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Tobias

Je roule une première fois dans mon lit avec l'espoir d'éteindre les pensées fumantes de mon esprit. Puis une seconde fois au bruit de l'orage qui frappe contre la baie vitrée de ma chambre. Et une troisième fois lorsque mes yeux repèrent mon téléphone en train de vibrer sur ma table de chevet.

Mon réveil secoue mes muscles pleins d'épuisement.

Je ne crois pas avoir trouvé refuge dans le sommeil plus de 3 heures cette nuit.

Je me redresse sur mes coudes, fixe l'écran de mon portable qui ne cesse de trembler et admire avec horreur la scène de ma chambre.

J'ai encore retourné le miroir.
Je n'ai pas supporté mon reflet en rentrant de ma séance de sport.

Arrête de manger.

Je me relève à une vitesse folle, mais un vertige ordonne à mon corps de retomber sur le matelas. Assis, j'essaye de reprendre mon souffle qui a disparu en moins de 3 secondes et de retrouver ma vue.

L'horloge suspendue au-dessus de mon bureau, sur lequel trônent la majorité de mes trophées et récompenses, affiche approximativement 6h30 du matin.

Soudainement, alors que je pose mon regard sur mon bureau, je croise la silhouette d'un plateau avec l'ombre d'une canette qui grimpe sur le mur.

Georgia est certainement passée cette nuit me déposer le plateau. Généralement, ma belle-mère ne croit pas à mes « je n'ai pas faim ».

C'est possiblement la seule qui s'inquiète un peu pour ma santé.

Tu es sûr de ça ?

Je me relève cette fois-ci avec délicatesse pour laisser le temps à mon corps d'assimiler le creux dans mon estomac comme une sensation familière.

Tu ne vas jamais t'habituer.

J'enfile mes pantoufles et me dirige à pas lourds vers la salle de bain. L'anxiété monte en flèche car je sais que mon reflet va m'arracher un vomissement matinal. Mais je n'ai pas envie de vomir de bon matin.

Tu dégoûtes.

L'eau brûle ma peau et la douleur balaie franchement les pensées intrusives qui ne cessent de polluer mon esprit. Je laisse l'eau couler jusqu'à ne plus ressentir mon corps. Un peu comme un anesthésiant, je ne veux pas frôler mes côtes avec mes doigts.

C'est toujours délicat de passer sa main sur sa peau alors que je n'ai qu'une envie, c'est sortir et m'engloutir dans des vêtements pour ne plus jamais être confronté à l'atrocité que je suis devenu.

Ton corps répugne.

Finalement, après de longues minutes à batailler contre moi-même, je descends de ma chambre et la lumière qui s'infiltre dans la pièce à vivre ne m'inquiète pas plus que ça.

— Georgia ?

À son prénom, ma belle-mère se retourne avec une tartine recouverte de confiture à la fraise dans une main et sa tasse de café préférée dans l'autre.

— Tu es déjà debout ? J'espère que ce n'est pas à cause de moi.

— Non, mon alarme a sonné.

Alors que je m'approche d'un pas encore endormi après ma courte nuit, elle ne prend même pas l'initiative de baisser son débardeur qui laisse à mes yeux l'occasion d'admirer son ventre rond signifiant la fin de son 5ème mois.

Évidemment que je suis heureux pour elle, mais je reste légèrement craintif. Cet enfant va signer la fin de mon existence aux yeux de mon père.

Je ne serai plus qu'un souvenir d'erreur.
L'objet d'un amour éteint.
L'enfant né de la violence.

𝐈 𝐟𝐞𝐥𝐥 𝐢𝐧 𝐥𝐨𝐯𝐞 𝐰𝐢𝐭𝐡 𝐦𝐲 𝐞𝐧𝐞𝐦𝐲Où les histoires vivent. Découvrez maintenant