On est allongées en cuddle avec Sophie, sur un bac de la cour, entre nos deux heures communes de SVT.
Il n'y a pas de soleil.
- ... et du coup, je sors au mec que ça va pas le faire, il m'insulte, je vais en français parce que cette connasse de prof ne saisi pas que j'ai une vie, elle m'envoie chez la CPE, et une fois là bas je croise l'encadrante du groupe rainbow power qui se fait sûrement doigter par la pétasse qui me colle. Et ensuite, je rentre à la maison après deux heures de sport, et ma mère m'allume sous prétexte que je devrai être plus sérieuse. Et en plus, ce soir au lieu de passer quatre vingt dix minutes avec Rosa, je vais me taper la surveillante qui capte rien à part le nombre de secondes précis qu'il y a dans une heure de retenue.
- Bichette, ça va aller ? demande Sophie qui supporte mon poids et qui arrive quand même à parler, congratulations.
- Oui oui. Et je dois dire à Rosa que je ne pourrai pas venir à cause de mes conneries.
- Tu ne l'as toujours pas fait ?
- Non, j'ai peur qu'elle m'en veuille.
Sophie s'écarte, ris.
- Tu l'aime ?
- Nonnnnnnnn.
- Si.
- Non.
- Si.
- Non.
- Si.
- Non.
- Si.
- Non.
- Si.
- Arrête, non je ne l'aime pas, elle porte juste le nom de ma crush d'enfance à une lettre près, elle danse comme la meuf dans le lac des cygnes et elle m'envoie des invites à des date, mais je ne l'aime pas.
- Menteuse.
Je soupire.
- D'accord, elle vient en deuxième place dans mon classement de mes futures femmes, après Rosé, mais ça n'ira pas plus loin.
- Plus loin que quoi ? Le mariage, ou les enfants ?
- Si tu me laisse le choix, je dirais pas plus loin que la mort, mais je n'ai pas envie de me priver de sa présence une fois au Paradis.
On rit toutes les deux. Ce qui, entre nous, est parfaitement normal, vu que je suis tellement drôle.
- Et toi ? je la fais chier, je sais. Tu en es où avec tes mecs ?
- Non mais ça va ? Mes mecs ? J'en ai qu'un seul et c'est déjà trop-
- Mytho, tu adore voir les gens se battre pour toi, je la taquine.
Elle sourit, je le sens.
- Ouais, j'avoue, j'adore trop regarder les connards qui me disaient que je suis trop grosse qui me voient me faire draguer.
- Profiteuse. En vrai, ils doivent crever de te voir si belle. C'est parce que tu avais recale un des mecs qu'ils t'avaient fait chier autant, pas parce que tu as une corpulence qu'ils ne peuvent pas gérer tellement ils sont cons.
- Oui, c'est ce qu'on appelle l'égo masculin, et il est fragile. Quel dommage qu'ils se sentent obligé de détruire pour se relever...
Une voix nous interrompt.
- Eh, je vous entends, et j'ai pas trop envie de me faire traiter de connard sous prétexte que certains de mes compères le sont !
- Désolée Timéo, on s'excuse en chœur.
Il s'assoit à nos côtés, et je continue de râler devant mes potes qui devraient être flattés que je leur parle, au lieu de soupirer sur ma prétendue chiantise. Ils ne mesurent pas leur chance.
*
La peau de fille est acidulée, chevelue, fraiche. Les poils et l'épiderme crémeux au soleil. Le vent qui enivre les mèches, minérales et écaillées, dans les bracelets de chaines.C'est pas juste une caresse, un nuage, c'est doux, matériel. Le tissu en conjugaison aux mouvements, mais le mieux, c'est l'immobilité, le silence, la proximité.
*
Je rentre chez moi à pieds, ce soir. En passant devant l'école primaire, j'essaie de me souvenir de ce que ça faisait, de voir les lycéens passer avec leurs sacs sur le dos, préoccupés. J'avais l'impression qu'ils étaient tellement adultes. Mdr, même mon miroir est plus mature que moi.
Ils font un 1 2 3 soleil, j'entraperçois la musique parmi leurs cris. Je passe le reste du chemin à essayer de retrouver le titre de cette fucking chanson, et quand j'y arrive enfin, les gosses que j'avais trouvé chou, j'ai plutôt envie de les décapiter. Non mais sérieux, qui a des goûts aussi merdiques à part ma prof de musique de cinquième ?
Une fois rentrée, je prends un paquet de gâteaux au chocolat, une pomme, j'ai acheté un coca sur la route. J'ai envie de me vider le cerveau, tant pis pour le contrôle de physique demain. L'heure de colle à été d'autant plus longue que je savais Rosa sans moi, ne regrettant sûrement pas mon absence. Et cette putain de musique de merde, bordel.
Sous la douche, je hurle.
- QUAND TU DIRAS QUE C'EST MA FAUTE, QUE JE N'AI JAMAIS SU T'AIMER ! AU DIABLE TOI ET TES APÔTRES ... JE M'EN VAIS.
Vianney, je te jure, c'était pas le soir où il fallait me rappeler ma dernière relation de merde.
Quand je rentre dans ma chambre, le ciel est couvert de pluie et le goudron de larmes. Le tonnerre me donne l'impression de trembler.
Assise sur mon lit froid, je pense à ma journée.
Je vais me coucher à vingt heures dix sept en pensant trop fort à Emma.
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Rainbow heart
General FictionPaillettes, arc en ciel et disserts sur le sens de la vie. Esme va vous décoiffer, promis (euh attends, c'est peut être pas très vendeur, non ?) Bref. Je vous aime 🤍 (Je ne sais jamais quoi dire ici, pas vous ?)