Message du Capitaine

333 38 30
                                    


 J'écris ces mots le mercredi 25 janvier 2023. J'ai besoin de vous parler.

Ces derniers temps, je traverse une période un peu compliquer, qui a autant de bon coter que de mauvais. Je suis en transition. J'ai senti le besoin de faire le point sur certaine chose dans ma vie dont l'écriture.

J'ai réalisé que j'écrivais depuis environ dix ans. J'ai fêté mes vingt-trois ans cet été, et avec le recul, je me suis rendu compte du chemin parcouru et du chemin que je dois encore entreprendre. En dix ans, je suis passé d'une préado mal dans sa peau, complexée par ses Dys, incapable de faire lire ses textes à une jeune femme heureuse d'enfin pourvoir emporter avec elle d'autre aventurier dans le sillage de ses voyages extra-ordinaire. Lorsque je relis mes premiers textes, je suis émue. Ils sont criblés de faute, pratiquement illisible, écris en phonétique, aux règles de mise en page complètement absente et à l'immaturité palpable. Je ne dis pas cela dans une fausse modestie déplacer. Je veux vous faire comprendre que je reviens de loin, de très loin, quant à mes aspirations d'écrivain. Mes anciens textes sont tout bonnement affreux et laids. Cependant, ils sont le balbutiement nécessaire pour arriver jusqu'à aujourd'hui.

Je me suis construite à travers eux, petit à petit, empruntant parfois des directions absconses et irréfléchies toujours dans le souci d'apprendre et de me perfectionner. En tant que Dyslexique et Dysorthographique, la lecture et l'écriture avaient toujours eu le mauvais rôle dans ma vie. Plusieurs fois, le corps enseignant, des proches, des connaissances, des inconnus se sont permis de faire des réflexions déplacées à l'égard de mon handicap. J'ai nourri une grande culpabilité et une grande frustration à cet égard. Je ne voulais pas être infériorisé. Je voulais leur prouver à tous que je pouvais en faire autant qu'eux, même mieux, que j'en ferais une force qui les dépasserait tous. Je me suis mis à lire, d'abord sous la contrainte, forçant mes limites. Puis j'ai découvert quelque chose qu'on ne m'avait jamais enseigné : le plaisir. Lire devait être nécessaire, obligatoire, quantifié et restitué par un travail d'écriture qui m'était complètement rédhibitoire. Personne ne m'avait vraiment appris à prendre plaisir dans ce que je faisais en lisant ou écrivant : cette magie intrinsèque au fait d'apprendre et de transmettre. C'est de cette magie qu'il a été question durant ces dix dernières années.

Lire un roman, c'est s'embarquer sur un navire avec des passagers de tout horizon vers un voyage dont on ignore les escales. C'est accepter de remettre son cœur entre les mains d'autres pour vivre des expériences impossibles dans la vraie vie. Une sorte de pacte, de deal, d'échange avec l'auteur. On peut voyager au bout du monde comme redécouvrir les secrets et merveille en bas de chez sois. On peut combattre des créatures fantastiques au coté de chevalier mythologique et apprendre les leçons de vie d'une jeune femme luttant contre une maladie incurable. Il y a un effet catharsis qu'on ne peut pas mesurer avant de s'être abandonné à la lecture. C'est un rêve partager. Si on prend le temps d'y songer quelque instant, un roman est un espace où des inconnus acceptent de se livrer pour vivre ensemble des histoires provenant de l'extraordinaire d'une personne aussi ordinaire qu'eux.

Dernièrement j'ai eu le courage de participer à des ateliers d'écriture et de rencontrer d'autres auteurs de l'imaginaire. Et nous avons abordé la question de cet imaginaire foisonnant qui nous est propre et de ce champ commun que l'on peut partager. Lire c'est accepter d'être invité dans l'extraordinaire de quelqu'un. Écrire, c'est accepter d'ouvrir la porte de son extra ordinaire aux autres. Après avoir découvert le monde incroyable de la lecture, j'ai voulu écrire. Tout comme Alice, j'ai traversé le miroir. (Il n'est d'ailleurs pas étonnant que mon premier nom d'auteur soit Alice. Simple coïncidence qui avec le recul, fait sens).

