L'ombre de moi

Chapitre 12

TW: harcèlement, suicide, violence physique, vi0l. 

Je prends une grande inspiration et commence à tout lui raconter.

-Bon, je sais pas vraiment ce que je suis censée raconter, donc je vais tout laisser sortir comme ça me vient, ne me coupe pas s'il te plaît. 

Adam acquiesce. 

-Dernièrement il s'est passé énormément de choses dans ma vie, des graves et des moins grave tu vois. J'ai redoublé ma terminale, d'où le fait que je sois encore au lycée et pas toi... je...

Je fais une pause, je sais pas trop par quoi commencer, ni ce que je devrais éviter de lui dire. Il a l'air mature lui, j'espère qu'il comprendra. 

-Je suis sortie avec un mec en fin de terminale, celle de quand j'avais 17 ans, avant que je redouble. 

Pourquoi je précise ça c'est débile. 

-Bref, ce mec m'a demandé de lui envoyer des photos, il a pas mal forcé et j'ai finis par accepter, je lui ai envoyé des photos de moi en sous-vêtements, pas plus, pas moins. Le pire c'est qu'on m'avait prévenue de comment il est mais je n'ai pas cru cette fille qui m'en a parlé. Bref, il a partagé cette photo à tout le monde, et après il s'est mis à faire des montages ignobles, mais crédibles... m'a créé une réputation de trainée alors qu'on n'a jamais rien fait, que je n'ai jamais rien fais de plus que ces photos.

Adam ne dit rien, il me regarde et il écoute, son visage ne semble pas exprimer grand-chose. 

-Tout le monde m'a tourné le dos, je me faisais insultée de trainée dans tous les coins, même par messages, et de la part de gens que je ne connaissais pas. Alors j'ai arrêté d'aller en cours, j'ai pas passé le BAC, et j'ai redoublé. Mes parents ont cru que c'était le stress des examens qui m'ont faits péter un câble, ils ne savent rien. J'ai... je suis retournée en cours en septembre, même s'il n'était plus là, ses potes plus jeunes ont commencés eux aussi à refaire tourner des photos, pas seulement de moi mais de d'autres filles, toujours des montages d'ailleurs. Je... la nuit dernière j'en ai eu assez. 

L'homme me regarde avec un air interrogateur. 

-Je suis sortie me "balader", et j'ai sauté du pont, tu sais celui du parc. 

Il me regarde l'air ahuri. Ma gorge se noue, je fais une pause. Adam se lève et m'apporte un verre d'eau que j'avale d'une traite. 

-Merci... hum... du coup j'ai sauté, je pensais que tout allait se finir, que j'allais enfin être tranquille. Mais il m'a sorti de l'eau et a appelé les pompiers. 

-Il...? 

-Mon ex. 

Il se tait, et s'excuse de m'avoir interrompu, je reprends difficilement. 

-Il était mal en point aussi, à l'hôpital ils l'ont vu comme un héros, ma mère l'a remercié un millier de fois. Pratique vu qu'on était dans la même chambre. 

Mes yeux me piquent, est-ce que je vais réussir à tout raconter ? Mes yeux se remplissent de larmes je le sens. 

-Quand on a fini par être seuls, en pleine nuit, il s'est levé et il est venu me voir...

Je fonds en larmes, mais je continue.

-Il... il m'a frappé... il m'a touché...

Je tire mon pull, pour lui montrer les bleus sur mes épaules, sur mon torse, je le laisse deviner que je n'en ai pas qu'ici, en effleurant mes cuisses et ma poitrine. 

-Après il... il m'a déshabillée... et... et lui aussi...

Le visage de moins en moins passif d'Adam, se déforme en une expression étrange, mélange de haine, peur et tristesse.

-Il... il m'a volé... le peu de dignité qu'il pouvait me rester... ma vie, ma... il m'a dit qu'il avait enfin tout ce qu'il voulait de moi...

Je n'arrive pas à cesser de pleurer, au contraire cela s'intensifie. 

-Il ne s'est même pas protégé... rien... je... j'ai dû courir à la pharmacie dès cet après-midi, répondre à des questions auxquelles je ne voulais pas répondre... je vais devoir me faire dépister je ne sais même pas où ni comment... je...

Je m'abandonne alors à mon chagrin devant Adam, je me mets en boule dans le lit, sous la couette, et je ne fais que pleurer. Je regarde le jeune homme à côté de moi, il n'a toujours rien dit, ses yeux sont rouges, son visage déformé par la haine. Je crois avoir vu une larme rouler le long de sa joue.