4

2.3K 187 112
                                    

03/07/2022

Cher Jungkook,

Cette journée a été absolument horrible, mais j'ai retrouvé mon journal. Tout ce que je sais à présent, c'est que mettre ce carnet dans mon casier au lycée, était une idée de merde, voire la plus débile que j'ai jamais eu.

Je ne contrôle plus mon corps, je ne suis plus maître de moi-même. Des spasmes agitent ma cage thoracique pendant que je me liquéfie sous son regard. Je me sens presque vaciller.

Un instinct me fait sortir de cette transe.
Je me précipite sur lui et lui arrache le carnet des mains sous les yeux surpris des gens autour de nous.

Je ne préfère même pas lui demander s'il l'a lu, je crains bien trop la réponse.

Je ne prend même pas le temps de lui dire quoi que ce soit. Avant même qu'il n'ait le temps de s'exclamer, je m'enfuis vers la porte.

Je crois qu'il essaie de me rattraper car j'entends sa voix au loin, mais je ne me retourne pas. Je me précipite et sors de l'établissement sans ne jamais jeter un coup d'oeil en arrière. Je serais mortifié si jamais il arrivait à me rattraper.

Qu'est-ce que je pourrais lui dire ?

Il n'y a plus rien a dire s'il l'a lu. Tout est dedans, jusque dans le moindre détail.

Quand je suis suffisamment loin, je reprends mon souffle et me retourne enfin. Il n'y a personne, il n'a pas cherché à me retenir. S'il ne l'a pas lu, il doit me prendre pour un taré, mais je crois que je préfère ça au fait qu'il découvre ce que je ressens pour lui.

Je ne peux pas laisser le passé se reproduire.

Je ne dois plus jamais laisser quelqu'un prendre connaissance de mes sentiments.

Jamais.

Mon premier réflexe une fois ma course achevée est d'ouvrir le carnet. Il est exactement comme je l'avais laissé, ça me soulage un temps, puis je me rends compte d'à quel point ma réflexion est stupide. Même s'il l'avait lu, il n'y a aucune raison pour qu'il le dégrade.

S'il l'avait lu, je sais qu'il ne serait pas du genre à le montrer à tout le monde ou à me le jeter à la figure.

Taehyung est quelqu'un de gentil, de profondément gentil, mais ça ne signifie pas pour autant que notre amitié survivrait.

Peut-être qu'il resterait silencieux et qu'il disparaîtrait de ma vie lentement, sans faire de bruit. Mais jamais il ne me ferait de mal indûment.

C'est les bras ballants et le coeur en peine qu'après ma course effrénée, je passe le pas de ma porte. Ma mère et mon beau père sont sur le canapé, je fais mon maximum pour ne pas qu'ils m'entendent mais ils se retournent à l'instant où je ferme la porte.

- Jungkook ! Tu as passé une bonne journée ? Content que ce soit les vacances ?

J'ai la migraine rien que de l'entendre parler. Je l'ai deux fois plus en voyant cet homme qui ne sera jamais mon père et son demi-sourire sur le visage qui se veut bienveillant.

Ce que j'aime encore moins que d'être méprisé, c'est d'être pris en pitié. Je déteste quand on me renvoie directement au visage ma "faiblesse". Je suis convaincu qu'être fort passe par autre chose que ce que le commun des mortels croit.

Je ne sais pas m'exprimer, j'ai du mal à dire non, j'ai peur de blesser les autres mais je suis fort. Retenir toute cette souffrance en moi, je pense que c'est ça, être fort.

- Jungkook ?

Je la regarde et lui sourit. Je me suis tellement exercé à sourire malgré ma peine qu'on ne pourrait plus distinguer un vrai d'un faux.

𝐋𝐄 𝐉𝐎𝐔𝐑𝐍𝐀𝐋 ⁽ᵛᵏᵒᵒᵏ⁾Où les histoires vivent. Découvrez maintenant