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Ça a commencé un mercredi. Je m'en souviens parfaitement parce que c'était le jour où j'avais cours de sociologie – une matière aussi barbante que fascinante.
Je ne sais pas vous, mais moi j'aimais assez découvrir les témoignages de Marie Aléatoire et Herbert Anonyme, respectivement 42 et 56 ans, qui ne comprennent plus les jeunes. Au fond, je pense que ça me rassurait quant à mes propres parents qui, étrangement, se débrouillaient plutôt bien quand il s'agissait d'échanger avec leur bon à rien de fils.
Vous avez remarqué que je parle d'eux au passé? Ce n'est pas une erreur ou un accès de lyrisme de ma part, non.
Ce mercredi, au beau milieu du mois de novembre, environ 80% de la population mondiale a été décimée.
Et mes darons sont en plein dans ces statistiques incertaines.
Qui aurait pu prévoir une telle catastrophe? Aucune guerre n'était à déplorer à ce moment-là. Oh, évidemment, on avait toujours les mêmes ennuis : surnatalité, famine, maladies, pollution... Mais non, à part ça, tout semblait rouler entre les grandes puissances de notre planète. (Notez que j'essaie ici de paraître un poil naïf, histoire d'enjoliver le bazar.)
J'étais dans la salle de cours, donc. Déjà trente minutes et douze secondes de passées à discutailler de la vision qu'ont les anciens de leur descendance, à observer la calvitie du prof, à s'inquiéter en suant un peu de cette malédiction que j'espérais tenir le plus loin possible de ma tignasse blonde. La lecture des textes de Bourdieu et compagnie agissait alors comme une musique de fond rassurante. Grâce à elle, j'arrivais à m'ancrer dans le moment présent.
Quand j'y repense, je me demande pourquoi une attaque a eu lieu ici, dans les bâtiments de notre université : trois campus rasés avec l'efficacité habituellement prêtée aux bombes nucléaires. Certains disent que toutes les zones d'apprentissage du globe ont subi le même sort, par crainte de voir une énième génération non-croyante émerger.
Je vous avoue que ça me fait pas mal chier d'avoir été ciblé alors que je m'apprêtais à m'endormir, en étant en plus douloureusement conscient de mon manque d'ambition. (Non, vraiment, vous avez eu aucune considération, les gars!)
Donc oui : je m'assoupissais, bercé par la voix monotone du prof, les grésillements continus des néons à moitié effondrés, les chuchotements des autres inattentifs... C'était nickel.
Et soudain, sans sommation, sans aucun bruit avant-coureur, les vitres ont explosé, soufflées par une vague de flammes que nos camarades installés du mauvais côté n'ont pas eu l'occasion de remarquer. Morts sur le coup.
On a connu des réveils plus doux, je vous l'accorde.
Heureusement pour mes fesses, je faisais partie des élèves postés à proximité de la porte, prêt à fuir sitôt les premières notes de la sonnerie entendues. J'ai juste eu le temps d'avoir un aperçu de la chaleur cuisante avant que mon instinct de survie ne reprenne le dessus, comme à peu près toutes les personnes en vie dans la pièce en cet instant. Tel un troupeau de bovins en panique, nous nous sommes précipités vers la sortie en hurlant. (Aucun chercheur n'a pu prouver que gueuler à pleins poumons lors d'un épisode dramatique servait à quelque chose, mais sait-on jamais...)
Je me suis mis à courir en vitesse, tapant mon meilleur sprint, laissant derrière moi mes partenaires de TD desquels je ne connaissais de toute façon pas les prénoms. J'ai des regrets encore maintenant, mais je ne pensais plus qu'à me sauver.
J'ai traversé le labyrinthe des couloirs, me suis glissé entre les évadés que je jugeais trop lents, en discernant à peine les affiches placardées sur les hauts murs orangés qui promouvaient les futurs événements étudiants, projets et rencontres. Je suis pourtant l'un de ces nerds qui (par ennui, attention!) lisent tout ce qui leur passe sous la main, mais là, je n'avais clairement pas le temps.
L'alarme anti-incendie me pulvérisait les tympans, braillant à tue-tête, rendant cette situation un peu plus apocalyptique. Les fenêtres des salles de classe devant lesquelles je défilais avaient également explosé. Je remarquai avec horreur que les éclats de verre restant dans les embrasures avaient coulé... Qu'est-ce qui avait bien pu produire une chaleur telle qu'elle en avait fait fondre le double vitrage?
Enfin, j'ai fini par atteindre l'entrée du bâtiment, aussi terrifié que les autres. Je ne pensais plus qu'à une chose : sortir de ce merdier, rejoindre mes parents le plus vite possible et les emmener loin d'ici. Il me fallait regagner ma voiture garée sur le parking...
Mais j'ai dû laisser tomber l'idée quand j'ai vu ce qui se passait à l'extérieur.
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Shinmahō ✧ 信魔法 || 𝑆ℎ𝑖𝑛𝐾𝑎𝑚𝑖
Fanfiction// 𝐄𝐍 𝐂𝐎𝐔𝐑𝐒 // « Ceux qui ne croient en rien sont voués à disparaître. » Denki Kaminari, étudiant blasé parmi tant d'autres, ne croit qu'en ce qu'il voit. Magie, créatures fantastiques ou livres enchantés : tout ça, il s'en moque allègrement...