CHAPITRE QUINZE : LA MORT D'EVA

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« F*ck you for leaving me when I f*cking needed you»

Noelia

Vous connaissez cette sensation de vide, la sensation qu'il y a un trou qui s'est creusé au milieu de votre cœur. La douleur d'une aiguille qui s'enfonce à l'intérieure de celui-ci. La sensation d'une déchirure comme lorsque l'on déchire une feuille de papier en deux ou que l'on fait tomber une assiette au sol et qu'elle explose en mille morceaux. Cette sensation n'est autre que le manque. Le manque d'une personne chère, d'une personne aimée et vous avez beau tout faire pour relativiser, vous dire que vous avez au moins eu la chance de la rencontrer, qu'elle a fait partie de votre vie, que vous avez pu passer de beaux et bons moments avec cette personne-là. Malheureusement pour vous, je suis obligée de vous dire que même avec ces paroles positives, lorsque le manque est installé et surtout de cette manière-là, je ne suis pas convaincue qu'un jour il parte ou qu'il fasse moins mal. Ce genre de sensation survient lorsqu'on s'y attend le moins. Bien sûr certaines fois, il est prévisible mais lorsque son effet est le plus violent, le plus destructeur, il n'est jamais prévisible et vous avez beau tout faire pour le diminuer, le retenir à l'intérieur, il ne part pas, il vous force à pleurer, à lâcher totalement le contrôle que vous avez sur votre cœur, votre corps et votre esprit, il vous force à ce que votre âme parle. J'aimerais bien vous rassurez en vous disant que le fait de pleurer aide, mais je n'en ai pas l'impression. Le fait de pleurer concrétise cette perte mais ne vous soulage pas pour autant.

Bien sûr avec le manque vient la colère, la colère de l'abandon même si dans notre for intérieur nous savons que ce n'était pas sa volonté de partir, mais l'absence et le manque vous font ressentir aussi cette part de colère. Bien sûr à la fin de la journée, vous vous en voudrez d'avoir ressenti cette colère, cette rage mais cela ne signifie pas que vous n'aimez plus cette personne bien au contraire. C'est dans ce genre de moment-là que vous vous rendez compte de l'amour que vous lui porter.

Et voilà dans quel état, je me retrouve aujourd'hui. Hier soir c'était l'une des premières fois que je me confiais sur ma sœur. Je me suis réveillée avec ce manque, son manque, ma sœur. Eva. Je suis seule dans l'appartement et je dois bien avouer que cela m'arrange. Je préfère être seule lorsque je suis dans cet état car ceux qui m'entourent ne comprenne pas comment réagir ou ne réagisse pas comme je le voudrais et cela me frustre encore plus.

Après voir pleurer dans les bras de Ryan, lui avoir parler vaguement de ma sœur et sur l'identité de mon père, je l'ai quitté. Je lui ai dit que j'avais besoin de me retrouver seule, d'être chez moi, d'être dans mon cocon et de me reposer. Il y avait eu beaucoup trop d'émotions, il y a eu trop d'événements et j'avais juste besoin de me retrouver. Ryan a eu de la peine à comprendre cela mais il a très vite compris que je ne lui laissais pas le choix et qu'il soit d'accord ou non n'allait pas changer mon envie de me retrouver seule.

Soudain on frappe à ma porte. Je m'arrête net, je soupire et lance un regard à ma tenue. J'ai un vieux short totalement délavé qui vire sur le gris et un t-shirt de rock avec des trous tellement que je l'ai porté. Je décide de ne pas faire de bruit et la personne derrière ma porte finira bien par partir. De seconds coups s'abat contre ma porte, je me demande combien de temps cette personne va insister.

- No' ouvre-moi cette porte.

Sa voix me stoppe net, comme si je bougeais encore. Je fixe ma porte comme si j'allais réussir à voir au travers de celle-ci et à me rendre compte que c'est bel et bien Ryan qui frappe.

- No' je sais que tu es là. Ouvre-moi s'il te plait.

Face à son insistance, je n'ai guère le choix d'aller lui ouvrir. Je me dirige donc vers la porte et l'ouvre. J'imagine que ma tête, mon visage ainsi que mes vêtements parlent à ma place car dès qu'il me voit, il me pousse un peu et entre dans mon appartement. Sans oublier au passage de me saisir par la taille et de m'amener dans le salon avec lui. Je pose immédiatement mes bras autour de sa nuque et viens loger ma tête dans le creux de son cou et je ne peux m'empêcher de sentir son odeur et cela me fait du bien. Il va s'asseoir sur le canapé tout en me gardant près de lui, je me retrouve donc assise à califourchon sur lui. Je ne bouge pas. Il caresse mon dos et ma nuque et dépose quelques bisous sur le haut de mon crâne.

- Si tu as envie de parler je suis là, si tu veux te taire je suis aussi là.

