06

9.8K 399 853
                                    

Kassady Hartman

« L'amour rend aveugle, celui d'une mère rend fou »

— On arrête avec l'ignorance. C'est quoi la prochaine étape ?

L'urgence de ma demande transparaît dans ma voix. Taylor, que j'ai surprise alors qu'elle sortait de sa voiture, me regarde, visiblement étonnée.

— Bonjour d'abord. Je vais bien, merci de demander. Et... de quoi tu parles ?

— J'abandonne l'ignorance, ça ne fonctionne pas. Dis-moi ce que je dois faire pour l'attirer.

— Qui ça ? Tobias ?

— Oui, aide-moi à l'attirer.

Elle ajuste son sac à main sur son épaule, à peine couverte par un cardigan beige arborant le blason de Vivienne Westwood, cousu à gauche. Elle respire l'aisance financière à des kilomètres. Je dois avouer qu'en face d'elle, je me sens comme engloutie dans son ombre, tandis que la silhouette imposante de sa berline allemande semble m'envelopper peu à peu.

— On dirait que tu parles d'un chien errant, dit-elle, légèrement confuse.

— Il n'y a pas grande différence entre un homme et un chien.

Elle acquiesce, reconnaissant le point. Mon désespoir est tel que je laisse mes bras retomber de chaque côté de mon corps. Ce matin, je me suis réveillée en sursaut, cette histoire avec Tobias grandissant en moi comme une frustration impossible à contrôler. Pendant quatre mois, j'ai cru pouvoir toucher du doigt la fierté de ma mère, m'imaginant l'entendre me dire combien elle était heureuse pour moi, que j'avais réussi là où elle avait échoué.

Mais quand je raccrochais et que je regardais droit devant moi, la honte m'envahissait. Je ne suis pas meilleure qu'elle. Au contraire, je suis sa pire version, car au lieu d'affronter la vérité, j'ai préféré la masquer sous une couche de mensonges que je n'assume plus.

Le manque d'amour nous pousse parfois à faire des choses insensées...

— S'il te plaît, Taylor, j'ai besoin de ton aide, dis-je une dernière fois.

— Tu me fais presque mal au cœur. C'est si urgent que ça ?

D'un côté, je ne veux pas me courber et sacrifier ma dignité pour lui hurler que oui, c'est une question de vie ou de mort. Et je parle de ma propre mort. Pourtant, le temps me glisse entre les doigts, et il ne me reste qu'un peu moins de dix jours pour convaincre Tobias d'entrer dans mon jeu.

— Oui, c'est quasi vital.

Elle jette un coup d'œil à droite puis à gauche, avant de se pencher vers moi en ramenant une mèche de ses cheveux derrière son oreille.

— Tu l'aimes vraiment, Tobias ?

Je n'ai pas de réponse immédiate. Enfin, si, mais elle n'est pas à mon avantage. Taylor me regarde, curieuse de savoir ce qui me prend autant de temps.

— Il ne me laisse pas indifférente, marmonné-je au bout d'un moment.

À cet instant, je me dégoûte moi-même.

— C'est pareil pour lui.

— Pardon ?

Son regard s'élargit. Elle me fixe, bouche entrouverte, comme si elle venait de commettre une grosse erreur.

— Oublie ce que je viens de dire...

Elle tente de s'échapper, mais je lui attrape doucement le bras.

𝐈 𝐟𝐞𝐥𝐥 𝐢𝐧 𝐥𝐨𝐯𝐞 𝐰𝐢𝐭𝐡 𝐦𝐲 𝐞𝐧𝐞𝐦𝐲Où les histoires vivent. Découvrez maintenant