25 - Mieko Tsukiyama : Les origines

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Lorsque Toya disparu, ce fut comme si une partie de moi avait quitté mon corps, comme si mes fonctions primaires m'avaient abandonnée. Je ne savais plus comment vivre sans lui, lui qui représentait la seule personne qui avait une réelle importance pour moi. Je me sentais désemparée, comme si plus rien n'avait de sens loin de lui. Il comprenait, écoutait et partageait les mêmes souffrances que moi. Lorsque nous échangions, j'avais l'impression de me retrouver face à mon miroir, comme si je n'avais pas besoin d'utiliser la parole pour que nous puissions communiquer naturellement. Toya souffrait énormément des sévices que son père lui faisait subir, il semblait dénué de ton sentiment vis-à-vis de ses enfants, à croire qu'il ne les percevait que comme des machines, des objets créés pour lui succéder et accomplir ses propres rêves. Les entrainements dont il dispensait Toya étaient d'une difficulté sans nom pour un enfant de son âge mais il tenait bon, souhaitant avant tout pouvoir rendre fier son père et devenir aussi fort que celui-ci le voulait. Cependant, son alter était si puissant qu'il le rongeait de jour en jour, jusqu'à ce que son père ne se désintéresse totalement de son fils ainé, au profit du cadet de la famille. C'est à cet instant que le regard de Toya a définitivement changé. Sa rage grandissante nous séparait peu à peu l'un de l'autre et me provoquait des sensations que je n'avais jamais ressenties auparavant.

Nos alter ne représentaient pas notre seul point commun, nous partagions tous les deux une volonté de dépasser nos paternels pour leur donner tort et leur prouver notre puissance. N'ayant jamais contrôlé correctement mon pouvoir, j'ai creusé un large écart entre moi et les autres enfants, ce qui déplaisait fortement à mon père, ne se privant jamais de me rappeler que je n'étais qu'une déception de plus s'ajoutant à notre famille. Lorsque sa frustration ne se déversait pas sur moi, il se contentait de se défouler auprès de ma mère qui ne répondait que par des larmes et des excuses, encore, encore et encore. Elle n'était pas dotée d'alter et, même si elle possédait des capacités sensorielles très fines, mon père ne pouvait s'empêcher de lui rappeler que j'avais hérité de son inutilité, comme il le disait si bien. Cette situation était, je pense, l'élément qui me rapprochait le plus de Toya, qui nous permettait le mieux de nous comprendre en tout point et qui nous unissait d'un lien si puissant que je n'aurais jamais imaginé le voir se briser un jour.

Lorsqu'il décida de quitter ma vie, les choses sont devenues si difficiles pour moi que j'avais abandonné tous mes rêves, mes ambitions s'étaient envolées aux côtés de tous les sentiments qui pouvaient m'habiter par le passé. Je ne souhaitais qu'une seule chose, disparaitre pour enfin rejoindre celui que j'aimais. Ma situation familiale se dégradait à vue d'oeil, les cris avaient cédé le pas aux coups et l'environnement dans lequel je vivais était uniquement bercé par la haine et la peur constante, une situation que je ne supportais plus.

Un soir d'automne, enfermée dans ma chambre, je tentais de couvrir mes oreilles une énième fois pour ne pas avoir à subir les scènes que m'offraient constamment mes géniteurs. Je n'avais pas peur mais je sentais grandir au fond de moi une rage immense qui me consumait davantage au jour le jour. L'espace d'un instant, j'entendis un ultime coup et mon corps se mis à bouger de lui-même, sans que j'ai besoin de lui commander quoique ce soit. Je me retrouvais alors face à une scène des plus horrifiques. Ma mère, au sol, gisant dans son propre sang, sang que je pouvais retrouver sur les poings de mon père. Je sentais à cet instant chaque battement de mon coeur dans chacun de mes vaisseaux sanguins, il en était trop, je ne supportais plus de vivre dans ces conditions. Ce jour, dont j'aimerais ne plus jamais me souvenir, signa le premier épisode durant lequel je perdis le contrôle total de mon pouvoir, me laissant exploser, expulsant partout autour de moi des centaines de minuscules lames métalliques d'une finesse telle qu'elles pouvaient découper tout ce qui se trouvait sur leur route. Après cet assaut d'une violence insensée, je perdis connaissance instantanément.

