Urgences

1.Alma

1 an plus tôt

La chanson de Avincii me fait ouvrir les yeux, « wake me up », il est tellement difficile pour moi de sortir du lit que j'ai choisi cette chanson par ironie envers moi même.
Je grogne, la nuit a, encore, été trop courte. Mais c'est comme ça, malheureusement pour moi, je suis plus efficace dans mes révisions la nuit, si bien que je ferme les yeux a 4h du matin pour les réouvrir a 6h30, tous les jours depuis 3 ans... ça pique. Il va bien falloir que je me remette sur un rythme « normal » le concours se déroule la journée, et je dois être au top de ma forme.
Premier jour de mon dernier terrain de stage avant le grand concours, je ne dois pas être en retard. La pédiatrie. 4 dernières années au milieu des 20 pioupiou de première année, autant dire que les journées ne vont pas être animées socialement parlant, mais peu importe je n'y vais pas pour me faire des amis. Je repousse la couette en soupirant et me dirige tel un zombie vers la salle de bain. Faut dire que je n'y vois absolument rien, sans mes lentilles de contact, le monde est un véritable flou. L'avantage d'être myope c'est qu'on distingue parfaitement les formes et on reconnaît la démarche des gens sans pour autant voir les traits de leur visage. Une bonne douche chaude pour me réveiller, je m'enveloppe dans une grande serviette. Je souffle: mode transformation activé. Je commence par mettre mes lentilles, ça va tout de suite mieux, ou pas.
Le reflet dans le miroir ne m'a jamais satisfaite, au moins quand je ne les ai pas je ne remarque pas l'étendu des dégâts. Mais c'est plus fort que moi... je me poste devant le miroir sur pied et fais tomber la serviette. Nouveau soupire. Machinalement je pose une main sur mon ventre, c'est le seul moment de la journée où je l'apprécie un peu: vide et dépourvu de digestion active. Il faut dire que mon antécédent d'obèse à lunette, mal dans sa peau, sujet des railleries de mes camarades de classe, a laissé quelques séquelles: la dysmorphophobie entre autre.
Au moins ma poitrine est parfaite, puisque refaite. Je me souviens encore lorsque ma mère m'a trouvé à 20 ans, en pleurs dans ma chambre alors que je venais pour la enieme fois de me regarder nue dans le miroir. Mes seins étaient difformes, après la perte de poids, un entrait dans un 85B l'autre flottait encore dans un 80A. Je ne prenais que des soutiens gorges rembourrés pour faire illusion sous mes teeshirt. Je me fichais de leur taille, je me préoccupais de leurs formes. Une fois l'armature ôtée, un ressemblait à un œuf au plat avec un mamelon arrondi à peine plus gros qu'une pièce de 2 euros pointant vers le haut et l'autre tombait tel une vieille chaussette qu'on aurait trop portée.
Ma mère a essuyé mes larmes et m'a sourit en me disant qu'aujourd'hui, ça se refaisait facilement, et lorsque je lui ai répondu que ça coûtait un bras: « ton sourire n'a pas de prix ma chérie ». J'ai pleuré la première fois que j'ai racheté un soutien-gorge en 90c que mes 2 amis de silicone remplissaient avec harmonie et naturel, un des plus beaux jours de ma vie, un de mes complexes venaient de s'envoler et je me sentais plus légère d'un énorme poids.
J'ai perdu 30 kilos, mais je n'ai pas retrouvé la confiance en moi en contre partie, je reste d'une timidité presque maladive. Je passe mes sous-vêtements, un débardeur, un jean dans lequel mon postérieur veut bien entrer avant de passer au ravalement de façade.
Je suis sévère, je ne maquille que mes yeux. Après mon soin du visage je n'ai pas besoin de mettre de fond teint, j'ai la chance dans mon malheur de ne pas avoir une peau à problème et je ne mets jamais de rouge à lèvre qui ne tiendrait de toute façon pas plus de 5 min dès que j'aurai bu mon café accompagné de ma cigarette.
Fard à paupière, eye liner, crayon et mascara, Je ne lésine pas sur mes paupières et en ras de cil inférieur.
Je poudre légèrement pour ne pas briller.
Une fois fini, je m'attaque à mes cheveux longs que je démêle rapidement. Longs et raides, je n'ai rien à leur faire comme traitement particulier, dieu merci, sinon mon séjour dans la salle de bain me durerait vraiment 3h.
Déodorant et parfum mis, je prends mon blouson de cuir et passent mes bottines à talons.
Je glisse ma blouse et mes sabots dans un tote bag et m'empare de mon sac à main avant de passer la porte de ma chambre.
Dans la cuisine, ma coloc et amie est déjà entrain de déjeuner avec son carnet de note à la main.En dernière année comme moi, chaque moment est bon pour réviser. Elle lève la tête de son carnet lorsque j'entre pour me faire un café.