𝟶𝟾. 𝙲𝚒𝚐𝚊𝚛𝚎𝚝𝚝𝚎.

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♫ 𝙾𝚙𝚎𝚗 𝙰𝚛𝚖𝚜 (𝚏𝚎𝚊𝚝. 𝚃𝚛𝚊𝚟𝚒𝚜 𝚂𝚌𝚘𝚝𝚝) - 𝚂𝚉𝙰

𝟷𝟺/𝟶𝟽/𝟸𝟹.



"𝙳𝚒𝚏𝚏𝚒𝚌𝚒𝚕𝚎 𝚍𝚎 𝚜'𝚑𝚊𝚋𝚒𝚝𝚞𝚎𝚛 𝚊̀ 𝚝𝚘𝚗 𝚊𝚋𝚜𝚎𝚗𝚌𝚎 𝚕𝚘𝚛𝚜𝚚𝚞'𝚎𝚕𝚕𝚎 𝚎𝚜𝚝 𝚙𝚘𝚗𝚌𝚝𝚞𝚎́𝚎 𝚙𝚊𝚛 𝚍𝚎𝚜 𝚖𝚘𝚖𝚎𝚗𝚝𝚜 𝚍𝚎 𝚙𝚛𝚎́𝚜𝚎𝚗𝚌𝚎."
𝚂𝚘𝚙𝚑𝚒𝚊 𝚂𝚊𝚝𝚞𝚛𝚗𝚎.




𝟶𝟾. 𝙲𝚒𝚐𝚊𝚛𝚎𝚝𝚝𝚎.



𝙲 𝚊 𝚒 𝚝 𝚕 𝚎 𝚎 𝚗     𝙱 𝚞 𝚝 𝚕 𝚎 𝚛.





Là, tout ça, faut que ce soit étiqueté avant 11h.

L'haleine chaude et caféinée de Steve, mon manager, me parvient en plein nez, ce qui me fait grimacer.

Il désigne deux rayons entiers de produits variés. Je sens une vague de découragement m'envahir. La tâche me paraît insurmontable.

— J'te laisse faire les deux rayons. Ensuite, tu viens en caisse. Faut que tu fasses ça vite, Emily n'est pas là aujourd'hui. On manque d'effectif.

Il place le scanner dans ma main. Les chiffres qui s'affichent sur son écran vert fluo me semblent flous. Ça fait à peine trente minutes que j'ai repris le travail et j'ai déjà l'impression d'être une marionnette, les ficelles sont bien évidemment tirées par Steve et ses ordres incessants.

Je me retiens de soupirer, même si chaque fibre de mon être a envie de le faire.

Je ne vois pas comment je vais finir d'étiqueter deux rayons en deux heures.

Je lui lance un regard en biais. Grand et maigre, sa quarantaine est marquée sur son visage par des années de rancœur et de méchanceté. Sous la casquette du magasin, ses cheveux fins et blanchis par le temps donnent l'impression de fuir son crâne, comme pour échapper à l'homme lui-même.

Il continue à déverser sur moi une liste interminable de tâches à accomplir, sa voix grave résonnant dans le vaste espace du magasin. Certains clients passent et me dévisagent avec pitié, ce qui accentue mon sentiment de honte.

Je regrette déjà le répit de mes jours de congé, désormais balayé par l'ouragan Steve.

J'te laisse faire ça, Caitleen. Traines pas.

Quand il part, je commence à scanner les premiers articles. Les rayons me semblent interminables.

L'atmosphère du Target est jaunâtre, les lumières fluorescentes lui donnent une teinte maladive. Ce genre de lumière a le don de faire paraître le monde un peu plus triste, un peu plus usé.

En jetant un coup d'œil aux vitres immenses qui bordent le magasin, j'aperçois le ciel d'automne qui est d'un gris lourd qui se reflète sur le sol usé du magasin. Ça aussi ça n'arrange rien à la mélancolie ambiante.

Ce magasin dégage une atmosphère glauque, comme si on avait arrêté le temps et l'avait oublié là.

Entre le carrelage éraflé, les étagères en métal rouillé, les chariots grinçants, la musique grésillante qui s'échappe des haut-parleurs donne envie de ne plus jamais remettre un pied ici, et pourtant, ça fait cinq ans que je reviens ici tous les jours.

En réalité, j'ai parfois l'impression que ce Target reflète cette tristesse que je ressens à l'intérieur.

Je soupire en me reconcentrant sur mes taches.

818Où les histoires vivent. Découvrez maintenant