Écrire, c'est accepter d'être le capitaine du bateau. On prend à son bord des personnes de tout horizon, dont on ne connaît rien et qui vont en apprendre sur nous, sur eux et sur les autres durant la traversée. Il n'est pas nécessaire de connaître la direction empruntée. Je souhaite un bon voyage à mes lecteurs au début de chaque chapitre, car j'espère sincèrement que je les ferais voyager. Écrire, c'est accepter de livrer une partie de soi, mais c'est également vivre les choses aux contacts des autres. Il n'y a rien de plus gratifiant que de recevoir un lecteur ému par son travail. Ma plus belle récompense c'est de permettre à ceux qui me lise de s'évader, de les soulager de quotidien qui peuvent se révéler difficile ou de réflexion douloureuse. J'aime à penser que je suis une lueur réconfortante. Sans doute un peu prétentieux de ma part, il est vrai, mais c'est un souhait sincère. Mes difficultés ne sont rien si elles peuvent permettre à la magie d'exister. En dix ans, j'ai fini par comprendre que je vivais déjà un rêve éveillé. Des lecteurs lisent mes textes, on voyage tous ensemble, c'est l'essentiel des raisons pour lesquelles j'écris.

Ces derniers temps, j'ai pris conscience de ces raisons et de celles qui me pousse toutes les semaines à poursuivre Mécanique humaine. Quand bien même ce n'est pas le seul projet sur lequel je travaille, il est l'étoffe que je tisse jour après jour, mois après mois, année après année. Oui, les premiers chapitres ne sont pas glorieux à mes yeux, et certains des chapitres les plus récents ne sont pas beaucoup plus haut dans mon estime. Mais ils représentent bien plus que quelques mots sur le papier. Mécanique humaine fais partie de moi. C'est un bateau sur lequel une centaine d'âmes a accepté d'embarquer. C'est une épopée qui me rend très fière. Le chemin parcouru est incroyable. Au départ, ce navire avait à peine de quoi flotter et se diriger. À présent, je me paie le luxe de pinailler sur la vaisselle et la couleur des fauteuils en oubliant que nous sommes tous sur une embarcation qui n'a pas à rougir de ces imperfections. Oui, je traverse des moments de doute très profond au sujet de Mécanique humaine. Est-ce qu'elle est vraiment à la hauteur ? Et de qui ? Pourquoi les gens semblent si attaché à cette histoire ? Il y a de bien meilleures auteurs. e. s que moi et des aventures plus fortes et émouvantes que celle que j'ai créée, mieux ficeler, mieux développé, mieux amené, pourquoi les gens restent-ils à bord ?

La réponse est pourtant là sous mes yeux : si les lecteurs restent, c'est qu'ils ont une raison de rester. Sans doute est-elle différente pour chacun d'eux, mais tous sont encore là, car la magie opère. Oui Mécanique humaine (ou d'autres de mes textes publiés) ne sont peut être pas de qualité, pas autant que je le souhaiterais, et le chemin sera encore long pour atteindre mes exigences. Cependant, l'essentiel est là. Tant que vous êtes là, tant que je suis là, la magie ne nous quittera pas. J'écris et vous lisez. Je vous lis parce que vous m'écrivez en retour.

Lire et écrire m'a permis de prendre conscience de cette magie qui nous lie tous. Jamais je n'aurais pu imaginer à coter de quoi je serais passé si je n'avais pas était aussi courageuse et déterminer (et sans doute un peu revancharde). Je serais certainement passé à coter de tant d'aventure incroyable.

Cette épopée que je vis grâce à vous est folle. Cela fait quatre ans que je me consacre quotidiennement à Mécanique humaine, dix ans que j'écris et cinq années que je prends mon ambition au sérieux. J'insiste, ce que je vis, ce que j'ai traversé et ce que j'espère encore découvrir, est fabuleux. Je reviens de si loin. Je suis si fière de moi. Je pense avec beaucoup d'émotion à mes personnages rendus vivant en chacun de vous. Je suis si reconnaissante en vers mes lecteurs.

Alors je vous remercie infiniment d'être encore là cette année. Je sais que les mises à jour sont distantes les unes des autres. Mais vous êtes toujours au rendez-vous et mon cœur fond à chacun de vos commentaires. Votre douceur et votre soutien indéfectible me rappellent régulièrement que ce que je fais vaut la peine et mérite d'exister. Merci d'être là.

Je vous embrasse fort mes petits matelots.

Votre dévoué Capitaine,

A. Kadailla.

Mécanique HumaineOù les histoires vivent. Découvrez maintenant