Parce que je t'ai aimé si fort.

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Parfois, je pense à toi. Je me replonge dans nos vieux souvenirs et je m'interroge. Est-ce que tu bois toujours ce faux café dans cette tasse précise pour commencer ta journée ? Celle qui a la taille parfaite pour la dose parfaite, tu sais ? Est-ce que tu te mouilles toujours la tête pour pouvoir te coiffer en oubliant de rapprocher la serviette pour t'essuyer ? Est-ce que tu laisses parfois encore le moustique que tu viens d'éclater sur le rebord de ta fenêtre en espérant donner exemple aux autres ? Est-ce que tu as toujours ce rire d'enfant qui faisait fondre mon coeur et me faisait rire avec toi ? Est-ce que, en découvrant un nouveau morceau de rap, tu essaies toujours de chanter en même temps que le rappeur en question ? Et quand tu n'y arrives pas, est-ce que tu rembobines encore ? Est-ce que tu mouilles toujours ta brosse à dent après le dentifrice ? Et puisque tu ne peux pas le savoir, c'est ce que je fais aussi maintenant. Est-ce qu'avant de dormir tu regardes toujours tes vidéos sur YouTube ? Et est-ce qu'il y a encore les chaînes que l'on regardait ensemble ? Est-ce que ça te manque parfois ? Parce que, ça me manque, parfois. Regarder en douceur ces vidéos diverses, rire ensemble, un moment de tendresse. Et est-ce que quand tu passes devant un miroir, tu as encore ce tic de te regarder et d'ajuster tes mèches rebelles ? Utilises-tu toujours le même parfum ? Tous ces petits détails de toi que je connaissais par coeur, ces petites habitudes, ces attitudes qui n'appartenaient qu'à toi, ces mimiques... Est-ce que je te reconnaîtrais si je t'avais en face de moi plus d'une heure ? Parfois, tu sembles être à mille lieues de ce que j'avais connu de toi.

Et puis il y a ces pensées parasites qui viennent me torturer, parfois. Est-ce que tu lui jettes des stylos pour l'embêter, comme tu le faisais avec moi ? Est-ce que tu joues à la bagarre avec elle aussi ? Est-ce que tu la taquines de la même façon que moi ? Est-ce que tu l'enlaces, est-ce que tu l'embrasses, avec la même fougue et la même puissance que tu me transmettais ? Est-ce que tu ressens la même chose qu'avec moi quand tu la prends dans tes bras durant les soirées films ? Est-ce qu'il manque quelque chose ? Est-ce que c'est mieux ?
Et à quoi tu penses quand tu m'imagines avec un autre que toi ? Quand je mets du temps à te répondre, moi qui sautais sur le téléphone pour toi ? Imaginer que je suis heureuse avec un autre que toi, que j'embrasse un autre que toi, que je fasse l'amour à un autre que toi, que j'en aime un autre que toi... Qu'est-ce que tu ressens ? Il y a tant que choses que nous avons partagés, tous les deux. Tant de premières fois qu'on ne pourra jamais recommencer. Pas en tant que réelle première fois. Et quand j'y pense, et malgré tout, je ne regrette pas d'avoir fait de toi le premier compagnon de vie de mon existence. On était jeunes, on a fait notre temps, on l'a fait maladroitement mais on était bien quand même, jusqu'à ce que tu changes de trajectoire.

Quand on dit que l'amour meurt, c'est faux. Quand une histoire a compté comme la nôtre a compté pour moi, peu importe la suite des événements, ce que j'ai pu ressentir de mauvais à ton égard, ce qu'il s'est passé et la façon minable dont ça s'est fini, l'amour ne meurt pas. Jamais. Il se transforme, il évolue en quelque chose d'autre. Une affection certaine, un attachement fort, une tendresse persistante. Mon coeur ne bat plus de cet amour si particulier que j'avais pour toi. Je ne suis plus amoureuse de toi. Mais il y a nos souvenirs. Et ils me rappellent, maintenant que la colère s'efface doucement, qu'un jour nous avons été heureux. Que j'ai eu la chance de vivre cette première véritable relation avec le garçon que tu as été. Que j'ai pu grandir en compagnie d'une personne qui m'a aimée, respectée, soutenue. Quand je regarde en arrière, il n'y a rien que j'effacerais mis à part ces derniers mois. Pas la rupture, non. L'après rupture, oui. Mille fois oui. Quitte à changer complètement la façon dont moi j'aurais eu à gérer les choses. Quitte à prendre des décisions drastiques à l'époque malgré tes réactions. J'aurais dû mieux savoir, mieux faire. Mieux me protéger.
Parfois ma gorge se serre en pensant à ces projets avortés que nous avions. À ces souvenirs que nous ne créerons pas ensemble. Et l'idée de ne plus avoir ma place dans tes souvenirs nouveaux m'atteint encore parfois. Parce que d'un quotidien avec toi pendant tellement d'années, nous sommes passés à deux vies qui diffèrent complètement l'une de l'autre et dont nous ne savons presque plus rien. Je ne veux pas devenir l'inconnue de la personne qui me connaissait le plus, le mieux. Et ça me semble pourtant inévitable. On s'observe de très loin, et on change, sans vraiment se perdre de vue non plus. Paradoxalement, sans vouloir te perdre, j'ai peur d'être trop proche de toi et de me confronter au vide intense de ton contact qui autrefois me comblait parfaitement. Parce que, des choses comme celles-ci qui changent, c'est une explosion de douleur.
Il y a des soirs, comme une enfant, où je regarde la lune en espérant que tu la regardes aussi. Pour qu'une connection même minime forme un pont de mon coeur à ton coeur, qu'on se retrouve au milieu et que je puisse te prendre quelques secondes dans les bras quand mon âme pèse lourd sur mon corps. Quand j'étouffe de ce trop plein d'un je-ne-sais-quoi qui me pousse à prendre mes valises et à partir loin dans des ailleurs que je ne connais pas. Qui m'emmène loin de mon monde, avec quelques vêtements dans mon sacs et mon chien avec moi. J'aimerais que tu me conseilles, que tu me rassures, que tu sois l'ami que tu as toujours été en plus de cet autre rôle que tu as rompu. C'est mon ami qui me manque. Un ami dans la vie duquel je n'ose pas tellement faire d'apparition. Un ami que je laisse partir dans le chemin inverse à moi. Heureusement la terre est ronde, un jour peut-être le retrouverais-je vraiment au centre du monde.
Tu sais, peu importe la finalité des choses, je n'ai pas de regret concernant notre amour. Parce que j'ai pu trouver ta chaleur qui me guérissait de tout quand j'en ai eu besoin. J'ai pu être guidée par la lumière qui émane de toi quand je me sentais perdue. Tu étais mon phare dans la nuit, le port où m'ancrer et j'ai la faiblesse - ou la tendresse mais peut-être est-ce la même chose - de croire que, malgré le fait que j'ai repris la mer, que je voyage et que je trouve d'autres ports où poser l'ancre... oui que malgré ça, je saurais toujours retrouver mon chemin vers toi si un jour je me perds de nouveau. Parce que sans ne plus être mon grand amour, tu seras toujours mon grand ami. Un membre à part entière de ma famille, quoi qu'en disent les grands penseurs qui clament qu'on ne reste jamais en bon terme avec quelqu'un qu'on a aimé si fort. C'est parce que je t'ai aimé si fort que je ne peux pas imaginer te perdre dans toutes les autres versions de nous.

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