11. Discuter autour d'un café

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Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal,

mais par ceux qui les regardent sans rien faire.

- Albert Einstein.


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Le soleil frappe fort aujourd'hui. Il est déjà midi passé et Katsuki sent la paume de ses mains devenir de plus en plus moite alors qu'il traverse les rues du centre-ville de Musutafu. Son pas est lourd et ses iris à la couleur si particulière scrutent les alentours à l'affût du moindre mouvement. Il a oublié sa casquette et ses lunettes de soleil dans la voiture et tous ces cons qui se retournent sur son passage commencent à l'emmerder sérieusement. Il les foudroie du regard les uns après les autres, les défiant d'oser faire un seul pas dans sa direction, comme si les grognements rauques qui s'élèvent de sa gorge ne suffisaient pas à les repousser. 

Il est de mauvaise humeur. Si ses mains n'étaient pas dans ce piteux état la journée aurait été parfaite pour s'entraîner. Au lieu de ça, il s'est habillé ce matin d'un vieux pantalon cargo noir et de son T-shirt préféré, jetant un œil envieux sur sa tenue de héros toujours pendue à la tringle à rideaux de sa chambre, puis il a chaussé les bottes montantes de son costume avant de se rendre au point de rendez-vous imposé par le seul foutu collègue de travail à qui il ne peut rien refuser. 

Leur amitié n'a pas été facile à mettre en place mais au fil du temps et à force de se côtoyer tous les jours pour les entraînements, ils se sont finalement trouvés beaucoup de points de communs et ils se sont adaptés l'un à l'autre jusqu'à trouver l'ajustement parfait. Sur le terrain, même si les occasions sont rares, ils forment désormais un duo inégalable. La confiance doit rester intacte. C'est pourquoi ils répondent toujours présents à l'appel de l'autre. Mais bordel, aujourd'hui ça tombe vraiment mal. Katsuki avait d'autres projets et il sait qu'un retard auprès de l'estropié qu'il s'est chargé lui-même de surveiller pourrait tout foutre en l'air. Lui tenir la tête hors de l'eau s'avère plus délicat que prévu. Une seule seconde d'inattention suffit. Et des secondes d'inattention, il y en a des milliers, même s'il essaie d'être à ses côtés le plus souvent possible. 

Il ne les a pas compté mais les journées ont défilé et si d'extérieur sa relation avec Izuku ne semble pas s'être améliorée, il sent qu'il a passé un cap important avec lui. Depuis les dernières confidences, il le comprend un peu mieux. Ce qu'il manque à Izuku, c'est une présence. Quelqu'un pour le contempler bien en face et donner naissance à une véritable relation qui lui prête enfin la sensation d'exister. Un ami. Parce qu'on ne peut pas se rendre compte de sa propre existence lorsque personne ne nous regarde. Alors être obligé d'honorer un rendez-vous de dernière minute avec le fiancé de son mentor plutôt que de passer la matinée avec son protégé le plonge dans une frustration qu'il ne prend même pas la peine de contenir. Et frustrer Katsuki, ce n'est jamais une bonne idée. 

Soulagé d'apercevoir enfin la devanture du café où ils sont censés se retrouver, il parcourt la distance qui l'en sépare de quelques enjambées rapides et s'échoue sur une des chaises de la terrasse. Il n'attend pas longtemps avant d'être rejoint par un grand type à la silhouette élancée que personne ne semble avoir remarqué. 


- Salut Katsuki.

- T'es en retard.

- C'est toi qui es en avance. 

- C'est pareil.

- Comment tu vas ?

- Comme un cul coincé dans un string trop serré. 

DéliquescenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant