J'accélère le pas pour rentrer chez moi, si je traîne trop à me mettre au travail, je ne m'y mettrai jamais. Dans le bus, je repense à la conversation que j'ai eu avec le chirurgien ce matin ; je sors son numéro de téléphone et l'enregistre dans mon répertoire. Quand je pousse la porte de l'appartement, je n'ai qu'une envie, c'est d'en sortir ; il sent le renfermé, les volets et rideaux sont tirés, et j'aperçois un petit point rouge lumineux sur le canapé. J'appuie sur l'interrupteur ; comme souvent, Iris est allongé de tout son long, les yeux mi-clos, en train de fumer un joint. Elle grogne et me demande d'éteindre la lumière. Je souffle en marchant jusqu'à ma chambre. J'ouvre ma fenêtre en grand et respire un grand coup avant de mettre mon ordi à charger. Aussitôt fait, je reviens à la charge.
-Iris lève-toi putain !
-Mais vas te faire foutre... c'est aussi mon appart...
-Tu sais très bien de ce que je pense de ta réponse, si tu veux te défoncer vas dans ta chambre, merde !
Bien qu'Iris soit ma meilleure amie, je ne supporte plus ses états soudains de laisser aller. Quand il m'arrive d'en avoir, je prends soin de ne déranger personne. Je m'enferme dans ma chambre, laissant les autres libres dans leur quotidien. Iris elle, traîne sa mauvaise humeur partout. J'ai horreur de ça, surtout après ces deux derniers jours ... Je l'entends se lever en se cognant un peu partout. Je viens vers elle pour l'aider à traverser le petit salon.
-Tu me soûle Océ
-Toi aussi. Tu devrais freiner un peu sur le joint...
-C'est toi qui me dis ça !!! Et elle éclate d'un rire sonore.
-Ouais c'est moi qui te dis ça.
-Depuis quand t'es raisonnable ?
-Depuis aujourd'hui.
-Il t'as fait quoi ton Dylan ?
-C'est pas « mon » Dylan, et il m'a rien fait.
-Si tu le dis... Bon aller laisses moi tranquille, et fermes bien la porte
Je pars en la claquant et m'empresse d'ouvrir les fenêtres et les volets. L'odeur est partout, et depuis toujours, je déteste travailler dans cette fumée qui embrume mon esprit déjà compliqué à concentrer. Je râle toute seule, décidant d'aller m'acheter quelque chose à manger.
<SMS> de Dylan *T'as oublié une petite pochette dans la chambre*
J'ouvre mon sac à main et découvre l'absence de mon porte-monnaie
<SMS> à Dylan *Effectivement, je viens la chercher*
Je soupire, puis me raisonne en me disant que je pourrais tenir compagnie à Dylan pour le repas. Je m'annonce à l'accueil, puis frappe doucement à la porte de la chambre 302.
-Entrez !
-Coucou...
-Ah c'est toi, t'as fais vite !
-Oui, j'habite pas très loin de l'hôpital, t'as déjà mangé ?
-C'est cette aiguille qui me nourrit pour l'instant, donc je ne pourrais pas te dire... Me dit-il avec un sourire en coin
-Oh, j'y avais pas pensé
Je ramasse mon porte-monnaie et cours vite chercher à manger. Dans les couloirs, je croise à nouveau le chirurgien, il s'arrête.
-Tu es encore là ?
-J'avais oublié mon argent dans la chambre, et je voulais manger avec Dylan, mais j'avais oublié qu'il était encore sous perfusion.
-Ah oui, et encore pour deux jours. Tu veux qu'on aille manger dehors ? Il faut que je vois encore trois patients mais ça sera rapide, ensuite je peux souffler un peu.
-Eh bien oui pourquoi pas ?
-Je reviens te chercher dans la 302 dans dix minutes
J'acquiesce en souriant, l'occasion sera parfaite pour que je puisse lui soutirer des informations. Je suis bien plus que curieuse de savoir comment est-ce qu'il a obtenu tous ces renseignements sur moi. De retour auprès de Dylan, je lui raconte ma matinée assez mauvaise.
-Balance la par la fenêtre, elle arrêtera de fumer et tu seras tranquille. Me suggère-t-il d'un air très sérieux
-Qui doit passer par la fenêtre ? Lance une voix masculine
-Docteur ? Vous avez oublié quelque chose ?
-Oui, je te pique Océane pour le déjeuné si ça ne te dérange pas.
-Tu es là tôt !
-Ma collègue avait déjà vu 2 patients sur les 3. Tu viens ?
-J'arrive
Je fais un signe à Dylan, qui me regarde en haussant les sourcils pleins de fois. Je lève les yeux au ciel en souriant et ferme la porte derrière moi.
-Excuse-moi ?
-Oui ?
-Ton prénom c'est... ?
-Sebastian, c'est écrit sur ma blouse normalement.
-Ah... Normalement ?
-Oui, je retrouve plus mon étiquette depuis trois jours et l'accueil ne m'en a toujours pas re fourni une.
Je marche à côté de lui en silence, jusqu'au parking.
-Ça te dérange pas de monter en voiture ?
-Non plus maintenant
-Parfait ! tu vas voir, le resto où on va est incroyable.
-C'est gentil de partager ça avec moi, merci
-Ça me fait plaisir, aller monte.
Je m'installe sur le siège passager et il enlève sa blouse avant de rentrer à son tour et de mettre le contact. La conversation est légère, je lui pose des questions sur son parcours, impressionnée par ses excellents résultats à la fac. Puis il me demande où j'en suis scolairement.
-Euuuh...
-Corde sensible ?
-Un peu, disons que je suis un peu l'étudiante absente
-T'as commencé ton mémoire ?
-Oui bien sûr, mais cette année j'ai un peu envie de tout lâcher.
-Tu sais pourquoi ?
-Je me doute oui, mais je ne veux pas non plus me l'avouer.
-Et à moi tu me l'avouerais ?
-Peut-être, surtout que tu sais pourquoi je pense...
-Je me doute aussi. Et tu vaux mieux que ça croit moi.
Je ne réponds pas, regardant le paysage qui défile derrière la vitre de la voiture.
-C'est Dylan qui t'a donné toutes ces infos sur moi ?
-Non non, ce n'est pas lui.
Je me creuse la tête pour essayer de deviner, en vain.
-T'en fais pas, je te le dirais en temps voulu
-Pourquoi tant de mystères ?
-Pour te protéger
-De qui ?
-De ta réaction très probablement.
Cette conversation devient vraiment étrange, elle me gêne beaucoup. Heureusement, il se gare sur le bord de la route et nous nous présentons au restaurant.
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Souvenirs douloureux [EN PAUSE]
Romance"Le bonheur, la tristesse, l'amour, la douleur, la compassion... Juste, La Vie. Tous ces mots que l'on utilise sans vraiment réfléchir à ce qu'ils signifient vraiment. Ce n'est qu'en ressentant ces paroles au plus profond de nous, que l'on comprend...