Chapitre 15

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Tristan et moi nous sommes quittés à contre-cœur il y a quelques jours en nous promettant de nous voir rapidement. L'idée de le faire venir à l'appartement m'a traversé l'esprit ; mais j'ai finalement décidé de ne pas lui donner de suite concrète. Après tout, Raiden pourrait être surpris de croiser un amant qui n'en est pas un.

Contrairement à ce que j'avais pu imaginer, les journées de calme dont je jouis grâce à l'absence de sollicitation pontificale ne me sont guère profitables. Je me retrouve à errer dans Rome sans but précis, à déjeuner avec des amies qui ne sont rien de plus que des relations de circonstances, à lire des livres qui ne piquent pas ma curiosité.

J'aimerais être un touriste, alors, dans cette sublime ville. Mais le cœur n'y est pas. Comme si l'épée, autour de mon cou, manquait. Comme si le voile jeté par la Sainte Église sur Rome ne me permettait pas de profiter de l'histoire qui l'habite. A moins que ce ne soit précisément l'absence des religieux qui m'empêche de voir Rome sous son meilleur jour.

Je pourrais, après tout, me remettre à travailler sur des traductions ou encore à écrire. Quelles activités futiles face à la haute fonction que le Vatican a pu me donner. Moi qui aspirais à la tranquillité, me voici en face de moi-même avec de bien trop nombreuses interrogations pour parvenir à goûter aux plaisirs de la quiétude.

Alors, je ne peux pas dissimuler ma joie en lisant ce matin ces deux messages, écrits au cours de la nuit. Le premier n'est autre que Tristan qui répond tout simplement à mes précédents mots. Nous nous écrivons tous les jours, sans nous embarrasser de l'heure ou du jour. Tout ceci est devenu continuel.

Le second est un rapide mot envoyé par Sœur Raphaëlle. J'ignorais même qu'elle avait un téléphone portable lui permettant de m'écrire. Le numéro étant caché par un système que je ne maîtrise pas, je la soupçonne d'avoir subtilisé le téléphone utilisé par le cardinal pour habituellement me solliciter.

Bonjour Sacha. Ici Sœur Raphaëlle. Nulle mission à te confier, uniquement pour t'informer que Sœur Miriam et moi dirigeons vers toi nos prières. Nous avons bien vu combien tu as été affecté par les dernières aventures que la très Sainte Église catholique est venue mettre entre tes mains. Nous espérons toutes deux que cette période de repos te sera bénéfique. Nous continuerons à prier pour le Protecteur. Le Saint-Siège sera toujours ton foyer, et la très Sainte Église catholique sera toujours ta famille. Mes pensées les plus sincères. Nous échangerons lors de notre prochaine entrevue.

En dépit de la profondeur des sentiments exprimés par les deux religieuses, je privilégie Tristan et lui rappelle que nous avons rendez-vous à dix-sept heures près de chez lui pour ensuite nous diriger au Gay Village. En cette période, ce petit festival très ouvert mais gay-friendly – contrairement à une partie de Rome ? – attire les foules.

J'ai pensé que faire découvrir à Tristan cet événement pourrait être une bonne idée, dans la mesure où il s'agissait bien de son intention initiale lors de notre rencontre près du Colisée. Il nous faudra nous y rendre en métro, que j'évite ces derniers jours, vu que je n'ai pas d'exigences spécifiques.

Répondre à Sœur Raphaëlle m'est hélas impossible, dans la mesure où le Vatican m'écrit depuis une espèce de réseau souterrain qui échappe aux opérateurs classiques. J'avais oublié ce détail au moment de commencer à rédiger une réponse. C'est après avoir écrit déjà deux phrases que je me suis souvenu.

Les derniers mots de Sœur Raphaëlle prouvent en outre qu'elle a parfaitement conscience de mon incapacité. Effectivement, je m'en fais ici la promesse, je ne manquerai pas de la remercier chaleureusement lorsque je serai de retour au cœur de la Cité léonine. Je suis particulièrement touché par ces pensées.

L'Éclatante revanche du Protecteur (BxB)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant