Une pression sur l'épaule réveilla Lily du sommeil profond dans lequel elle avait sombré. Dehors, la lune était haute, ronde comme un fromage, et d'une couleur jaune qui rappelait celle du soleil en hiver.
-Quoi ? murmura-t-elle.
Elle n'osait pas oser la voix de peur de troubler le silence ouaté que le sommeil avait installé dans ses oreilles. Il se dissipa cependant au bout de quelques secondes, et elle se rendit compte qu'il n'avait été que factice. On entendait, depuis le salon de Remus, des rires monter de la rue, des voix aux accents banlieusards prononcés se couper et s'entrechoquer, le sifflement du vent entre les balcons trop rapprochés, le halètement de Chien. L'odeur de fumée ne s'était toujours pas dissipée.
Regulus se tenait appuyé contre un mur, déjà tout habillé et coiffé – mais s'était-il un jour déshabillé et décoiffé ?
-Quoi ? répéta Lily. Qu'est-ce qu'il se passe ?
-On descend, dit Remus.
Il s'éloigna d'elle et alla enfiler ses chaussures. Dès que la pression chaude de sa main sur le bras de Lily eut disparu, elle sentit un froid mesquin – si peu caractéristique d'Août – se glisser le long de ses os. Elle regarda Remus – dont elle savait les moindres secrets et qu'elle connaissait pourtant si peu – attraper une veste qu'il n'enfila pas, et jeter un sac à dos sur l'une de ses deux épaules. Lui aussi était tout habillé, et les blessures sur ses bras avaient été soigneusement bandées. Lily se demanda si c'était Regulus qui avait placé les pansements, puis, avisant les nombreuses cicatrices qui zébraient le corps de Remus, écarta cette hypothèse. Il avait dû le faire lui-même, dans l'obscurité de sa chambre. Elle l'imagina un instant, courbé dans la lumière de la lune, pansant son corps gauche et mal-nourri, du sang tachant le bout de ses doigts.
Tremblante de froid et d'un soupçon d'incompréhension, Lily jeta ses jambes au-dehors du canapé et se leva. Le sol en plastique craquait sous elle alors qu'elle enfilait ses chaussures.
-Tu n'as pas d'autres affaires ? lui demanda Remus.
-Comment ça ? bredouilla-t-elle en guise de réponse.
-Tes affaires. Tu en avais sorties ?
Lily fronça les sourcils.
-Remus ? Je ne comprends pas...
Remus se pencha vers elle. Il était si proche que Lily pouvait voir le relief de ses sourcils bruns. Elle n'avait jamais remarqué les taches de rousseur qui lui parsemait le nez comme des constellations. Il était beau. Il l'avait été, du moins. Dans une autre vie, sans doute l'était-il encore, et son visage, vierge de toute cicatrice lunaire était encore tourné vers le soleil qui brillait dans la maison au bord de la mer dont il lui avait parlé.
Il plaça ses deux mains sur ses épaules et la secoua tout doucement, écartant les dernières brumes du sommeil qui s'accrochaient encore désespérément à elle :
-Lily, dit-il. Tu vas partir. Je vais te ramener, maintenant, tout de suite. Ta valise est déjà en bas, les affaires que tu as lavées aussi. Est-ce qu'il y a autre chose que tu voudrais emmener ?
Une vague de bonheur envahit le cœur de Lily, accompagnée d'une pointe de tristesse qu'elle ne s'expliquait pas. Elle jeta un coup d'œil dans la pièce, son regard s'attarda sur le livre qu'elle avait pris de sa bibliothèque et qu'elle ne finirait sans doute jamais. Pas le temps de vérifier le titre. Il fallait partir. Partir vite avant qu'un autre malheur n'arrive et ne la retienne dans cet appartement maudit où elle avait vu couler plus de larmes et de colère que n'importe où ailleurs.
-Non, je n'ai rien, dit-elle.
-Alors on y va.
Remus ouvrit la porte, laissa Lily et Regulus sortir et ferma derrière eux. Tous les trois, ils entamèrent la longue descente aux enfers des douze étages de l'immeuble de Remus. Ils progressaient dans un silence religieux, à peine troublé par le bruit de leurs pas, celui des griffes de chien sur le sol et le grincement presque inaudible des hanches de Remus.
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the lovers. [WOLFSTAR AU]
Fanfiction« Et nos larmes les enrichissaient... » La Ville n'est pas un endroit accueillant. Sur le rebord de la fenêtre de Regulus Black, un bouquet de fleurs aussi rouge que les semelles de son frère disparu secoue ses pétales. Bientôt, le monde de Remus Lu...