LE SECOND JOUR (trois temps)

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Merle s'arrêta devant le manoir qu'il avait croisé plusieurs fois. Les sourcils toujours si froncés qu'ils engloutissaient ses yeux ; les dents plus serrées qu'un piège à ours planté dans les chaires, il fixait cette bâtisse hurlante avec la peur aux tripes.

C'était une peur toute à fait extraordinaire, une de celles qu'on ne ressentait qu'une fois dans sa vie. Celle de la peur elle-même. Celle des fantômes qui se mettaient à exister, celle des cauchemars d'enfants et des monstres dans le placard. Il était paralysé de la tête aux pieds ; le coeur glacé et brûlant à la fois ; ses muscles contractés autant que possible donnaient l'illusion d'une presque confiance. Merle se serait donné des baffes. Il était là, pathétique à pisser dans sa culotte comme un môme de six ans. Il se tabasserait même, s'il le pouvait.

Sa fierté et son égo prirent un sacré coup avec cet endroit oppressant, mais Merle n'était pas une mauviette. Il était Merle Dixon, le Taureau de la Colère, l'Aigle de la Mort, mais certainement pas le Lapin de la Terreur. C'était plutôt Sam, le Lapin de la Terreur.

Merle Dixon resserra sa prise sur le manche de la hachette, il la leva devant lui et redressa le menton. Il fusillait le manoir avec hargne. Un volet raccroché misérablement au cadre d'une fenêtre se balançait en grinçant, le vent semblait s'être calmé et le minable morceau de planches avait l'air d'être au bord du gouffre. Mais il restait bien accroché, comme si des siècles n'avaient pas suffit à l'arracher de cette pittoresque demeure. C'était un volet du troisième étage, les deux niveaux en-dessous avaient conservés leur vitres mais la couche de poussière qui les recouvraient était si épaissent qu'elle les rendaient complètement opaques.

Agacé de ne pas pouvoir aller jeter un oeil à l'interieur avant de descendre en Enfer, il se résigna à monter les marches du perrons. Un sinistre grincement sous ses rangers le fit se tendre alors qu'il posait le pied sur la troisième marche. Il resta en suspend un instant, le temps de respirer trois fois et d'expirer trois fois. Il évita les planches grinçantes et finit de monter jusqu'au pallier. Merle avança vers la porte et frémit en la voyant entre-ouverte. Ce n'était pas normal, enfin peut-être que si, ça l'était, mais dans les films d'horreur que Merle passait des nuits entières à regarder, lui avaient prouver le contraire.

Il s'apprêtait à rentrer dans la tanière du démon. 
Et armé de sa hache, il allait faire un carnage. Cette bête infâme était très certainement faite de chaire et si ça n'était pas le cas, il n'aurait rien à craindre de ce monstre. Il avait passé sa vie à respirer de la fumée de clopes, ça n'était pas un petit fantôme de gaz qui allait lui faire peur.

Merle balança son pied droit devant lui et la vieille porte se fracassa avec violence contre le mur. Plusieurs éclats de bois s'envolèrent dans un nuage de poussière et ce qu'il restait de la porte s'immobilisa dans des gémissements étrangement humains. Merle frissonna mais ne se laissa pas démonter. Il rentra d'un pas sûr et un rire siffla derrière lui. Il n'eût pas le temps de paniquer que quelqu'un se mit à courir en haut de l'escalier. Ses tripes se retournèrent et il se mordit la lèvre pour se réveiller.
La douleur fût électrique. Il passa sa langue sur la bille de sang qui perlait et sourit d'un air carnassier, tous les sens en alerte.

BOYS DON'T CRY [twd]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant