Prologue

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Ce n'est qu'une question de secondes, une infime poignée de secondes, suspendue dans ce moment qui semble s'étirer à l'infini, avant que ce monstre n'assène un dernier coup, mortel cette fois-ci, à sa jeune amie. Elle est couverte de sang et ses beaux yeux verts, d'ordinaire si chaleureux, se sont refermés au monde. Elle est probablement déjà inconsciente.

Non. Pas encore. Pas déjà, par pitié ! Les pensées se bousculent dans la tête de la petite elfe, impuissante face à cette scène. Elle est à bout de souffle, elle tremble et se tient à genoux, incapable de se reprendre. Elle doit impérativement trouver en elle une flamme nouvelle et venir en aide à son amie. Respirer. Se relever. Retrouver sa concentration.

La terrible créature se rapproche prudemment sur ses huit horribles pattes, bien décidée à en finir avec sa victime. Il faut agir, maintenant ! Si quelqu'un meurt encore par sa faute, à cause de sa négligence, elle ne s'en remettra pas, pas cette fois. Mais elle aussi est couverte de plaies, certaines bien trop profondes. Ses forces la quittent, un froid insidieux s'installe en son sein, ses yeux se ferment. Le bruit du vent dans les arbres alentour est presque apaisant et l'emporte loin dans ses souvenirs, loin, si loin, devant une petite maison aux volets bleus. Et si elle entrait ? Juste un instant, juste pour tous les revoir, une dernière fois. Juste quelques minutes... En cet instant, elle ne désire rien de plus au monde. Pourtant, une voix, réconfortante comme un feu ardant au cœur de l'hiver, retentit dans sa tête. "Lève-toi ! Sauve la ! La flamme ne t'a jamais quittée, elle brûlera toujours en toi ! Lève toi ma fille. Maintenant.".

Toujours étendue au sol, Nepthys n'a aucune idée de l'imminence de sa mort, elle n'émet aucun signe de vie. La gigantesque araignée, prête à fondre sur sa proie agonisante, ses mandibules claquant de délice, est soudain comme figée. Un bruit odieux, aigu, comme mille violons désaccordés hurlant à l'unisson, se met à sourdre dans son crâne, une lancinante symphonie la paralyse. Debout, le menton haut, ses douces prunelles azuréennes désormais incandescentes de rage, Siloé fixe la créature et prononce l'incantation, un rictus aux lèvres.

Les voyages d'une Barde : le Luth et la SorcièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant