Chapitre 3 - soignée

216 11 1
                                    

Le matin, c'était massage, l'après-midi étirements. Cette fois-ci Hermione savait parfaitement qui viendrait lui prodiguer ses soins. Drago pliait et dépliait ses membres avec des gestes doux et sûrs. Hermione commençait à se dire que la réputation du Petit Prince n'était pas usurpée.

Peu après son dîner, une soupe donnée cuiller après cuiller par l'aide-soignante, Hermione eut la surprise de recevoir la visite de son vieil ennemi dans sa chambre.

- J'ai fini mon service, je viens te souhaiter une bonne nuit.

- Bonne soirée ...je suis désolée pour ce matin.

- Ce n'est rien, j'ai l'habitude. Sois un peu patiente, tu vas la retrouver, ta sensibilité. Ta peau n'est pas encore complètement vascularisée.

Hermione eut un sourire un peu triste. Drago jeta un œil intéressé sur sa table de chevet.

- Tu en as reçu des friandises.

- Oui, tu veux un bonbon ?

- Je veux bien. Tu n'en as pas bien conscience mais tu récupères très bien. Ton pronostic vital était engagé, on a failli te perdre. Je suis heureux que tu t'en sois sortie.

Ron me quitte et Malefoy se réjouit que je ne sois pas morte. On marche sur la tête, se dit Hermione.


Le lendemain - mardi 10 mai

A condition d'oublier le passé, il n'y avait pas de raison d'être désagréable avec Drago. Il était un professionnel dévoué, comme l'ensemble du personnel de la clinique. De plus, elle était condamnée à le voir deux fois par jour. Autant que ça se passe bien.

- Tu travailles depuis longtemps ici ?

- Bientôt trois ans.

- Je ne t'imaginais pas te consacrer à ce type de carrière.

- Mon père non plus. Ce n'est pas très glorieux pour un Malefoy d'exercer une profession. Mais mon regretté père n'est plus là pour me dire à quel point je le déçois.

- Et ta mère, elle en dit quoi ?

Drago n'arborait pas la même expression, selon qu'il parlait de feu son père ou de Narcissa.

- Elle soutient mon choix parce qu'elle sait à quel point c'est important pour moi de ...

- De ?

- De faire quelque chose d'utile.

Drago parut troublé une seconde. Il étirait le bras d'Hermione.

- Tu me dis, quand ça devient douloureux.

- Ça va.

- Non ça ne va pas. Tu as tellement mal que tu transpires à grosses gouttes.

- J'ai envie de récupérer rapidement.

- Apprenez à respecter votre corps et ses limites Mademoiselle Granger. Le contraire serait contre-productif.

- L'oisiveté me rend folle. Je ne peux pas tenir un livre. Ni même une cuillère.

- Sans la magie, c'était des mois de rééducation qui t'attendait. Avec la magie ta guérison sera bien plus rapide. Mais il faut compter plusieurs semaines.


Le soir Drago passa dans sa chambre avec un chariot rempli de livres.

- Je ne sais pas ce que tu as envie de lire, alors j'ai pris un peu de tout : romans, biographies, grimoires, littérature érotique...

Hermione agita sa main droite toute recroquevillée.

- Tu penses que je vais bientôt pouvoir tenir un livre ?

- J'en suis sûr. En attendant, je vais te faire la lecture.

La jeune femme rougit.

- Quoi Granger ? Weasley va me casser la figure parce que je te fais la lecture ?

- Ron et moi sommes séparés.

- Je m'en doutais.

Face à son interrogation muette, il dit :

- Je ne le croise plus dans les couloirs. Beaucoup de couples ne résistent pas à ce type d'épreuve.

Brûlée et larguée. Il était au courant.

Parmi la sélection de Drago se trouvait quelques classiques moldus. Elle opta pour le Parfum de Patrick Süskind. Il commença la lecture.

Au XVIIIe siècle vécut en France un homme qui compta parmi les personnages les plus géniaux et les plus abominables de cette époque qui pourtant ne manqua pas de génies abominables. C'est son histoire qu'il s'agit de raconter ici. Il s'appelait Jean–Baptiste Grenouille et si son nom, à la différence de ceux d'autres scélérats de génie comme par exemple Sade, Saint–Just, Fouché, Bonaparte, etc., est aujourd'hui tombé dans l'oubli, ce n'est assurément pas que Grenouille fût moins bouffi d'orgueil, moins ennemi de l'humanité, moins immoral, en un mot moins impie que ces malfaisants plus illustres, mais c'est que son génie et son unique ambition se bornèrent à un domaine qui ne laisse point de traces dans l'histoire : au royaume évanescent des odeurs.*

Drago se demanda s'il y avait un message dans le choix de l'ouvrage. Plus jeune il lui avait reproché de sentir mauvais, avec une totale mauvaise foi**. Aujourd'hui il savait qu'elle portait le parfum Rose Sauvage. L'odeur était plaisante mais bien moins que son odeur corporelle qu'il avait eu tout le loisir de respirer pendant les soins.

Quand il quitta sa chambre, une heure plus tard, Hermione admit qu'elle avait totalement changé d'opinion au sujet de son ancien camarade de Poudlard.

**********************************************************

*extrait du livre le Parfum – Histoire d'un meurtrier – Patrick Süskind

**Si tu te demandes quelle est cette odeur, maman, je te signale qu'une Sang–de–Bourbe vient d'entrer ici – Harry Potter, tome 5 mais j'ai un doute.


LE CORPS EN FEUOù les histoires vivent. Découvrez maintenant