𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟏𝟖 : 𝐃𝐞 𝐯𝐫𝐚𝐢𝐬 𝐚𝐦𝐢𝐬

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Le coucher du soleil avait déjà dompté le bleu du ciel, créant une couleur oranger que je prenais sans relâche l'habitude de regarder chaque jour qui défilait sur le calendrier depuis qu'elle est parti. 

— Je savais que je te trouverais ici, dit une voix que j'avais directement reconnu. 

Je me tournai vers Draken, mon meilleur ami et lui sourit en guise d'affirmation.

Il semblait d'un coup extrêmement heureux. Ce que je ne compris pas alors, je lui lançai un regard interrogateur. 

— Est-ce que tu voulais me voir ? Lui demandais-je.

Il ne venait jamais ici avec moi. Je partais tous les jours à cette plage seule depuis cinq bonnes années et Draken avait dû venir au minimum quatre fois — en comptant sa visite d'aujourd'hui —.

— T'as tout compris ! M'affirma-t-il en plaquant son dos contre la barrière sur laquelle j'étais assis. Il avait aussi installé nonchalamment ses bras dessus.

Je restai silencieux en attendant la suite de ce qu'il a à me raconter.

Sa main se promena dans la poche de son large pantalon noir et il en sortit des tickets de couleur bleus. Je n'avais pas pu voir ce qui était écrit dessus vu qu'il avait soigneusement disposé ses doigts sur l'encre sombre.

— Tu vois, on est en vacances demain, commença-t-il pour le suspense.

— Oui ? 

— On a deux semaines de vacances.

— Oui ?

— On a du temps.

— Oui ?

Il me stresse à être aussi lent pour annoncer quelque chose, pensais-je.

Tout à coup, il fit une rapide rotation afin que nos visages soient face à face et il me tendit les deux petits tickets bleus, un sourire impatient aux lèvres.

Je l'observai quelques secondes en fronçant les sourcils. Mais si je veux savoir ce qu'il avait de si important à me dire, il fallait que j'accepte les papiers qu'il m'offrait. 

Ainsi, c'est ce que je fis. Mon index et mon pouce attrapèrent son cadeau puis je lui jetai un dernier coup d'œil avant d'apporter toute ma curiosité sur ce que je tenais entre les mains.

J'avais directement compris, en sentant la texture et les graphismes d'écriture, que cela s'agissait d'un billet d'avion pour le Canada.

Mes yeux s'élargissent et je levai la tête vers mon ami.

Putain... je n'en reviens pas. Il a vraiment fait ça ?

Il passa brusquement un bras autour de mon cou et approcha mon visage de son torse en criant presque :

— Inupi, tu vas revoir ta dulcinée ! Grâce à qui ? Grâce à moi ! 

Il me gigota dans tous les sens pour m'embêter et je répondis avec une voix étouffer, car son emprise m'empêcher de respirer correctement :

— Oui, merci, mais lâche-moi, tu m'étrangles !

Je vais revoir Emina, c'est certain ! Elle me manque tellement, il n'y a pas un jour où je ne pense pas à elle. Cela fait maintenant cinq ans que je ne l'ai pas revu et pourtant... je l'aime sans désemparement. Emina nous envoie quelques fois des courriers à moi, Draken et sa mère. Nous sommes restés en contact avec sa génitrice et, elle va beaucoup mieux. Elle a réussi à faire son deuil et nous avons fait part d'aide envers elle. C'était probablement grâce à nous qu'elle allait bien, enfin, je l'espère...


— Bonjour, Miyazaki-san. 

Ma voix était douce et respectueuse. Je n'avais donné aucune expression sur mon visage quand la femme assise par terre, sur ses genoux, se tourna vers moi, l'air incrédule. 

— Seishu ! Me sourit-elle en discernant ma silhouette. Que fais-tu ici ?

Je l'observai quelques instants. Elle ressemble de plus en plus à Emina. 

— Je suis venu voir Akane.

Elle savait très bien de qui je parlais alors, elle se contenta de me sourire.

— N'est-ce pas la date de l'accident, aujourd'hui ? Me demanda-t-elle en remettant son regard vers la pierre tombale devant elle.

— Vous avez une bonne mémoire, lui sortais-je. 

Un nouveau sourire étira ses lèvres, faisant ressortir ses quelques rides avant qu'elle ne se lève en appuyant les paumes de ses mains contre ses cuisses afin d'avoir plus de facilité à mettre les deux pieds sur terre.

— Alors, Ken t'as donné ton cadeau ? 

J'écarquillai les yeux face à sa demande. Elle était au courant ? Je sais que nous sommes assez proches avec la mère d'Emina, nous sommes presque ses enfants mais... je ne pensais vraiment pas que Draken allait lui informer cela.

— Comment...? 

Elle déposa un doigt sur ma bouche pour me couper la parole, elle annonça :

— J'ai fait partie de ces économies. Ken et moi avons économisé pour toi depuis le départ de Emina, sans que tu le saches. 

À cette information, je me raidis. J'étais quasiment prêt à pleurer avec cette journée pleine de surprise et de révélation. Mais je me retins, comme d'habitude.

— Je ne viendrai pas avec vous, je ne peux pas. Mais vous avez intérêt à faire des photographies avec Ken !

Je lâchai un léger rire. J'avais oublié que nous avions que deux tickets. Mais, déjà, deux tickets d'avion du Japon jusqu'au Canada, c'est excessivement cher. Ils ont économisé cinq ans pour moi sans que je sois au courant. Ce sont vraiment des personnes en or.

— Oui, bien sûr, lui répondis-je.

Encore une fois, elle montra sa joie à travers son visage et me tapota l'épaule en me disant :

— J'espère que tu retrouveras Emina.

Emina ne nous a jamais communiquée son adresse. On savait juste qu'elle habitait dans la ville de Beaconsfield, avec sa colocataire — sa meilleure amie — nommée Motome Naonobu. Elle nous a aussi fait savoir qu'elle travaillait dans un magasin de fabrication de chaussure et qu'elle en était la responsable. J'avais assez de renseignement sur elle pour la rencontrer après toutes ses années.

La femme était d'ailleurs au courant que j'étais amoureux d'Emina. Je ne lui ai jamais dit, mais c'était elle qui l'avait deviné toute seule, comme Draken.

Ça se voit autant que ça quand on aime réellement quelqu'un ?

— Il n'y a pas de raison que je ne la retrouve pas, lui répondis-je, l'air déterminé. 

La femme ébouriffait mes cheveux à présent longs jusqu'aux épaules et traça sa route en me souhaitant un très bon voyage. 

À suivre...

𝙏𝙖𝙠𝙚 𝙖 𝙬𝙖𝙡𝙠 ⸢Seishu Inui/Inupi x OC⸥Où les histoires vivent. Découvrez maintenant