Je prends le large.

5 0 0
                                    

Je crois que je me sens un peu trahie, ces derniers temps, par tous ces livres, tous ces films, toutes ces histoires sous différentes formes, qui t'apprennent que si tu souffres assez, à la fin, ta relation fonctionnera et en vaudra la peine. Je pense que si j'avais moins cru à ces conneries tout au long de ma vie, j'aurais pu me montrer plus de respect d'années en années. Au lieu de ça, j'ai simplement laissé les personnes qui m'entouraient me bafouer, me trahir et me dénigrer sans jamais leur en tenir rigueur. Du moins pas trop longtemps. Pas assez pour que ce soit marquant. Pas assez pour qu'ils comprennent que je pouvais partir. Et tout le problème était là, d'ailleurs : je ne le pouvais pas. Parce que si je me battais assez pour nous, alors notre relation finirait par devenir plus facile, et alors avoir souffert de ce qui ressortait de nous ne compterait plus, puisque j'aurais atteint le bonheur.
Un tissu de mensonges. Une montagne de conneries.
Je pense que c'est ce qui fait la faille de la majorité des relations que j'ai perdu avec le temps. J'ai été prise pour acquise, j'ai lassé les gens. Ce qu'on avait ne valait pas le coup de l'entretenir vraiment, j'étais là, une constante, je ne m'en irais jamais. On pouvait me manquer de respect, manquer de considération à mon égard, ne pas me parler pendant six mois et revenir en me demandant service. Ils me trouveraient là, au même endroit où ils m'avaient laissée. C'est vrai. Ils le pouvaient. Amis, amours, famille, qu'importe. Je suis la fille au caractère compliqué à gérer mais sur laquelle on peut compter, celle fidèle, celle loyale, celle qui n'abandonne pas. Celle qui attend. Accepte les départs qui lui tordent le coeur, pleure pendant des mois et t'accueillent bras ouverts, comme une délivrance, quand tu reviens lui donner de l'importance.
Ça va même plus loin que ça, j'ai beau les haïr de toutes mes forces, l'amour que je leur porte malgré ça reste plus fort. Et j'accepte l'inacceptable. Je tolère l'intolérable. Ils savent ce qu'ils font, ils me connaissent. Ils sont biens conscients de leurs actions, des choses que je disais ne jamais pouvoir imaginer accepter. Et eux qui me rassuraient, qui promettaient des "ne t'en fais pas, ça n'arrivera jamais avec moi" puis qui t'emmenent ensuite sur les pentes de ce que tu détestes, mais que tu ne peux quand même t'empêcher d'accepter un peu, si c'est eux.
Je commence cette nouvelle année avec beaucoup d'amis en moins. Beaucoup de relations de tout types en moins. Parce que je crois que je suis enfin épuisée. Épuisée des manipulations, volontaires ou non, conscientes ou non. Mais surtout épuisée de la négligence et des silences. Des silences qui me fracassent le crâne de questions incessantes, et qui me remettent en cause alors que je sais, je suis convaincue, que j'ai fait tout ce que je pouvais. Alors c'est fini.

C'est fini.

Je prends le large. Je n'attends plus. Et ce ne sera plus à moi de ramer pour les rattraper. Je les laisse sur le port, sans dire au revoir et surtout sans me retourner. Sans regrets.

Petites penséesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant