Quelques jours seulement après le concert, Marcus se réveilla dans le lit d’Alice. Il n’était toujours pas sûr de ne pas rêver ; mais si c’était un rêve, il n’avait aucune envie de se réveiller. Ivre de plaisir, il abandonnait son corps aux caresses de la jeune femme sans oser bouger.
Elle avait une étrange manie : ses mains, ou plutôt ses doigts, glissaient sur chaque centimètre carré de sa peau comme si elle essayait de scanner son corps ou d’en prendre une empreinte. Il se demanda à quoi rimait ce rituel : peut-être qu’au fond, elle aussi n’en revenait pas d’être à ses côtés, et elle ne pouvait se retenir de le toucher sous toutes les coutures pour s’assurer qu’il était bien réel.
Il entendit soudain qu’on frappait à la porte. Surpris, il tenta de se cacher sous les draps et voulut renvoyer l’intrus, mais Alice le prit de court en répondant « Entrez ! »
Une femme d’une quarantaine d’années, portant le costume typique des bonnes, entra dans la chambre en tenant un grand plateau débordant de café, de jus de fruits, de tartines et de tout ce que l’on pouvait rêver pour un petit-déjeuner.
« Mademoiselle, monsieur, votre repas.
– Oh, fit Marcus encore un peu surpris, on nous sert le petit-déjeuner au lit ?… Je suis vraiment en train de rêver. »
Alice ne répondit rien, et laissa la bonne installer le plateau devant eux.
« Merci, Maria, vous pouvez disposer. Je vous rappellerai plus tard pour débarrasser. Et maintenant, ajouta-t-elle à Marcus quand Maria fut sortie, sers-toi, mon chéri.
– Toute cette nourriture, tu veux me rendre malade, plaisanta-t-il.
– Au contraire, tout cela est biologique, c’est excellent pour ta santé.
– Tout ?
– Je ne mange rien qui ne soit pas biologique et parfaitement équilibré. Ça me coûte cher, mais le prix n’est jamais trop élevé quand il s’agit de vivre longtemps et en bonne santé.
– C’est un luxe que tout le monde ne peut plus se permettre de nos jours.
– Je t’offrirai ce luxe si tu restes avec moi. »
Marcus se mit à rire.
« Je ne voudrais pas vivre à tes crochets non plus… » dit-il en contemplant néanmoins les tartines avec envie.
Elle repassa un bras autour de son torse.
« Je te l’ai déjà dit, non ? L’argent n’est pas un problème pour moi… Je préférerais perdre un million que laisser faire une seule égratignure à ton superbe corps… »
Le contact entre eux était toujours un délice – Alice avait une peau incroyablement douce, lisse et dégageant une légère odeur sucrée – mais pour une raison qu’il ignorait lui-même, Marcus ne put s’y abandonner totalement, et sentit son esprit logique refaire surface – sans doute dans une dernière tentative désespérée.
« Quand même, tu exagères peut-être un peu… Souviens-toi qu’il y a encore quelques jours, on ne se connaissait pas…
– Je le sais bien, et justement, je regrette de ne pas t’avoir connu plus tôt. Le destin a bien mal établi ses plans en me faisant attendre si longtemps l’homme dont j’ai toujours rêvé… »
Il se laissa à nouveau aller, en se reprochant presque d’avoir parlé. Lui qui n’avait jamais eu beaucoup de chance dans sa vie, dont la seule perspective d’avenir se résumait jusque-là à espérer percer dans le monde de la musique en jouant de la guitare comme un fou, il avait l’immense privilège d’être aimé par la femme la plus belle, la plus douce et la plus riche au monde – en tout cas, de ce qu’il connaissait du monde – et il osait encore discuter !
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Poupée Psychotique
HorrorQuand il tombe amoureux de la belle et riche Alice Rochelune et découvre que c'est réciproque, Marcus, beau gosse métalleux n'ayant jamais été gâté par la vie, croit que ses rêves se réalisent enfin. Mais les apparences sont parfois si trompeuses...