Chapitre 8 : Hallucinations.

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- NaSoon ?

La jeune femme n'avait pas remarqué qu'elle était déjà arrivée devant le dojo. Persuadée que le papa poule de service l'avait attendue devant la porte, ne pouvant trouver le sommeil sans la savoir en sécurité, elle leva les yeux vers la silhouette renfoncée dans l'ombre de la nuit. 

Elle écarquilla les paupières quand la figure se rapprocha, plus grande, plus longiligne que celle trapue et musclée de TaePyeong Finalement, le visage de son interlocuteur apparut, faiblement éclairé par la lumière des étoiles. 

Elle l'avait aperçu plusieurs fois dans la semaine, mais jamais l'illusion ne lui avait adressée la parole, ni n'avait été si claire, disparaissant avant qu'elle ait eu le temps de se pencher sur ses traits.

Les yeux ébènes de KiMoon, si énigmatiques, n'avaient pas changé. La lueur nacrée du croissant de lune s'y reflétait, leur donnant une aura nostalgique, en accord avec le caractère féérique de ces retrouvailles. 

Une mèche tombait sur son œil gauche, plus décoiffée et ondulée qu'à leur dernière rencontre. A bien y penser, songea NaSoon, leur teinte gris perle était plus profonde, plus sombre, donnant à son look un air délavé plus ancré dans la réalité. Il avait troqué ses vêtements immaculés contre un jean bleu marine, un sous pull gris et un gros pull noir, dont il manquait une bonne partie. Où avait-il trouvé ces fringues ? Dans les poubelles ? 

Mais malgré ça, KiMoon était toujours aussi élégant que dans ses souvenirs. La blonde souffla, fallait-il vraiment qu'elle hallucine maintenant ? Elle avait tout fait, jusqu'à embrasser ChulHei. Était-ce la culpabilité qui jaillissait à nouveau ?

- NaSoon ? retentit la voix de KiMoon, aussi détestablement douce qu'un an auparavant. Je...

La blonde n'avait aucune envie d'assister à la suite de cette élucubration de son esprit malade. Elle pressa le pas et ouvrit la porte du dojo, convaincue qu'elle n'avait qu'à rentrer et se passer de l'eau sur le visage pour que le mirage s'estompe. 

Elle ferma bruyamment derrière elle avant de s'adosser contre le bois, lessivée, et soupira un grand coup, tremblante comme une feuille.

- Mais qu'est-ce qui m'arrive, à la fin ? grogna-t-elle, les rétines brûlées par l'apparition soudaine de l'homme auquel elle s'empêchait tout le temps de penser.

- Tu as dit quelque chose ? retentit la voix de l'homme en question.

NaSoon glapit et s'éloigna de la porte, un couteau imaginaire dans la main. L'illusion persistait ? Elle allait devoir employer les grands moyens. Ça n'était pas le moment de fuir. 

L'étudiante ouvrit la porte et replongea à nouveau dans la rue, l'air hautain, le torse gonflé, pour se poster face à un KiMoon déconfit.

- Alors, comme ça, tu penses que tu peux continuer à me suivre ? entonna-t-elle en empruntant le timbre grave qu'utilisait ChulHei pour terroriser Hyo.

Même à moitié mangé par l'obscurité, le visage de KiMoon perdit quelques couleurs.

- Je... enfin... c'est-à-dire que je...

NaSoon leva la main en l'air, les sourcils froncés, ignorant l'adorable manière dont les sourcils du garçon convergeaient l'un vers l'autre, dans l'incompréhension la plus totale.

- J'ai tourné la page, mon p'tit m'sieur, continua-t-elle. Tu peux me faire le coup du joli minois qui réapparait, les yeux de biche en prime, ça ne prend pas sur moi. Repars d'où tu viens !

Le regard de KiMoon se teinta d'une nuée de tristesse, faisant fonctionner l'empathie à plein régime.

- Je... Hyo ! s'exclama le garçon en baissant les yeux sur un amas de fourrure ronronnant comme un moteur Diesel qui se frottait à ses jambes.

Quand la brume tombeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant