Les Élémentalistes T1 - Le Forgeur de Cauchemar

Chapitre XXIII : L'Ombre de l'Eau

À l'approche du Festival de l'Eau, Mizukage Matsuri, la jeune Nari était consumée par une obscure passion de nuire à ses semblables. Chaque matin, elle se réveillait avec une sauvagerie sombre qui l'envahissait, enflammant ses pensées de violence et de haine envers les autres. Le jour tant attendu de la fête, elle se leva dans une fièvre agitée qui la poussa à travers les couloirs de l'Académie, les mains tremblantes d'une étrange excitation. Elle se précipita vers les jardins, où son cœur battait la chamade, tandis que l'envie de mettre fin aux jours de tous l'envahissait de plus belle. Comme une puissance maléfique, elle se sentait poussée à agir avec violence, et ses pas résonnaient dans les couloirs déserts de l'Académie avec une intensité terrifiante.

Malgré ses efforts pour calmer ses pensées, les leçons de méditation qu'elle avait reçues semblaient inefficaces. Elle arriva enfin à la porte des jardins, qu'elle ouvrit avec une fureur démoniaque, révélant la beauté naturelle qui s'étendait devant elle. Les pétales de fleurs flottaient gracieusement dans l'air, éclairés par la lueur dorée du soleil couchant. Pourtant, même la vue de ce paysage serein ne put calmer la tempête qui faisait rage dans l'esprit de Nari, qui se tenait là, figée et immobile, luttant contre ses pulsions destructrices.

Le Festival de l'Ombre de l'Eau, consacré à l'adoration du kami Susanoo, était l'une des fêtes les plus éminentes de l'Académie, célébrée avec allégresse par les étudiants pendant la saison estivale. La fête débutait avec un imposant défilé de mikoshi, des chars portatifs ornés de lanternes de toutes les couleurs, accompagnés par les tambours et les flûtes traditionnels, transportant les statues sacrées du kami. Les élèves, arborant leurs costumes traditionnels, s'alignaient pour défiler aux côtés des mikoshi, tandis que la foule en liesse se pressait pour purifier les chars en y jetant de l'eau.

Les senteurs d'encens et de nourriture flottaient dans l'air, créant une ambiance joyeuse et festive. Les étals de nourriture proposaient une panoplie de délices culinaires pour calmer les appétits et rafraîchir les esprits, des sashimis de poisson frais, des mochis glacés garnis de fruits rouges, et des onigiris fraîchement préparés avec du thon ou du saumon. Les boissons fraîches, telles que le thé vert glacé et le saké frais, étaient également offertes aux participants pour apaiser leur soif.

Les costumes chatoyants, les lanternes et les drapeaux colorés se distinguaient avec éclat contre la chaleur accablante de l'été, apportant une touche de fraîcheur et de couleur au défilé. Pour adoucir cette saison ardente, des kurakasa kozō, des yōkai en forme de parapluies en papier huilé, munis d'un grand œil unique, d'une longue langue saillante et d'une jambe sur laquelle ils sautaient, s'affairaient à apporter de l'ombre aux élèves. De plus, les hydromanciens, experts dans l'art de la manipulation de l'eau, prodiguaient des nuages d'eau et des brises fraîches pour rafraîchir les participants. Les gouttelettes d'eau qui tombaient du ciel apaisaient les peaux enflammées par la chaleur, tandis que les parfums de fruits et de fleurs flottaient dans l'air pour créer une atmosphère rafraîchissante.

Le Festival de l'Ombre de l'Eau était une célébration remarquable, où la beauté de la nature, les délices culinaires et les pratiques ancestrales se mêlaient en un ensemble harmonieux et éblouissant. Les élèves de l'Académie se retrouvaient ainsi unis pour célébrer cette fête, réjouissant leurs cœurs et apaisant leurs esprits.

Tandis que la jeune Nari se laissait emporter par la tourmente de ses émotions, la nature qui l'entourait, pourtant si paisible d'ordinaire, semblait elle-même perturbée. Les feuillages des arbres frémissaient sous une brise légère, tandis que les fleurs semblaient se faner sous l'emprise d'une colère invisible. La rivière elle-même, d'habitude si calme et limpide, semblait agitée de remous mystérieux, comme pour refléter l'état d'âme tourmenté de la jeune fille.