*Introduction : l'extraction*

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Aux abords de l'avenue Foch, la circulation se faisait lente et dense. La sonnerie d'alerte du tramway retentissait de parts et d'autres, à mesure que les civils inconscients traversaient les railles. Les automobilistes agglutinés devant les feux les pressaient, aussi les piétons prenaient parfois la décision de traverser la voie pour ne pas attendre infiniment lorsque le voyant retournerait au rouge. Il faut dire que la rue était particulièrement bondée de monde en ce samedi après-midi.

Au coin de la rue Marceau, la lumière de gyrophares était présente. Postés au milieu des flashs d'appareils photo, ils surveillaient la porte d'entrée de l'immeuble résidentiel le plus médiatisé de la décennie. Les murs de celui-ci étaient d'un saumon délavé. Des morceaux de glace translucide gisaient encore à certains endroits, refusant étrangement de fondre. À l'intérieur, celle-ci se faisait de plus en plus présente à mesure que l'on atteignait le sommet du bâtiment. Devant ses portes, une journaliste télévisée expliquait la situation au million de téléspectateurs.

"...Après plus de 10 ans à chercher à sortir les gelés de leur prison translucide, nous sommes heureux de vous annoncer que l'extraction de la dernière victime est en cours. Mesdames et Messieurs, il s'agit de la jeune Izel Ramira, qui était alors âgée de 19 ans lors de la catastrophe..."

*

Une équipe de spécialistes en vêtements de travail s'affairait dans l'espace qu'on pouvait enfin définir comme étant une chambre étudiante. En son centre, sur un lit couvert de neige et de morceau de glace gratté, trônait un immense bloc gelé.

"Nous devrions nous dépêcher de finir le travail. Il arrive dans 5 h, et elle ne sera jamais prête."


Ces paroles, semblant provenir de celui qui guidait l'opération, agitèrent le petit groupe. Ses longs doigts graciles et habiles s'affairaient en utilisaient divers outils sur la glace : tapant, frottant, ils essayaient de l'enlever petit à petit.

"Je commence à la voir ! Venez vite ! fit une voix plus aigüe.

-Bravo, nous y sommes presque. Regardez à travers la glace, nous pouvons distinguer la forme de son corps. Sa main survolait la surface froide, accompagnant ses explication à l'intention du seul caméraman qui avait eu l'autorisation d'entrer. Faites attention a ne pas la toucher, laisser une couche de plusieurs centimètres autour d'elle. Là ! Ses yeux luisait d'une excitation, comme un enfant recevant le cadeau qu'il attendait depuis tout ce temps. Là, elle est assise en tailleur, et tiens quelque chose au creux de ses mains.

- Et ses cheveux ? Je suppose qu'il y tient.

- Ne touchez surtout à rien. N'oubliez pas qu'il à fait tout cela pour elle, je ne voudrais pas signer mon arrêt de mort."

*

Quelqu'un apparut au cadre de la porte. Sa venue ne déconcentra pas un seul des ouvriers, et seul le maître d'œuvre releva la tête lorsque celui-ci annonça apporter un message. Il s'approcha et saisit l'enveloppe noire dont le papier, qu'on pouvait deviner luxueux à son poids élevé, était imprimé par le sceau de son expéditeur

Face au nom inscrit, il inspira profondément en la décachetant. À mesure que ses yeux parcouraient les lignes, ses sourcils tressautaient, et sa pomme d'Adam bien visible remonta lentement le long de sa gorge. Enfin, à la fin de sa lecture, il expira si longuement que certains de ses collègues, ressentant probablement sa détresse, lui jetèrent des œillades anxieuses. Il ne fallait pas être devin pour comprendre que cela venait de Lui.

Âmes miroirsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant