Love me like there's no Tomorrow

Chapitre 2

Il n'est pas très grand, je dirais entre un mètre soixante-dix et un mètre soixante-quinze. Il porte un pantalon et une veste de costume du même gris clair et une chemise bleu marine. Ses cheveux châtain foncé et bouclés semblent vouloir atteindre ses grands yeux sombres et expressifs. Son visage, en particulier ses expressions qui montrent qu’il est assez peu sûr de lui, permettent d’en déduire qu'il sort à peine de ses études, il ne doit avoir que six ou sept ans de plus que nous. Quel drôle de tableau !
-Bonjour. Je m'appelle Monsieur Dan et je serai votre professeur de physique-chimie cette année et pendant les deux suivantes. Comme vous vous en doutez, à vous voir, je ne suis pas enseignant depuis très longtemps, mais sachez que je ne serai pas des plus indulgents. Néanmoins, il ne tient qu'à vous de réussir.
Aucun élève n'ose dire quelque chose. Nous sommes ici pour travailler, contrairement à l'école obligatoire, car nous avons pour projet d'avoir un métier qui nous plaira. Quoiqu'il en soit, il nous énonce rapidement le programme de l'année avant de devoir repartir avec la classe dont il est titulaire.

-Et bien, il est bizarre ce prof, lance Grégoire, coupant le fil de mes pensées.
Je me tourne vers lui pour lui répondre. Tout le monde discute en attendant le retour de Monsieur Hartat.
-C'est un nouveau, il doit avoir du mal à prendre ses marques.
-Oui, sûrement…
-Ça ne veut pas dire qu'il sera un mauvais professeur. Il a réussi ses concours et, vu son âge, avec peut-être même un an d'avance.
-Non, je ne pense pas, objecte-t-il, c'est bien trop difficile de sauter des classes de nos jours.
-C'est pas faux.

Le bruit de la porte qui s'ouvre fait s'éteindre toutes les conversations qui fusaient quelques secondes plus tôt.
-Bien, voilà qui est fait, déclare Monsieur Hartat en entrant. En ce qui concerne les salles que vous pouvez voir sur votre emploi du temps, ce sera principalement celle dans laquelle nous sommes. Pour les travaux pratiques, ce sera deux étages au-dessus et la salle des devoirs sur table est un au-dessus. Enfin, il ne devrait pas être trop difficile de vous repérer. En ce qui concerne les salles informatiques, elles sont à cet étage, car vous aurez aussi informatique avec moi, c'est dans votre programme, et la salle de travail qui vous est attribuée quand vous voulez rester pour réviser se trouve au même étage que celles des devoirs sur table. Vous avez des questions ?
Le silence est total. Puis quelqu'un se décide timidement à lever la main pour demander la parole.
-Oui ?
-Est-ce qu'il y a des ascenseurs ?
-Oui, ils sont juste à côté de l'entrée. Mais vous n'y avez accès qu'avec un permis de l'infirmière ou une blessure qui vous gênerait pour prendre les escaliers, répond le professeur froidement. Autre chose ?
-Non. Merci.
Un nouveau silence s'installe. Le professeur semble attendre une nouvelle question que personne n'ose poser. Au bout d'interminables secondes, il se décide enfin à prendre la parole.
-Bien. Alors, si nous sommes tous d'accord, vous pouvez rentrer chez vous. On se revoit demain pour le cours. Au revoir, bonne fin de journée.

Les élèves s'empressent de ranger leurs affaires et sortent de la salle en saluant le professeur qui se tient à côté de la porte, les bras croisés. Je discute un peu avec Grégoire tandis que nous nous dirigeons vers la sortie de l'établissement.
-T'as de la chance d'habiter à dix minutes, s’exclame-t-il ! Moi, je dois prendre le train puis le bus.
-Bah… Je profite tant que je peux. Ce sera sûrement différent quand j'entrerai en école d'enseignement.
-Oui, c'est vrai. Bon, moi je vais par là. À demain !
-À demain !
Je sors les roues de mes rollers de mon sac et les attache à mes chaussures. Je mets une dizaine de minutes à rentrer chez moi mais je pense qu'à pieds, ça doit être plutôt un quart d'heure.

La première semaine de cours passe plutôt rapidement. J'ai un peu de mal à prendre le rythme mais je m'accroche, je compte bien redoubler d'efforts pour y arriver. Je me suis fait quelques amis. Bien sûr, il y a Grégoire, mais aussi Léo et Allwen. On s'entend bien tous les quatre. On est dans le même demi-groupe de classe et on a décidé que pour les interrogations orales, qui sont par groupes de deux, je serai avec Grégoire et Léo avec Allwen.

Ce lundi matin, je termine de me préparer un peu en avance. Tant pis, je serai arrivée avant tout le monde, et puis cinq ou dix minutes, ce n'est pas trop long. Je réajuste les bretelles de mon sac sur mes épaules et sort de mon appartement. Tandis que je referme la porte à clé, j'entends une porte s'ouvrir derrière moi. C'est sûrement mon voisin de palier, il est arrivé l'année dernière mais je ne l'ai jamais croisé, ce sera l'occasion de faire connaissance. Je me retourne et suis surprise de reconnaître Monsieur Dan, tout aussi surpris que moi d'ailleurs. Aucun de nous deux ne sait d'abord quoi dire, mais je finis tout de même par briser le silence.
-Bonjour Monsieur.
-Bonjour Jade.
-Je ne m'y attendais pas du tout à celle-là, déclaré-je en riant nerveusement pendant que nous descendons les escaliers.
-Je dois bien avouer que moi non plus. C'est étrange qu'on ne se soit jamais croisé.
Je lui montre mes rollers en guise de réponse. Nous sortons du bâtiment et prenons le chemin de l'école tout en continuant de discuter.
-D'habitude, je pars un peu plus tard. Et puis, comme je passe sur la piste cyclable, on n'a pas dû faire attention.
Il hausse les épaules. Un silence relatif s'installe, perturbé par quelques voitures et les bruits incessants de la rue. Il finit par le rompre.
-Et sinon, en physique-chimie, vous vous en sortez ?
-Oui, ça va. C'est ma matière préférée. J'ai un peu plus de mal en maths mais je m'accroche. D'ailleurs, je dois vous avouer que c'est votre métier que je compte bien faire plus tard, déclaré-je.
-Oh !
Un grand sourire étire ses traits. Je me surprend à penser que ça lui va bien de sourire mais chasse cette idée aussi vite qu'elle s'est imposée à mon esprit. La conversation dérive rapidement sur des sujets de science jusqu'à ce que nous arrivions à destination. Pour l'instant, je préfère garder cet échange pour moi, sans vraiment savoir pourquoi…