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𝗞𝝠𝗦𝗦𝝠𝗗𝗬 𝗛𝝠𝗥𝗧𝗠𝝠𝗡

La nuit est drôlement fraîche pour un mois d'octobre. Appuyé contre la rambarde, je fixe l'horizon et admire le paysage de Londres qui s'anime sous mes yeux, enivré par la beauté de la ville. Londres ne m'a jamais laissé indifférent. Au fil des années, j'en suis tombé amoureux, et sa prestance me laisse parfois sans voix. Puis je me rappelle qu'on ne peut pas guérir dans un lieu qui nous rend malade. C'est comme fuir avec une entorse. C'est impossible. Londres m'a pourri.

Le vent caresse mes cheveux, et certaines de mes ondulations retombent sur mon front, m'obligeant à les coincer derrière mon oreille, rougie par le froid. Je scrute les ruelles d'un œil aiguisé, à la recherche de Kassady. Je n'ai pas choisi le Florattica par hasard. Je sais que cette idiote ne connaît pas ce bar. Le contraire m'aurait étonné. Un simple cocktail représente cinq mois de son salaire, qu'elle gagne à la sueur de son front. Et déjà, je me réjouis à l'idée de la voir en bas, en train de fouiller l'entrée comme une hystérique. De plus, elle ne maîtrise pas nos codes sociaux. Elle ne sait pas qu'il faut se présenter dans une tenue adéquate aux prix, paraître élégante, à la hauteur du service. À la hauteur de ma présence.

Je me rassure en me disant qu'elle a peut-être utilisé ses trois derniers neurones pour éviter de me ridiculiser avec une tenue douteuse, comme à son habitude. Je n'ai pas envie de regretter d'avoir sorti ma plus belle chemise et payé un cordonnier pour faire briller mes mocassins. Il me faut plusieurs secondes pour lire l'heure sur ma montre. La cadran, modelé dans une forme ovale, ne m'aide pas à déchiffrer le sens des aiguilles. C'est dans ce moment de difficulté que je regrette d'avoir dépensé un peu plus d'un million de livres sterling pour obtenir cette montre Cartier. J'imagine que ma soif de singularité a pris le dessus sur ma raison et mon jugement.

Je soupire en réalisant l'heure. Je suis peut-être venu trop en avance.

— Mr Remington.

Je me retourne, stressé par cette voix. Le serveur se tient debout, les bras croisés dans son dos. À l'allure qu'il dégage, son angoisse est palpable. Il doit penser que je suis aussi sévère que mon père, et je n'aime pas être associé à lui, de près ou de loin. Alors, je lui adresse un sourire.

— Oui ?

— J'ai une bonne et une mauvaise nouvelle. Je commence par laquelle ?

— La mauvaise.

Il inspire et patiente un moment, probablement pour préparer son aveu.

— La mauvaise nouvelle est que le voiturier a rayé la portière gauche de votre Bentley. Je vous rassure, les frais de réparation seront pris en charge par l'enseigne et...

— Ce n'est pas grave. Et la bonne nouvelle ? l'arrêté-je en me tournant complètement cette fois-ci.

Surpris que je n'en fasse pas tout un plat, il reprend contenance et répond :

— Mme Hartman est ici.

C'est plutôt ça, la mauvaise nouvelle. Je retiens un soupir d'exaspération, ce qui fait gonfler mon buste, tirant ainsi ma cravate hors de mon cardigan.

— Je l'invite à monter elle-même ou vous descendez la chercher ? poursuit le serveur face à mon silence.

Et tant qu'on y est, je lui offre mon bras pour qu'elle grimpe les escaliers sans risquer de tomber. À cette pensée, j'étouffe un rire.

— Dis-lui de monter, je l'attendrai ici, dis-je en me dégageant de la rambarde. Et ne lui donne pas l'accès à l'ascenseur.

— Mais...

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 12 ⏰

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𝐈 𝐟𝐞𝐥𝐥 𝐢𝐧 𝐥𝐨𝐯𝐞 𝐰𝐢𝐭𝐡 𝐦𝐲 𝐞𝐧𝐞𝐦𝐲Où les histoires vivent. Découvrez maintenant