Un escort pour noël

Chapitre 27

- Donc si je comprends bien, on fait le travail de ton escort là ? s'effarouche Warren.

Je suis en train de confectionner une troisième pâte, pendant que Warren et Madeline s'occupent de former les cookies sur la plaque de cuisson. C'est la cinquième fournée que nous faisons et je n'ai plus de muscles. À force de malaxer la pâte comme une folle, mon biceps droit ne fonctionne plus correctement.

- Tout ça pour quoi ? continue Warren. Parce que madame ne peut plus le regarder en face depuis qu'elle l'a embrassé !

J'avale de travers et m'étouffe avec ma salive.

- Qu'est-ce que tu racontes ? je fais mine de rien.

- Ose mentir.

- Je fais ça avec vous parce que j'ai envie qu'on passe du temps ensemble et que je me suis dit que ce serait amusant de faire des pâtisseries.

Mes meilleurs amis me regardent tous les deux avec un sourcil levé.

- Elle nous prend pour des cons ? demande Warren.

- Je crois bien, acquiesce Madeline.

- Bon d'accord ! Ça me fait peur, j'avoue avec mauvaise foi. Je ne sais pas ce qu'il m'arrive. Dès qu'il est dans une pièce, j'ai l'impression de me liquéfier sur place. Je le cherche sans arrêt du regard et j'analyse tout ce qu'il me dit, je débite à toute vitesse.

- C'est pas faute de te l'avoir dit, lâche Warren.

- M'avoir dit quoi ? je demande, agacée.

- Qu'il te briserait le cœur.

- Mais enfin, je ne suis pas amoureuse de lui ! je crie de surprise.

- Ça ne saurait tarder, s'exclame Warren.

Je ne prends pas la peine de répondre et m'énerve sur la pâte que je suis en train de pétrir. Moi ? Amoureuse d'Ashton ? Ça n'arrivera jamais. Je suis juste un peu perdue car pour une fois, un homme s'intéresse à moi. Mais je le paye aussi ! Il est obligé d'agir comme ça avec moi. Il ne m'aime pas. Je ne l'aime pas. Fin de l'histoire.

- Mia, tu répands tes mauvaises ondes, ça me fait mal à la tête, souffle Warren.

- Tu n'as qu'à ne pas y prêter attention, je grogne.

- Je ne peux pas et tu le sais. Tes émotions prennent beaucoup de place, il réplique.

- C'est pas de ma faute...

- Bon ça suffit tous les deux ! s'énerve Madeline. À cause de vous, je n'aurai jamais d'enfant. Vous m'avez dégoutée.

- C'est lui qui a commencé, je pointe Warren du doigt.

- Lâchez-tout, canapé maintenant ! elle prend une voix autoritaire.

Je déglutis difficilement et pars dans le salon, la tête baissée. Quand Madeline se met en colère, ce n'est jamais bon signe. Warren et moi avons la fâcheuse tendance à lui faire perdre patience. Sans faire exprès, j'insiste là-dessus.

- Nous allons avoir une discussion comme des adultes matures de notre âge, Madeline tente de se calmer.

Aucun de nous n'ose parler ni se regarder dans les yeux.

- Chacun son tour, vous allez vous faire part de ce que vous avez sur le cœur...

- On n'a pas quatre ans, dit Warren en levant les yeux aux ciels.

- Je me suis bien fait comprendre ? elle serre les dents.

- Oui, il marmonne.

Quand Madeline agit ainsi, il n'y a plus rien à faire à part l'écouter. Je suis sûre que ça sera une super maman, même si elle croit le contraire.

- Bon, puisqu'il faut en finir... commence Warren. Mia, va falloir que tu sois plus clair sur tes sentiments, ça te fait du mal et tu le sais très bien.

- Ça ne me fait pas de mal, je réplique. Je suis juste un peu déboussolée. C'était simplement un baiser.

- Simplement un baiser ? demande Warren de manière suspecte.

- Oui, je hoche la tête. D'ici deux semaines, lui et moi ça sera fini et je pourrai reprendre une vie normale.

Mes deux meilleurs amis se lancent un regard en coin mais je fais mine de n'avoir rien vu.

- Si tu le dis, Warren hausse les épaules.

Un immense bip retentit dans l'appartement. Ça me vrille les tympans. J'écarquille les yeux et mon cœur fait un bond dans ma poitrine quand je réalise que c'est l'alarme incendie.

- Les cookies ! s'inquiète Madeline.

Je me lève en quatrième vitesse et fonce dans la cuisine. Qu'est-ce que je dois faire ? La panique me prend au ventre et dans un élan, j'éteins tout et ouvre la porte du four. Une épaisse fumée noire en jaillit. Je crache mes poumons quand j'en inhale sans faire exprès. C'est quoi ça ? Une petite lumière orange, jaune naît dans le fond. Je hurle quand je réalise que c'est une flamme. Madeline et Warren accourent aussitôt après avoir ouvert toutes les fenêtres. Mon appartement va cramer !

Je n'arrive pas à quitter les yeux du four, comme paralysée. Non, tout ce que j'ai réussi à avoir va partir en fumée. Qu'est-ce que je dois sauver en premier ? Mes livres ? Ma télé ? Mon ordi ? Mes photos ? Mes vêtements ? Ses vêtements ? Merde ! Ashton va me tuer ! Si je ne suis pas déjà morte.

J'entends au loin mes meilleurs amis parler et hurler mais je n'arrive pas à distinguer ce qu'ils me disent.

- Je m'en charge.

Une douleur me prend au niveau de la joue et je détache mes yeux pour rencontrer ceux de Warren. Il vient de me mettre une gifle ?

- C'est bon, t'es revenue sur terre ?

- Mia, tu as un extincteur ? demande Madeline le plus sereinement possible, même si je me rends compte de ses tremblements qui montre qu'elle est aussi paniquée que moi.

Je me rue vers le placard et trouve la bonbonne rouge. Je cours dans tous les sens et rejoins vite mes amis. Warren me prend l'objet des mains et asperge le four de mousse. Ça fait un bruit abominable. Je prie de tout mon cœur pour que ça s'arrête enfin. Une fois le gaz évaporé, les flammes ont disparu.

L'appartement est dans le calme le plus total. On peut juste entendre le son irrégulier de nos respirations saccadées.

- Ton appart a failli partir en fumée, murmure Warren.

- Mon appart a failli cramer, je chuchote sans réellement réaliser.

Nous sommes tous les trois alignés face au four, la tête en vrac.

- C'est la dernière fois que l'on cuisine ensemble, ça je vous le dis, reprend Madeline.

Je me tourne vers mes meilleurs amis et après un petit blanc, j'explose de rire. Ils me dévisagent.

- C'est nerveux, j'essaie de contenir mon rire alors que les larmes me montent aux yeux.

Puis ils finissent par faire pareil. On a l'air de trois cons à rire. Je n'arrive même plus à m'arrêter. C'était moins une.