Il ne dit rien de plus et ne fait rien de plus. Il se contente juste de me garder près de lui. Je ne sais pas comment il fait pour savoir qu'aujourd'hui c'est un jour vraiment sans et que tout m'est difficile. Sans que je ne contrôle rien du tout, mes lèvres bougent et des mots sortent de ma bouche avant que mon cerveau ait le temps de les analyser.

- Elle me manque, elle me manque tellement putain.

Il ne répond rien, il se contente de rester silencieux et d'être là si j'ai envie de continuer ou si juste ses mots suffiront.

- J'avais une sœur jumelle, Eva, elle s'est fait tuer, il y a maintenant 3 ans environ.

Sans le vouloir ou sans m'en rendre compte, je lui explique mon histoire, je lui explique mon manque, son manque et cette partie que j'ai perdue. Je me sens obligée de me retirer de son cou pour plonger mes yeux dans les siens. J'ai besoin d'y puiser de sa force pour continuer mon histoire, pour parler de ce moment pour la première fois dans ma vie. Le regard qu'il pose sur moi est rassurant et remplis de bienveillance, cela m'encourage à me confier.

- Tu connais le monde d'où je viens à présent. Il devait y avoir un échange entre mon frère et un trafiquant de drogue. Je devais aller avec lui car à cette époque c'est moi qui m'occupais de vendre le stock. Bien sûr tous les boulots que j'ai dû faire pour mon père, rien n'était de ma propre volonté au contraire de mon frère. Enfin bref, je me suis énervée contre mon frère et mon père, mon rêve à moi était de partir de ce monde, pour moi je voulais vivre comme une fille normale avec une famille normale. C'est là qu'Eva intervient. Elle connaissait mon envie de liberté et elle m'a dit qu'elle allait aller à ma place et que je pouvais sortir avec Kate sans problème. Eva n'était pas non plus très fan de ce monde mais elle s'était faite à l'idée d'y vivre et d'en faire partir. Elle est donc aller avec mon frère. Mon frère était juste censé donner de l'argent et récupérer la drogue rien d'autre. Mais il a voulu prendre les devants et il a voulu menacer le trafiquant en ne payant que la moitié. Il voulait prouver à mon père qu'il était capable d'être son bras droit car à ce moment-là, c'était ma sœur qui l'était et qui était censée prendre sa tête une fois mon père parti. Bref le trafiquant ne s'est pas laissé impressionné par mon frère, et il a pointé une arme sur mon frère. Ma sœur en tant que bras droit de mon père a essayé d'arranger la situation, elle a essayé de calmer le gars et de faire entendre raison à mon frère. Bien sûr, il en a fait qu'à sa sale tête et il a sorti une arme aussi. Mon père ne nous donnait jamais d'armes même lorsque l'on vendait la drogue. Il disait que ça nous protégeait un peu malgré tout.

Tout le long de l'histoire, Ryan ne dit rien, il se contente de m'écouter. Par moment, lorsque je mentionne mon frère ou mon père, je le sens se tendre sous moi et je sens également ses mains se refermer autour de mes hanches mais elles se desserrent rapidement pour prodiguer des petites caresses lorsque je parle de ma sœur.

- Des coups ont commencé à partir de tous les sens, ma sœur a essayé de prendre l'arme de mon frère et une balle la percuter en plein cœur. Elle est morte sur le coup et l'homme est parti avec l'argent et la drogue. C'est à partir de ce moment-là, que je suis partie de leur monde car je ne pouvais pas pardonner à mon frère ce comportement idiot et la non-réaction de mon père face à la mort de ma sœur et face au comportement de Jeff. Et depuis ce jour, je ne cesse de me dire que c'est moi qui aurais dû aller à sa place et que c'est ma faute si elle a pris une balle dans la poitrine.

Je termine mon histoire sans avoir remarquer que des larmes ont coulé de mes yeux. Je le remarque seulement quand Ryan lève ses mains et vient essuyer le bord de mes yeux. Il profite pour saisir mon visage en coupe entre ses mains et rapproche nos visages l'un de l'autre. Il pose mon front contre le sien et bouge son nez contre le mien.

- Bébé, ce n'est pas ta faute, tu ne peux pas t'en vouloir. C'est ton frère qui a merdé et clairement merdé. Ta sœur avait le caractère d'un leader et elle a fait ce que n'importe quel leader aurait fait. Je sais que te dire de ne pas t'en vouloir ne va rien changer. Mais sache que tu n'es pas un monstre. Tu voulais juste t'enfuir de ce monde et rien que pour ça, je te trouve exceptionnellement courageuse.

À la fin de sa phrase, il vient déposer ses lèvres sur les miennes, tout d'abord dans un baiser chaste et par la suite il approfondit son baiser en forçant le passage de sa langue vers la mienne. Je l'accueil avec plaisir et envie. Soudainement, il me saisit les cuisses et se lève de mon canapé pour m'amener dans ma chambre. 

ANTOHER WORLDOù les histoires vivent. Découvrez maintenant