Artefact

Conseil des Capitaines

L'épais bois de renfort faisait pâle figure pour le moment mais je comptais bien profiter de mon passage à Ismandine pour compléter le travail brouillon de mes zombies. Pour le moment, les planches de rafistolage et les larges carrés de toiles recousus sur les voiles rendaient à mon navire un air d'épave. Je me demandais par moment comment l'eau ne s'infiltrait pas. Mais les zombies qui remontaient sur le pont principal pour jeter des seaux d'eau remplis par dessus le bastingage me rappelaient de ne pas trop me réjouir.

La bataille dans Port Moirell avait cessée depuis que nous avions commencé les réparations, mais impossible de voir où Kritch était partit. Peut-être n'y avait-il pas d'objectif dans son attaque ; Mais cela m'aurait énormément étonné venant de lui.

Après quelques heures de navigation, le soleil couchant nous offrit une vue enflammée du Pic Sobral d'Ismandine. Cette haute montagne sombre était entourée de jungle et offrait à notre Confrérie un bon nombre de grottes, utiles pour nos expériences. Puis le Phare apparut et la Lueur Fantôme passa sur nous sans s'arrêter.
Nous approchâmes du port et Carna annonça notre approche au gardien qui occupait une des tourelles de la jetée en pierre. Ce dernier, équipé de son armure d'acier et d'un mousquet nous répondit d'un simple salut de la main sans quitter sa position.

Plusieurs navires étaient déjà amarrés, et j'en reconnu quelques-uns. En repensant aux nouvelles que j'apportais, je me demandai si les autres avaient eu plus de chance que nous durant les derniers jours.
Les gargouilles remontèrent les voiles sur les vergues et le navire ralentis lentement jusqu'à la jetée en pierre qui n'attendait plus que nous. Carna sortit à cet instant de la cabine. Elle appuyait toujours un bout de chiffon sur son crâne.
Une fois le navire stoppé, je descendis, suivis de ma troupe. Les zombies se dirigèrent comme par habitude vers un bâtiment réservé pour eux. Étrangement, même sans connaître la ville, ils savaient où se rendre pour se nourrir ; C'était surprenant.

Mon regard fit le tour de la grande place du port. Le sol pavé faisait le tour d'une grande fontaine. Autour de cet endroit où s'affairaient de nombreux marchands et marins, les habitations s'élevaient toutes sur au moins deux étages offrant un visuel semblable à une jungle de toitures aux multiples couleurs. La ville montait en pente douce vers notre forteresse, perchée sur un point haut, juste avant les falaises abruptes du Pic Sobral. Mon œil fut automatiquement attiré vers le Phare Mirage.

C'était le quartier général de notre Confrérie.
Son haut profil arrondis orné de longs piques en métal éparpillés aléatoirement sur toute la hauteur en faisait un bâtiment très reconnaissable de loin. Mais heureusement, tout au sommet brûlait une puissante flamme bleu qui servait de phare et dont la lueur tournait lentement sur les alentours. Quiconque voyait la lueur de cette flamme oubliait instantanément les dernières minutes de son existence et donc l'existence de l'île.
C'est ce qui a permit à Ismandine de rester une île secrète aux yeux de tous aussi longtemps. Malheureusement, la création de cette flamme remontait à tellement longtemps que personne ne savait qui l'avait mise là. Le secret de son pouvoir étant donc perdu on-ne-sait-où, elle était constamment protégée comme le symbole même de notre communauté.

En arrivant vers les premières habitations, je me dirigeai directement vers la bâtisse du charpentier naval.
- Gordon! Alors comment tu vas? m'accueillit-il, accoudé au comptoir.
- Nyro persiste à nous laisser dans notre misère face aux templiers. Il y a conseil ce soir alors on en saura tous un peu plus, dis-je à l'homme dont la bedaine ressortait sous sa chemise. Il recoiffa son crâne presque chauve avant d'ajouter:
- Alors que puis-je faire pour aider ton bon vieux Fossoyeur?
- J'ai dû le rafistoler comme j'ai pu après une embardée contre Kritch.
Il étira une grimace de surprise.
- Quel foutriste... Et j'imagine que tu veux que j'apporte des réparations définitives?
- Exactement. Et un réarmement complet aussi.
- Très bien Capitaine! Laisse donc une ou deux heures à mes gargouilles et c'est réglé, m'annonça-t-il en souriant.
Je sortis sans attendre et quittai les quais du port pour rejoindre les rues de la ville, recouverte d'une magnifique draperie orangée tandis que le soleil poursuivait sa chute.