Quelques heures après ce drame, j'ai été transportée en urgence à l'hôpital, grièvement blessée par ma propre attaque. Lorsque je repris mes esprits dans ma chambre, un homme des services sociaux ainsi qu'un policier m'attendaient à mon chevet et m'expliquèrent que mon père avait succombé à ses blessures. A la suite de cette annonce, je fus assaillie de nombreuses questions concernant la personne qui nous aurait attaqués. Evidemment, personne ne pouvait croire qu'une enfant avait commis de tels actes et encore moins avec autant de dégâts, d'autant plus que je m'étais infligé des blessures immenses. La piste de la police m'excluait donc totalement de cette histoire à l'origine.

Ce n'est que quelques jours plus tard, lorsque ma mère repris elle aussi connaissance, qu'elle raconta la vérité à la police. Elle avait reconnu les marques que mon alter provoquait et me dénonça sans le moindre scrupule. Moi qui nourrissais enfin l'espoir de vivre en paix avec elle, loin de toute violence et tristesse, elle prit la décision de définitivement me renier ainsi que tout son passé la rattachant de près comme de loin à notre famille et, lorsque la police et les services sociaux avaient retenu sa déposition, on m'annonça alors que j'allais être placée dans un foyer et je ne revis jamais ma mère depuis ce jour, qui disparut si vite des radars que personne n'entendit plus parler d'elle.

Après ces évènements, je n'ai pas utilisé mon alter pendant un très long moment, ce qui accentua mon retard avec les gens de mon âge mais, j'avais associé ce pouvoir à tant de drames que je n'étais plus capable de m'en servir sans nourrir une peur immense. Je passais le plus clair de mon temps enfermée dans ma chambre, à me noyer dans de nombreux ouvrages à n'en plus savoir compter. Mon rêve de devenir une héroïne s'était terré au plus profond de ma mémoire. Je préférais oublier cette idée car moi-même, je me voyais tel un monstre ayant fait disparaitre tous les membres de sa propre famille. Pourtant, un jour, lors d'une promenade en ville, je fus interpellée par une foule qui semblait s'être ruée devant des postes de télévision. Lorsque je réussi à me rapprocher et distinguer ce que ces personnes regardaient avec tant d'attention, tous mes rêves revinrent alors à la surface. Le symbole de la paix avait encore fait parler de lui lors d'un combat d'une violence rarement constatée. C'est alors que je compris. La violence, nous l'utilisons au même titre que les vilains, pour nous sauver et sauver ceux que l'on aime, pour préserver des vies innocentes, nous n'avons pas le choix. Mon action face à mon père n'était pas un crime mais simplement un acte pour me défendre et tenter de sauver ma mère qui ne faisait qu'encaisser des coups, toujours plus violents les uns que les autres. A la vue du combat d'All Might, mes espoirs finirent par me regagner, c'est alors que je décidai de me noyer dans les études afin d'intégrer la filière héroïque la plus réputée du pays.

Je ne suis pas arrivée à UA par la force du saint esprit, j'ai travaillé et mérité ma place autant que quiconque dans ce lycée. Néanmoins, les nombreuses attaques de mes camarades, informés sur mon passé me desservait et finissait par prendre le dessus sur le semblant de confiance que j'avais réussi à bâtir. L'altercation durant le championnat avec mon camarade n'a fait que réveiller une haine que j'avais enterré au plus profond de mon être et, à la simple seconde où il prononça ses derniers mots, tous les sentiments que j'avais ressenti durant ce soir d'automne me revinrent et prirent le dessus sur mes actions. Ce qui signa la fin de notre duel par ma disqualification.

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À suivre...

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⏰ Dernière mise à jour : Aug 08, 2023 ⏰

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