Partie 3: Impressions, la bande

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-Richard-

Je m'éloigne, furieux. Je n'en reviens pas de m'être énervé à ce point. C'est la première fois que je suis confronté à un être aussi effronté. Plus j'y réfléchis, plus je me rends compte que j'aurais dû m'y préparer. J'ai été négligent. Ma réaction disproportionnée en est la conséquence. Loin de m'inquiéter, ce détail m'amuse.

Elle a réussi à me faire sortir de mes gonds.

Une tension incongrue me fait froncer les sourcils. Intrigué, je pose la main droite sur ma mâchoire. Ce que je sens m'étonne intensément. Je reviens progressivement de ma stupéfaction et l'accentue. Je souris réellement.

-Lara-

Je suis rentrée après l'incident. J'étais trop choquée pour travailler efficacement. Trois heures plus tard, je n'ai toujours pas décoléré. Non mais quel toupet ce type ! Quelle arrogance ! Gentleman ya kouanga na foufou (mon œil) ! Non mais, quelle idée d'être malpoli avec un physique pareil ?

Suivant une logique toute personnelle, je trouve les défauts moins offensants lorsqu'ils correspondent aux caractéristiques physiques de l'individu qui les porte. Je pardonne plus facilement les manquements d'une personne laide, pour compenser en quelque sorte. C'est une façon de rétablir l'équilibre. Lorsqu'on ressemble à un croisement entre Jason Morgan et Chris Hemsworth, on se doit d'entretenir les illusions des jeunes filles. Ça devrait être inscrit dans le code de survie de Lara ça ; à l'article 15.

Sérieusement, il ne devrait pas être permis à un éphèbe de débiter des horreurs pareilles, wana mélange ya wapi ? (c'est quel mélange ça ?) Je dois me calmer ; il faut que j'arrête de penser à lui. Vite dit, vite fait ; je le réduis en esprit à ce qu'il est, c'est-à-dire un individu grossier et prétentieux, un épiphénomène qui ne mérite pas même une once de la plus petite de mes pensées, bien après l'anniversaire de mariage d'Elton John, entre Secret Story et la poubelle communale !

Je me sens beaucoup mieux après cette résolution. Je finis mes devoirs sur la table basse du salon-kitchenette-salle à manger, nettement moins confortable que les tables chaises de le BU. Tout ça par la faute de cet énergumène ! S'il ne s'était pas mis en travers du chemin comme une vache au milieu d'une route départementale, je n'en serais pas là!

Interloquée par la virulence de ma réaction, je m'arrête, interdite. Pourquoi est-ce que je réagis aussi violemment ? Je me calme pour réfléchir, et j'essaie de mettre de côté mon orgueil et mon indignation, pour être honnête vis-à-vis de moi-même. Ok, il a été odieux, mais n'ai-je pas également une part de responsabilité dans cette affaire ? Au fond, si je ne m'étais pas conduite aussi imprudemment, je ne me serais pas cognée contre lui. Et que dire de mon comportement ensuite ? Je l'ai agressée en étant consciente qu'il n'y était pour rien. Parce que j'avais peur et qu'il me rendait nerveuse.

Je suis morte de honte rétrospective. Est-ce bien moi qui me suis conduite de façon aussi injuste ? Sans compter que j'ai fait preuve d'une impolitesse rare, ce mec était quand même mon aîné de plusieurs années ! Dire que la plupart du temps, je suis d'un tempérament égal ; « madame self-control », un surnom qui me colle à la peau depuis le collège ! Autant pour mon ressentiment. Je grimace, on dirait que je lui dois des excuses.

Tout ça ne me dit pas pourquoi j'ai réagi aussi violemment, ma peur ne peut à elle seule justifier mon comportement. Ce n'était pas le même type de terreur. La douleur qui me transperce les paumes me pousse à baisser les yeux sur mes mains. Je constate avec étonnement que j'ai les poings serrés. Me dominant, je les desserre lentement. Trois fois dans la même journée. C'est vraiment une journée pourrie.

Âmes Sœurs Tome I: Nous?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant