Marcus était retourné dans le laboratoire souterrain. Mais pas en tant que visiteur égaré cette fois.
Le médecin avait apporté son brancard près de l'une des cuves et détachait lentement son masque.
« Vous allez faire un superbe sujet d'expérience, dit-il d'un ton froid. Je vais commencer par vous vider de votre sang. Ce n'est pas très douloureux, vous allez simplement vous sentir engourdi, puis vous évanouir pour ne plus jamais vous réveiller. Si vous le désirez, je peux vous anesthésier avant et vous serez sûr de ne rien sentir. »
Marcus essaya de ne pas laisser montrer ce qu'il faisait. Durant le transport, l'une des sangles qui retenaient ses poignets, sans doute mal ajustée, s'était défaite et il s'appliquait à libérer discrètement son poignet droit sous le drap qui le couvrait encore en partie.
« Vous êtes tombé bien bas, docteur, dit-il avec une intonation sarcastique qui contrastait avec les larmes qu'il venait de verser. Vous auriez pu devenir un brillant chirurgien sans cette espèce de fascination morbide. Maintenant, vous en êtes réduit à jouer les croque-morts au service d'une folle... »
Cela ne lui arracha qu'à peine une grimace.
« Qu'est-ce que vous essayez de faire, me provoquer pour me convaincre de vous relâcher ? Vous perdez votre temps. Sachez que je suis parfaitement satisfait de ma situation ici. Mademoiselle Rochelune a beau être dérangée, elle est la seule qui ait compris ma démarche. »
Il passa son doigt sur la peau de Marcus. Là où le contact d'Alice avait été délicieusement agréable, celui-là était visqueux et répugnant comme la langue d'un reptile monstrueux.
« Vous avez un très beau corps, vous savez ? Je vais m'appliquer à restituer sous le meilleur jour chacun de vos tissus. Si vous n'avez jamais rien fait de votre vie, vous aurez la consolation qu'après votre mort, vous deviendrez un chef-d'œuvre impérissable... »
Il approcha une petite tablette à roulettes garnie de scalpels.
« Bon, à présent, une petite incision de l'artère pour vider le sang. Je vais entailler sous le bras gauche, cela se verra à peine. Mademoiselle Rochelune risque de m'en vouloir si vous avez des cicatrices après l'opération. »
Le médecin saisit fermement le bras gauche de Marcus d'une main et entreprit de détacher les sangles de l'autre main. Il avait une poigne de fer, et l'habitude de maintenir les cobayes récalcitrants. De plus, son regard était fixé sur le bras gauche à l'affût du moindre mouvement suspect... mais pas sur le droit.
Marcus libéra sa main droite et asséna un coup de poing au visage du médecin. L'homme, qui était en train de se pencher, reçut le coup en pleine arcade sourcilière et tomba à la renverse. Profitant du fait que son bras gauche était libre, Marcus l'étendit vers la tablette et saisit le plus gros scalpel qu'il y trouva.
La partie s'annonçait serrée. Il était droitier, mais le médecin se trouvait à sa gauche et il avait besoin de sa main droite pour défaire le reste de ses sangles ; il était donc bien obligé de se défendre de la main gauche, du moins tant qu'il ne serait pas complètement libéré.
À côté de lui, le médecin se relevait difficilement. Le coup l'avait surpris, et il n'avait pas l'air de bien gérer la douleur. Sans doute était-il plus habitué à l'infliger aux autres qu'à la subir.
Marcus détacha frénétiquement la sangle qui retenait son torse. Quand elle serait défaite, il pourrait au moins se relever un peu ; en attendant, il pointait son scalpel vers le médecin pour le dissuader de revenir.
« Ne bougez pas ou c'est moi qui vous fais une opération sans anesthésie !...
– Vous êtes coriace. Mais aucun de mes sujets n'est jamais ressorti d'ici vivant, et personne ne le fera jamais. Même pas vous... »
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Poupée Psychotique
HorrorQuand il tombe amoureux de la belle et riche Alice Rochelune et découvre que c'est réciproque, Marcus, beau gosse métalleux n'ayant jamais été gâté par la vie, croit que ses rêves se réalisent enfin. Mais les apparences sont parfois si trompeuses...