à un appel sur son téléphone, et les autres individus attendirent dans le silence. Quand Béthanie revînt, elle avait la mine grave.

« —Patron veut que je me rende immédiatement aux bureaux. Ewen et Maggie, vous serez chargés d'interroger les parents des ados qui arriveront d'ici une heure. En attendant, il veut que vous restiez ici. »

          Béthanie quitta la pièce, laissant Maggie et Ewen seuls avec les adolescents qui étaient visiblement devenus des boules de nerfs.

« —Il faut vraiment que vous interrogiez nos parents ? demanda Julien.

—Vous nous suspectez tous ? s'inquiéta Eva.

—Vous allez leur poser quoi comme questions exactement ? s'enquit Valentin. »

         Et ainsi de suite. Les questions fusaient dans tous les sens. Ewen leur répondit qu'ils ne savaient pas encore comment ils allaient mener les interrogatoires, puis il s'éclipsa avec sa collègue hors de la salle à manger, à l'abri des adolescents complètement stressés et paniqués.

« —Bon ! souffla Ewen. Alors Maggie, tu veux qu'on s'y prenne comment ?

—On ne se sépare pas, on les interroge ensemble.

—C'est toi l'chef. »

         Maggie se laissa tomber dans un fauteuil qui était installé dans l'entrée et Ewen s'assit sur l'accoudoir. Ils attendirent en silence pendant un moment, chacun dans ses pensées.

« —Ewen ? appela Maggie.

—Mmh ?

—Tu penses quoi de l'enquête ?

—Qu'elle vient de commencer.

—Ok, mais tu n'as pas une idée, ou au moins une intuition sur ce qu'il a bien pu se passer cette nuit ?

—Non, pas encore. Toi oui ?

—Je... »

        Maggie fût interrompue par quelqu'un qui frappa à la porte. Ewen alla ouvrir. Raphaël, leur collègue journaliste, apparut sur le seuil de la porte.

« —Des parents sont là, je les fais entrer ? questionna le nouvel arrivant.

—Ouais vas-y, lui répondit Ewen. »

          Sébrine fit son apparition dans le hall d'entrée.

« —C'est pour ? demanda-t-elle.

—Certains parents arrivent, lui répondit Maggie. Où peut-on les faire patienter ?

—Euh, vous pourrez les installer dans le salon, je vais faire du café. Et pour les interrogatoires, vous pouvez vous réinstaller dans la chambre de mes parents et le bureau.

—Le bureau suffira, merci. »

        Sébrine leur sourit et retourna vaquer à ses occupations. Trois couples entrèrent dans la maison. Ewen désigna le couple le plus proche de lui :

« —Suivez-nous, nous allons dans le bureau pour vous interroger. Raphaël, si tu pouvais accompagner les autres parents dans le salon en attendant qu'on les appelle, ce serait cool. »

Fête de fin d'annéeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant